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Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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The Crown, saison 1 épisode 1: Wolferton Splash
1947: la princesse Elizabeth épouse Philip, duc d'Edimbourg, et imagine couler encore quelques années paisibles avant d'hériter du trône, sans avoir conscience que la santé de son royal père George VI devient chaque jour plus fragile.

Oui, je fais les choses à l'envers. J'avais déjà écrit un bilan de la saison 1 il y a bientôt un an, alors pourquoi y revenir? C'est l'inconvénient du binge-watching façon Netflix: bien pratique pour avancer à son propre rythme et ne pas subir l'attente infernale d'une semaine après un cliffhanger incroyable (encore que les cliffhangers incroyables dans le cas de cette série, c'est un peu difficile) mais quand on avale tout d'un coup, le moment venu de donner son avis, on oublie plein de remarques. Du coup, d'ici décembre et la saison 2 (que j'avalerai tout aussi vite, je me connais) j'ai décidé de revenir sur chaque épisode. Et quitte à entrer dans les détails, je suivrai la même méthode que pour Hornblower, à savoir scène par scène plutôt que de me livrer à des impressions plus globales comme pour Doctor Who ou Game of Thrones, ainsi je serai certaine de ne rien oublier. Allez zou, on est parti!

Notre premier épisode, nous informe-t-on, s'ouvre à Buckingham Palace, en 1947. Pour être précis, dans les toilettes de Buckingham Palace, où ce pauvre George VI est en train de cracher ses poumons.

Et finit par balancer un sanglant mollard dans la cuvette, un début des plus glamours:

On va essayer de rendre le recap un poil éducatif, histoire de discerner ce qui tient des faits et de la licence artistique, parce qu'il s'agit d'une fiction avec ses règles après tout et que je trouve plus intéressant de comprendre pourquoi un scénariste ne s'en tient pas à la réalité que de m'indigner parce que tout n'est pas véridique. En 1947, il est fort improbable que George VI était déjà atteint d'un cancer des poumons, mais il avait néanmoins de sérieux ennuis de santé, principalement dus à un fort tabagisme (sur lequel on reviendra), il a souffert notamment d'artériosclérose. Dans une fiction historique on est généralement amené à synthétiser et c'en est un exemple, on n'allait pas partir sur une maladie pour poursuivre sur une autre deux scènes plus loin.

Enfin bref, après cette entrée en matière qui annonce la couleur, on fait enfin connaissance d'Elizabeth, interprétée par Claire Foy, que j'apprécie énormément même si elle aurait pu s'abstenir de jouer dans Crossbones:

La princesse Elizabeth donc, attend d'un air légèrement stressé que la cérémonie qui se déroule derrière une lourde porte s'achève. La cérémonie en question concerne son fiancé, Philip Mountbatten, qui pour l'épouser doit abandonner ses titres de prince de Grèce et de Danemark et se convertir à l'Anglicanisme.

Choisir un acteur au visage aussi atypique que Matt Smith pour jouer Philip qui faisait davantage dans la beauté classique peut être déconcertant, et son toupet blond n'est pas toujours très crédible mais en dehors de ça, je dois dire que ça le fait. Une fois Philip dépouillé de ses titres, arrive le futur beau-papa pour lui en octroyer de plus british, à commencer par celui de Duc d'Edimbourg.

Je n'ai pas trop compris pourquoi certains téléspectateurs ont dit que Jared Harris ne bégayait pas, car c'est exactement ce qu'il fait dans la première scène où il ouvre la bouche pour faire autre chose que cracher du sang. Certes, le bégaiement est plus discret que dans Le Discours d'un Roi, qui est la référence pour une interprétation de ce monarque à l'écran, mais il y a plusieurs raisons à cela: The Crown se déroule alors qu'il a suivi une thérapie depuis de longues années et il bégayait beaucoup moins, voir pas du tout, dans un cercle privé. Quoiqu'il en soit, je dois dire que Jared Harris fait des merveilles dans un rôle qui a attiré des louanges (méritées) à Colin Firth et je ne ferai pas de compétition entre les deux car je trouve que leurs performances se complètent plus qu'elles ne s'opposent.

Bégaiement ou pas, il barde Philip de tout un tas de titres avant de s'éclipser, fin de la cérémonie et tout le monde s'en va, bien que Lord Mountbatten prenne le temps de féliciter son neveu d'un air particulièrement satisfait.

Mountbatten, Dickie pour les intimes, est joué par Greg Wise, qui sera toujours pour moi le Willoughby de Raison et Sentiments d'Ang Lee et accessoirement Mr Emma Thompson. Mais pour ne pas trop nous égarer, précisons que Mountbatten faisait partie des raisons pour laquelle une partie de l'entourage d'Elizabeth n'était pas très chaud à l'idée du mariage: on craignait qu'il n'essaie de tirer les ficelles à travers Philip et par la suite la série va d'ailleurs en donner quelques exemples.

En attendant, les deux tourtereaux ont enfin l'occasion de discuter, et Philip d'exprimer ses doutes vis-à-vis du bien fondé de la décision d'Elizabeth: n'aurait-elle pas préféré épouser un Britannique bon teint? Celle-ci le rassure tout de suite et lui enjoint immédiatement après d'arrêter de fumer, ce que fait son cher et tendre non sans râler, (et de se servir d'un cendrier que lui amène immédiatement un domestique qui ne semble là que pour ça...)

Quoiqu'il en soit, Philip n'a pas l'air très enthousiaste et ne cache pas qu'il est en train de se demander ce qu'il est allé faire dans cette galère, ce qui n'est pas franchement délicat, mais on pourra constater que la délicatesse n'est pas son point fort. Il prend tout de même la peine de rouler une pelle à Elizabeth ce qui rassure un peu sur ses sentiments, on va dire qu'il a juste du mal à les exprimer.

En tout cas Elizabeth a l'air d'apprécier.

Et tout cela n'était que le pré-générique. Le générique en question nous apprend, si on ne le savait pas déjà, que la série est écrite par Peter Morgan, déjà scénariste de The Queen de Stephen Frears, mais aussi de Rush ou de Frost/Nixon. Un habitué des Windsor et une valeur à peu près sûre pour les fictions historiques, donc. On apprend aussi que Hans Zimmer a écrit la musique du générique et que Rupert Gregson-Williams s'est occupé du reste, ce qui ne dénote pas puisqu'on reste dans du pur Zimmercontrol, dans sa manière "attention c'est solennel". On apprend également que Nina Gold est responsable du casting, on pourra s'étonner de ne pas retrouver beaucoup de rescapés de Game of Thrones (un seul, si je me souviens bien) parce que dans Wolf Hall où Claire Foy jouait déjà une reine d'ailleurs, c'était un véritable défilé (elle avait aussi bossé sur Rush, qui si vous suivez a été scénarisé par Peter Morgan). Et enfin, on apprend le titre de l'épisode, qui n'évoque pas grand chose sur le moment.

Nous sommes désormais le jour du mariage et George VI, aka Bertie, est en train de se préparer, avec pas moins de deux valets pour l'habiller. Valets qui servent aussi de consultants médicaux puisqu'il leur confie ses craintes vis-à-vis du sang qu'il a craché le matin-même. Valets qui le rassurent immédiatement, il a dû se racler la gorge un peu fort, pas de quoi se mettre la rate au court bouillon. Avis qui convient à Bertie, qui se met quand même la rate au court bouillon, parce que ses valets mettent trop de temps à attacher son col.

Même si le personnage est vite attachant on ne pouvait pas faire l'impasse sur le fait qu'il était sujet à de grosses crises de colère pour des prétextes bénins. Heureusement, Peter Townsend, son fidèle écuyer (à ne pas confondre avec Pete Townshend des Who) sait immédiatement comment l'apaiser, en récitant un petit poème cochon pour agrémenter le tout.

"There was a young lady named Sally,/ Who enjoyed the occasional dally./ She sat on the lap of a well-endowed chap,/ And cried "Sir! You're right up my alley!"

Townsend est joué par Ben Miles, que j'avais découvert dans Coupling et je me demande si le choix de ce limerick en particulier n'est pas une allusion à son rôle dans cette série puisqu'il y incarnait un personnage assez crétin mais très gâté par la nature qui finissait avec une dénommée Sally. En tout cas, voilà qui a l'heur de plaire à sa Majesté qui s'empresse de renchérir avec quelques vers de son cru:

"There was an old Countess of Bray,/ And you might think it odd when I say,/ That despite her high station, rank and education./ She always spelled "Cunt" with a K!"

Les cours d'élocution de Lionel Logue auront vraiment été un bon investissement, dites-donc.

Assez rigolé, Tommy Lascelles, le secrétaire privé du roi, leur signale que bon, tout cela est bien gentil mais l'heure tourne. Lascelles n'apparait que deux fois dans cet épisode, ici à l'arrière plan et brièvement un peu plus tard où il ne dit pas un mot mais on aura l'occasion de le revoir, et comment.

Pendant que le royal cortège prend son temps, Philip, lui, commence à stresser un petit peu en la cathédrale de Westminster. Et quand des acclamations à l'extérieur retentissent, il s'imagine forcément que ça y est, sa future est dans la place. Sauf que nenni.

Ce n'est que ce vieux cabotin de Churchill et sa femme, l'ancien Premier Ministre ayant attendu que tous les invités soient arrivés pour pouvoir faire une entrée remarquée. D'autant plus qu'il ne pénètre dans la cathédrale que quand l'hymme I vow to Thee, my Country retentit, histoire de remonter la nef comme si c'était lui l'épousée du jour. Churchill est incarné par John Lithgow, ce qui peut paraître un choix étrange, mais comme pour Matt Smith, on s'y fait vite. Quant à Clementine Churchill, encore quelqu'un venu de Raison et Sentiments, Harriet Walters.

Entrée qui a l'air de plaire à la majeure partie de l'assistance qui se lève en son honneur, mais qui a des effets un peu plus divers sur certains. À commencer par Clement Atlee, le Premier Ministre travailliste en exercice.

Le pauvre gars ne bénéficie pas du même charisme et de l'adoration des masses et de façon compréhensible goûte peu de voir son adversaire politique lui voler la vedette (il y a ce qu'il semble être une bonne biographie d'Atlee qui sort bientôt en paperback et j'avoue que le bonhomme m'intéresse assez).

Du côté des collègues conservateurs de Churchill, les avis sont également partagés.

Lord Salisbury a l'air absolument ravi de la nouvelle démonstration de bagout de Churchill, Anthony Eden (Jeremy Northam, qui s'est transformé en silver fox pendant qu'on regardait ailleurs) lui, trouve surtout qu'il est temps que Churchill laisse la place à quelqu'un de plus jeune (au hasard, lui). Il est limite à deux doigts de se tirer la moustache en grinçant "un jour, tout cela sera à moi" dans cette scène. Pas très subtil mais ça pose d'entrée la relation entre les deux, qui va durer une bonne partie de la saison.

Enfin, George VI et Elizabeth arrivent et on peut commencer. Un petit point sur la reconstitution. La série n'a pas plus été tournée à Westminster qu'à Buckhingham et la scène se déroule en réalité dans la cathédrale d'Ely, mais ça fait la blague. The Crown a été pas mal présentée comme la série la plus chère à ce jour, il semblerait que la promo ait été mensongère de ce point de vue mais il y a indéniablement des moyens et du soin (on a même reconstitué l'immonde chapeau d'Edwina Mountbatten, c'est dire si les producteurs n'ont peur de rien).

Pendant la cérémonie, on a l'occasion de constater plusieurs choses. D'une part, Churchill n'est pas du tout ravi de ce mariage, qu'il voit comme une manœuvre de Lord Mountbatten, à ses yeux l'homme qui a laissé partir l'Inde de l'Empire (euh, comment te dire Winston...). Et il ne se gêne pas pour pointer que si les sœurs de Philip ne sont pas là, c'est parce qu'elles ont toutes épousé des nazis. Une sortie pas vraiment chuchotée qui n'est pas sans provoquer la gêne de Clementine, mais pour le spectateur c'est plutôt rigolo.

Comme il n'a pas parlé assez fort, la cérémonie suit son cour et on en est aux échanges de vœux, Elizabeth faisant ceux d'aimer Philip, de le chérir et de lui obéir. Ce dernier, d'après Churchill, elle a insisté pour qu'il soit présent, ce qui nous laisse penser qu'Elizabeth n'a pas vraiment la fibre féministe et que ça risque de poser problème plus tard quand elle sera une reine à qui Philip devra allégeance. Néanmoins, on sent une angoisse de sa part, que Philip dissipe en faisant discrètement le pitre.

Je ne pense pas que cette petite séquence avait pour but de nous laisser croire qu'au pied du mur, Elizabeth n'était plus très sûre de vouloir épouser Philip, car cela ne cadre pas du tout avec ce que raconte la série par ailleurs (c'est elle qui a dû batailler pour imposer le seul homme qu'elle ait jamais aimé), ni avec la réalité. Je suppose qu'il s'agit plutôt de montrer une Elizabeth réservée et encore un peu timide et un Philip seul capable de la détendre, ce qui expliquerait en partie ce qu'elle lui trouve.

Enfin, la scène est l'occasion de voir Margaret, la sœur cadette d'Elizabeth, lancer un regard insistant à Peter Townsend durant l'échange des vœux, qui d'un mouvement de la tête l'enjoint à davantage de discrétion. Il y a anguille sous roche.

Un point sur l'interprète de Margaret, Vanessa Kirby. Elle et moi sommes parties du mauvais pied car je l'avais vu coup sur coup dans une adaptation des Grandes Espérances et de Labyrinth, où je l'avais trouvée à chaque fois fade à pleurer. Ici, soit elle a progressé, soit son personnage est un peu mieux écrit, je l'ai trouvée tout à fait à la hauteur (même si j'avoue que je n'apprécie pas particulièrement Margaret, mais on aura largement l'occasion d'en reparler).

On quitte Westminster pour rentrer à Buckingham, et c'est le moment traditionnel des photos de groupe.

Si vous tombez sur les vraies photos, vous remarquerez qu'ils posaient devant un fond uni et sombre mais c'est nettement plus drôle de les voir devant des vues diverses et variées eprendre des airs inspirés, telle la famille Groseille qui voudrait faire croire qu'elle a passé ses vacances aux Caraïbes.

Pendant que certains posent, d'autres persiflent: la reine Elizabeth (mère de la future Elizabeth II et épouse de George VI, que nous appellerons avec un peu d'anticipation la Queen Mum ce qui sera beaucoup plus simple) et sa belle-mère la reine Mary, (épouse de George V et mère de George VI) n'ont pas grand chose de gentil à dire sur Philip et sa famille (bien qu'en fait, Mary ait été en faveur de cette union).

La Queen Mum est interprétée par Victoria Hamilton qui ne fait pas un mauvais travail, mais j'avoue que je suis réservée sur son portrait. Outre qu'elle est trop mince (mais ça encore, ce n'est pas comme si les autres étaient tous des sosies de leur modèle), on ne sent jamais la chaleur qui a contribué à la rendre populaire, quitte à cacher des aspects de sa personnalité nettement moins agréables. Elle n'aura pas trop l'occasion de plaisanter au cours de cette saison, mais tout de même, c'est dommage.

En revanche, Eileen Atkins en Queen Mary, est bien plus convaincante. Cela fait d'autant plus plaisir qu'elle l'avait déjà interprétée dans Bertie and Elizabeth, un téléfilm sur les parents d'Elizabeth II, qui n'était pas de la même qualité que The Crown: c'était cheap, plat, et apparemment le père d'Elizabeth était en fait Forrest Gump. Mais Eileen Atkins y était très bien et c'est donc une bonne chose qu'elle ait l'occasion de briller dans le rôle avec un script moins neuneu.

Elles bavent donc bien sur Philip, sur ses origines allemandes (ce qui peut se comprendre pour Queen Mum, moins pour Mary), et sur sa mère, qui est entrée dans les ordres.

Il y aurait d'ailleurs pas mal à dire sur Alice de Battenberg, sourde mais polyglotte, qui a souffert de schizophrénie ce qui l'a empêchée de s'occuper de son fils mais qui est également Juste parmi les nations. On se contentera de dire qu'elle n'était pas du tout habillée en nonne à ce mariage, mais encore une fois l'entorse à la réalité se comprend: cela illustre de façon plus percutante à quel point Philip peut détonner à la cour.

En tout cas, Mary reconnait à sa petite-fille d'avoir tenu bon pour épouser Philip en dépit de toutes les résistances à son égard, preuve qu'elle a du caractère sous ses airs effacés. Queen Mum est dubitative.

Mouarf

Elizabeth arrive enfin à s'extraire de la séance photo pour rejoindre son papa qui a un cadeau pour elle (avec un Townsend derrière qui a l'air tellement content que l'on croirait que c'est sa surprise à lui).

Joie, c'est une petite caméra! Car comme l'explique Bertie, si le mariage d'Elizabeth est aussi heureux que le sien, il veut qu'elle n'en rate aucune miette. C'est mignon, mais quelque chose me dit que la famille ne sera pas toujours aussi heureuse d'être vue à travers des objectifs.

Enfin, il est l'heure d'aller au balcon saluer les manants qui poireautent depuis une plombe pour les acclamer, quand Bertie est pris d'une quinte de toux qu'il calme avec une bonne clope, ça ne peut pas faire de mal, si? (Clope dont Townsend a humidifié le filtre, ce qui me parait bizarre).

Clope ou pas, Bertie n'a pas l'air dans son assiette et fait attendre son public, et le reste de la famille sent bien que quelque chose cloche (la musique aussi d'ailleurs, elle rend la scène oppressante).

Queen Mum vient cependant le rassurer et il va donc saluer la foule qui scande "We want the King!", ouf, tout va bien.

On remarque que Margaret ne regarde pas du tout la foule mais dans la direction de Townsend

Un petit point sur ce passage, si l'on suit la série sans en savoir plus que ça sur le personnage, on pourrait penser que ce dernier, qu'on nous a présenté comme malade dès la scène d'ouverture, faisait juste un petit malaise lié à cela. En fait George VI ne souffrait pas seulement d'un problème d'élocution mais d'une timidité maladive et pouvait être pris de crise d'angoisse lorsqu'il devait faire une apparition publique, même sans discours à prononcer. Je ne pense pas que le seul fait de faire coucou au balcon de Buckingham pouvait en provoquer une mais il fallait bien illustrer cet aspect d'une façon ou d'une autre.

Fin de la première partie alors qu'un carton annonce que douze mois ce sont écoulés même si ce qui suit est en fait un montage montrant des scènes se déroulant de 1948 à 1951, allez comprendre. On fait donc la connaissance de Charles, d'Anne et d'un Corgi avant de partir pour Malte.

Elizabeth et Philip sont donc à Malte, où monsieur mène sa carrière d'officier et madame est maitresse de maison, et cela a l'air absolument idyllique.

Le petit ménage organise d'ailleurs une réception à l'occasion de la promotion de Philip, qui se voit remettre ses insignes par son fils aîné.

Profite bien de l'occasion d'être un bambin mignon tout plein, Charles, tu risque d'en prendre plein la figure dans les saisons suivantes!

Si je ne m'abuse, Elizabeth avait laissé ses enfants en Angleterre à cette époque mais là encore, petites libertés avec les faits pour renvoyer une image de famille parfaite qui va être brisée par ce qui va suivre. Et cela commence avec un coup de fil inquiétant, ce que confirme Martin Charteris, le secrétaire privé d'Elizabeth joué par Harry Hadden-Paton, le Bertie de Downton Abbey.

L'autre Bertie, George VI, doit subir une lourde opération et Elizabeth doit vite rentrer pour soutenir le moral de sa famille... Et pour être présente au cas où elle deviendrait reine suite à un coup de bistouri maladroit du chirurgien.

Bertie, donc, est sur le billard pour une pneumonectomie, et comme à l'époque le souverain n'allait pas à l'hosto comme le commun des mortels, une salle d'opération a été installée dans une salle de bal de Buckingham, en toute simplicité et selon toutes les normes hygiéniques possibles.

Encore une fois on fait jouer la carte de la reconstitution soigneuse et réaliste, mais on n'en demandait peut-être pas tant.

The Crown, la série qui dissèque la monarchie

George VI se fait donc enlever un poumon bien noirâtre et survit. Son médecin s'empresse de rassurer le reste de la famille, mais Philip est le seul à remarquer qu'il n'a pas l'air si jouasse que cela. Aussi va-t-il fureter en salle de bal/opération et a le temps de voir la tronche du poumon, ce qui lui fait comprendre qu'il y a un peu plus que des "modifications structurelles" à régler comme on avait présenté la chose.

Quelque temps après, en cuisine où l'on croise rats vivants et rats crevés ce qui n'émeut pas le personnel (dans Victoria tout le monde serait hystérique), on prépare le déjeuner du roi en écoutant la radio, qui annonce l'élection de Winston Churchill, à l'âge tendre de 77 ans, au poste de Premier Ministre.

Après avoir annoncé qu'il est de retour et que ça va barder, il s'en va souper tout en se faisant examiner par son médecin, et je suis sûre que ce n'est pas gênant de prendre la tension de quelqu'un qui fait autre chose pendant ce temps.

Ce n'est cependant pas sa propre santé qui inquiète Churchill mais celle du roi, dont il file le dossier médical à son toubib, sans lui préciser de qui il s'agit, histoire de comprendre ce que sont ces fameuses "modifications structurelles" au poumon.

Le verdict ne se fait pas attendre, "modifications structurelles" est juste un diagnostic bidon que l'on donne quand l'on n'ose pas dire qu'il s'agit d'un cancer. Oups. Sur ce, Churchill s'en va au palais histoire que le roi dont il connait désormais l'état officialise sa prise de fonction.

Le roi, lui, se fait une beauté, ou plutôt charge ses valets de faire disparaître son teint cadavérique sous une couche de maquillage.

Il ne s'agit pas tant de coquetterie que de ne pas avoir l'air faible et malade en public et c'est historiquement exact même si les résultats n'étaient pas bien probants (les gens ne remarquaient pas forcément qu'il était malade mais trouvaient extrêmement étrange de voir le roi maquillé comme une voiture volée).

Ignorant que Churchill en sait encore plus que lui sur sa santé, le roi reçoit donc chaleureusement son Premier Ministre, dont on apprend qu'il tient à rester debout durant ce genre d'entretien. C'est l'occasion de voir que les deux ont une excellente relation de travail (ce qui n'était pas le cas au début et le film Darkest Hour devrait aborder le sujet) et George VI est convaincu de parfaitement donner le change, de convaincre qu'il est parfaitement remis et un poumon en moins ce n'est pas du tout handicapant, on se sentirait presque plus léger.

Tout en s'en grillant une, Bertie annonce tout de même que si tout va comme sur des roulettes, il ne se sent pas de faire le grand tour du Commonwealth prévu et qu'il serait préférable d'envoyer sa fille à sa place. Après tout, elle deviendra reine dans un très lointain futur, autant qu'elle acquiert une petite expérience avant. Ce à quoi Churchill acquiesce en cachant bien mal son inquiétude.

Sur quoi il retourne enfin à Downing Street où une haie d'honneur l'attend, et seule Clementine n'a pas l'air ravi de sa prise de fonction. Jock Colville, le secrétaire privé de Winston (qui est incarné par Nicholas Rowe, le Sherlock Holmes du Secret de la Pyramide) en profite pour lui présenter la nouvelle secrétaire, Venetia Scott.

Après quoi il confie à son épouse ce qu'il sait de l'état du roi, et qu'il va falloir se préparer à assister une toute jeune reine incessamment sous peu, ce qui ravit encore moins Clementine qui sent bien que son mari devrait goûter une retraite méritée au lieu de gouverner le pays, surtout à une période pareille. Churchill, de son côté, imagine mal comment il ne pourrait pas être absolument indispensable, ce qui a l'air d'être un trait de caractère répandu chez les politiciens.

Pendant ce temps, Philip est en train de superviser les travaux à Clarence House tout en s'occupant des enfants, et Elizabeth en profite pour aller déjeuner avec sa famille à Buckingham, où elle chante les louanges de son époux qui a tellement d'idées pour la décoration d'intérieur qu'il pourrait animer une émission sur M6. La Queen Mum est à ce point convaincue qu'elle préfère botter en touche et convoquer Peter Townsend pour lui demander si Bertie est en état de passer les fêtes de Noël à Sandringham dans le Norfolk, ce qui rencontre une réponse affirmative.

Margaret insiste alors lourdement pour que Peter les accompagne alors que de l'avis de la Queen Mum, il devrait rester avec sa femme et ses enfants (oui parce que ça n'a pas encore été précisé entre deux œillades enflammées de Margaret, mais Townsend est marié et père de famille). Mais Peter n'a pas l'air trop gêné de laisser ses proches découper la dinde tout seul, et le petit manège de Margaret n'échappe pas à sa sœur, qui le lui fait savoir quand elles se retrouvent seules.

Enfin, quand je dis seules, il y a un bataillon de domestiques autour, dont un que Margaret houspille car il a eu le malheur de débarrasser son assiette trop tôt (charmante). J'imagine qu'à force d'être entouré en permanence de serviteurs on n'y fait plus attention, mais c'est assez gênant de les voir discuter de sujets intimes comme s'ils étaient des meubles (et ils doivent en voir de belles, la maxime selon laquelle nul n'est un héros pour son valet de chambre ne vient pas de nulle part). Après quelques publications de mémoires par des majordomes indiscrets je suppose que la famille royale fait un peu plus attention (ou elle se contente de leur faire signer un contrat de confidentialité en les menaçant des feux de l'enfer s'ils ne le respectent pas) mais qu'est-ce que ce mode de vie doit être malsain. Margaret fait promettre à Elizabeth de ne rien dire de son béguin à ses parents, et le sujet est clos.

À l'étage, George VI reçoit le docteur Weir, son médecin, car il est contrarié. On lui a enlevé un poumon entier pour qu'il cesse de cracher du sang tel la Dame aux Camélias, et malgré tout cela continue, y-a-t-il une explication à ce mystère?

Weir est finalement obligé de jouer carte sur table: les modifications structurelles du poumon enlevé étaient en fait une tumeur, et il y en avait une autre en développement sur le poumon laissé. Personne n'est au courant à l'exception de Churchill, et il est impossible de prévoir combien de temps il reste à vivre au roi, mais ça ne peut pas être énorme.

Jared Harris est absolument remarquable dans cette scène, où seul un tic à l’œil (et un recours à la sacro-sainte clope) trahit son angoisse devant sa fin prochaine. Il mérite toutes les récompenses possibles pour le rôle mais il devra se contenter d'une ou deux nominations et c'est bien dommage.

Bien assommé quand même par la funeste nouvelle, George VI s'en va passer Noël à Sandringham, et toute la famille embarque dans le Poudlard Express pour l'occasion.

Le roi passe le voyage dans un état de quasi-somnambulisme tellement il ne peut pas se sortir de la tête ce qui l'attend mais seul Philip (qui a vu le poumon, je vous le rappelle au cas où) remarque son trouble.

Une fois sur place et après ou avant ce que l'on imagine être un bon repas, la famille royale et son entourage reçoivent les villageois du coin venus leur chanter quelques cantiques à commencer par In the Bleak Midwinter, dont les vers What can I give Him, /Poor as I am? rappellent si besoin est que les restrictions sont toujours en place même si la guerre est finie depuis plus de six ans, et qu'effectivement les visiteurs n'ont sans doute pas grand chose à donner.

Et pourtant, tradition ou popularité du souverain dont on a apprécié qu'il reste à Londres durant les bombardements, ils trouvent tout de même moyen de donner, même si ce n'est pas grand chose.

Bertie se voit donc offrir une couronne en papier, la seule couronne de The Crown qu'on aura vu de l'épisode, si l'on excepte celle qui se forme dans le générique. Cela symbolise à n'en pas douter tout un tas de choses. Bertie est en tout cas très ému et se joint donc aux villageois pour le chant suivant (je ne crois pas qu'on puisse chanter avec un seul poumon, mais ce n'est pas grave).

Et comme il est bien conscient qu'il s'agit probablement du dernier Noël qu'il passe sur cette Terre, il ne peut s'empêcher de larmoyer sur la fin. Du coup sa famille se retrouve profondément gênée par cette démonstration so shocking d'émotion en public, et commence à se dire que décidément, quelque chose ne tourne pas rond.

Tout semble oublié le lendemain quand George VI convoque sa fille dans son bureau de toute urgence, pour ensuite lui annoncer qu'il n'a rien de particulier à lui dire. Il en profite néanmoins pour la briefer au sujet des boites rouges contenant les papiers envoyés par le gouvernement, et lui explique notamment que les papiers les plus importants qu'on espère qu'il ne verra pas sont systématiquement placés en dessous. Il faut donc quand personne ne regarde inverser la pile. George s'inquiète également des relations entre Elizabeth et Philip, car il est bien placé pour savoir qu'un monarque a besoin de toute l'aide possible de son conjoint et promet d'emmener Philip à la chasse histoire qu'il se sente mieux intégré. Surtout, il annonce que ce sera à Elizabeth et Philip de faire le tour du Commonwealth à sa place.

Elizabeth relaie la nouvelle à Philip qui n'est pas du tout du tout emballé.

Il est officier de marine, que diable, il ne va pas rester là à sourire bêtement pendant que sa femme coupe des rubans. Et puis cela signifie être séparés des enfants pendant des mois, inquiétude qu'Elizabeth balaie d'un geste, ils sont trop jeunes, ils ne s'apercevront de rien. En réalité le couple avait déjà fait de longs voyages sans Charles et Anne, au Canada notamment, et ce n'était pas incongru à l'époque, donc je ne sais pas si cette scène est fondée, mais elle introduit un élément récurrent, une Elizabeth toujours prête à faire passer son devoir avant sa vie de famille et distante vis-à-vis de sa progéniture, face à un Philip qui traine les pieds devant les contraintes de représentation. Il finit par accepter, il faut dire qu'il n'a pas vraiment le choix en fait.

Au son de la cornemuse, une nouvelle aube se lève sur Sandringham, et sur George VI, dont le petit rituel matinal consiste à cracher du sang dans un mouchoir qu'il range dans une petite boite déjà remplie de mouchoirs sanglants (ça doit être la joie pour le valet qui doit vider le bidule) avant d'enchaîner sur l'amie du petit-déjeuner, la première clope de la journée.

Ceci accompli, il respecte sa promesse d'emmener Philip à la chasse et le tire donc du lit, le trouvant dans le simple appareil d'une beauté qu'on vient d'arracher au sommeil. Il lui annonce benoitement que c'est une bonne journée pour massacrer des canards, allons donc à Wolferton Splash et oh mon Dieu c'est le titre de l'épisode soudain tout devient clair!

Bonjour monsieur

Bertie et son valet trouvent en tout cas la scène très cocasse, on est farce chez les Windsor, tendance potache quand même.

Trollolol

Une fois à Wolferton Splash, l'ambiance se fait plus grave et la partie de chasse n'était pas tant l'occasion pour George VI de se rapprocher de son gendre que de lui faire un topo sur ce qui l'attend.

Tous les titres qu'on lui a accordé sont bien jolis, mais ils ne sont pas son véritable travail, pas plus que la carrière d'officier de marine qu'il devra abandonner: sa femme est son travail et il devra lui consacrer toute son existence.

She is the job. She is the essence of your duty. Loving her. Protecting her. Of course, you'll miss your career. But doing this for her, doing this for me there may be no greater act of patriotism. Or love.

Philip assure bien comprendre le laïus, et sans doute qu'il est sincère à ce moment-là. De toute façon il vaut mieux éviter de contrarier son beau-père colérique quand il y a des fusils à portée main.

L'épisode se conclut par un superbe montage alterné entre la partie de chasse qui s'enfonce dans la brume tandis qu'Elizabeth s'introduit dans le bureau de son père pour s'asseoir à sa place, contemplant la boite rouge frappée de la mention The King, sans savoir que cette dernière n'y restera pas longtemps et n'y reviendra pas avant longtemps, mais peut-être consciente pour la première fois depuis le début de l'épisode de ce qui lui pend au nez.

Le tout sur la musique de Rupert Gregson-Williams et il est temps que j'en dise un mot: je ne suis pas fan de Hans Zimmer, non que je trouve son travail lamentable mais souvent assez étouffant et peu subtil, mais ce que je regrette surtout est que sa boite produise aux kilomètres des musiques interchangeables d'un compositeur à l'autre, ce qui a pas mal standardisé la musique de films, surtout au niveau des blockbusters. La piste Duck Shoot utilisée là en est un bon exemple, elle est extrêmement formatée et pourrait être signée de Zimmer, Gregson-Williams ou n'importe sans que l'on perçoive une différence. Néanmoins, elle est aussi indéniablement efficace et contribue à la réussite de la scène au même titre que la photographie, le montage, les décors, et le petit dialogue qui a précédé.

Ce premier épisode pose en tout cas parfaitement les personnages et les intrigues à venir, que ce soit au niveau du gouvernement ou de la famille royale, bien que pour l'instant le personnage d'Elizabeth soit finalement le plus difficile à cerner. On en ressort davantage marqué par Churchill ou George VI, ce qui n'est pas plus mal dans le cas du second autant en profiter tant qu'il est là, il n'en a plus pour longtemps.

J'inaugure aussi le Point Corgi: un seul dans l'épisode, et encore, au travers d'un vieux film en noir et blanc. Peut mieux faire.

Voilà pour ce premier recap, j'ignore si les suivants seront aussi longs, je suis moins passionnées par les amours de Margaret donc je risque d'abréger quand on y sera. J'espère surtout tenir les délais et tout couvrir d'ici début décembre.
potion préparée par Zakath Nath, le Mercredi 6 Septembre 2017, 22:44bouillonnant dans le chaudron "Séries tv".