Meyer Landsman, policier dans la ville de Sitka en Alaska, est réveillé par le gérant de l'hôtel où il loge pour examiner le cadavre d'un autre client retrouvé dans une chambre voisine. Landsman se lance à corps perdu dans l'enquête sans soupçonner encore à quel point ce meurtre sort de l'ordinaire.

Quelques années après Les Extraordinaires Aventures de Kavalier et Clay, grande fresque, entre autres, sur la création de comics de super-héros à l'aube de la Seconde Guerre Mondiale récompensée d'un prix Pulitzer, Michael Chabon a livré un nouveau roman primé (prix Locus, Hugo, Nebula, rien que cela) The Yiddish Policemen's Union (publié chez nous sous le titre Le Club des Policiers yiddish et mystérieusement épuisé depuis quelques années). Il s'agit d'un mélange de roman noir et d'uchronie. Tout droit sortis du premier genre, le personnage principal, Landsman, flic brillant mais alcoolique et dépressif vivant dans un hôtel minable qui va enquêter au milieu des gangsters et des notables pourris. Tout cela dans un cadre insolite lié à des différences notables à l'issue de la dernière guerre mondiale: après avoir échoué un sanglant échec en Israël, un district juif a été créé en Alaska, avec un statut extrêmement précaire.

On découvre cette réalité parallèle petit à petit, au fur et à mesure de l'enquête de Landsman, assisté de son collègue et cousin Berko, à moitié tlingit et de son ex-femme Bina. Le moins que l'on puisse dire c'est que cette réalité n'est pas particulièrement riante, entre personnages déracinés dans la perspective de nouvelles errances, crime plus ou moins organisé, tensions communautaires et fanatismes religieux pas toujours aussi opposés que l'on pourrait le croire. La plume de Chabon, malgré le désarroi général, ne manque pourtant pas d'humour à l'occasion et l'on suit Meyer Landsman dans une investigation aux pistes parfois ténues (il ne faut jamais négliger les échecs) et à la résolution dont on se doute qu'elle ne sera pas heureuse sans réaliser à quel point.

Enquête policière classique, tout du moins jusqu'à ce que l'on atteigne le moment des grandes révélations, dans un cadre qui l'est en revanche beaucoup moins, The Yiddish Policemen's Union mélange avec bonheur les genres bien qu'il soit par moment un peu ardu à suivre (entre les échecs et un argot yiddish qui met dans l'ambiance mais nécessite parfois un petit lexique. Il y en a un à la fin, en fait).