Ethan Burke a dévoilé la vérité aux habitants de Wayward Pines. Furieux de voir sa création lui échapper, David Pilcher préfère la détruire. Alors que la population est sur le point d'être massacrée, Ethan va se battre pour la sauver mais ses efforts ne sont-ils pas vains?

Un tome pour découvrir la vraie nature de Wayward Pines, paisible localité de l'Idaho qui cache un terrible secret. Un tome pour se défaire de la tyrannie de David Pilcher, le créateur mégalo de la dernière enclave d'humanité dans un futur dominé par les "abbies". Et un tome pour? Survivre, tout d'abord à l'irruption des créatures dans la ville après que Pilcher ait désactivé l'électricité et ouvert la grille qui entoure Wayward Pines. Les deux tiers du roman consistent donc en une suite de massacres et de fuites, alors que les habitants tentent d'échapper à une mort entre les dents et les griffes d'êtres particulièrement agressifs, et aux efforts d'Ethan et d'alliés qui s'amenuisent pour parvenir à rétablir le courant. Difficile de ne pas penser à Jurassic Park. Pour compliquer encore la situation, Pam revient avec des envies de revanche et Hassler avec l'espoir de profiter d'un foyer qui n'existe plus.

Pas le temps de souffler dans ces passages toujours haletants mais qui n'empêchent pas de se poser quelques questions: Ethan va réussir sa mission et sauver ce qui reste des habitants mais pour combien de temps? Il découvre l'état dramatiquement bas des ressources alimentaires et l'impossibilité de répondre aux besoins de la population à long terme en restant sur place tandis qu'à l'extérieur la mort est quasiment assurée d'office. Même sans cela, on se doutait que le plan élaboré de Pilcher ne pouvait qu'aller dans le mur: la population allait s'accroître dans un périmètre difficile à élargir à l'infini, les abbies étaient l'espèce dominante avec une capacité d'évolution à trop long terme pour que la cohabitation soit possible mais surtout, le point de départ ignorait délibérément un élément que tous ceux qui sont au courant, Pilcher comme Ethan, continuent d'occulter soigneusement. En effet, Pilcher a prévu la fin de l'humanité dès la fin du XXe siècle en l'espace de quelques générations, non pas à cause de catastrophes naturelles ou de guerres nucléaires mais parce qu'il y a quelque chose dans le génome de l'espèce qui la condamne à relativement court terme. Sélectionner des humains de la fin du XXe siècle et du début du XXIe siècle pour les réveiller dans un futur dont l'humanité est absente pour la faire renaître est donc absurde puisque ce qui est censé clocher dans le génome est logiquement toujours présent.

Néanmoins, même s'il est gênant que le héros par exemple ne soulève jamais ce point délicat ou qu'au moins on ne le montre pas essayer de ne pas y penser, ce qui ressort de cette trilogie est la volonté des Humains de s'en sortir coûte que coûte même s'il ne reste quasiment aucun espoir. Il n'est donc pas absurde de supposer que ni Pilcher ni Burke ne veuillent regarder cette réalité en face et s'accrochent à d'autres solutions même si aucune n'est viable à long terme. La troisième voie qu'imagine Burke pour préserver la population prise entre le marteau et l'enclume est donc logique, on plonge dans l'inconnu en espérant qu'il offre des opportunités mais rien ne garantit un avenir meilleur, juste l'assurance que l'humanité perdurera au-delà d'une poignée d'années bien que ce soit toujours reculer pour mieux sauter.

Blake Crouch a plongé ses personnages dans une situation bien trop désespérée pour leur offrir une fin heureuse et n'est pas assez nihiliste pour les exterminer purement et simplement. La fin de leur dilemme ne peut qu'être ouverte et est à ce titre satisfaisante et l'auteur a su tenir en haleine sans faiblir pendant trois tomes pour y parvenir.