Dans le nord-est de la Thaïlande, une équipe de documentaristes suit Nim, une chamane prétendant être possédée par la bienveillante déesse Bayan dont les pouvoirs se transmettent à travers les femmes de sa famille. Quand Mink, la nièce de Nim, commence à faire preuve d'un comportement étrange, on suppose d'abord qu'elle est la prochaine incarnation de la déesse. Bientôt, Nim soupçonne que la jeune femme est possédée par un esprit bien plus néfaste.

Sortie directement en dvd chez nous, cette co-production thaïlandaise et sud-coréenne réalisée par Banjong Pisanthanakun aurait mérité un parcours moins confidentiel. Il s'agit d'une énième variation sur le thème de la possession, sous forme de found-footage, procédé casse-gueule par excellence. Néanmoins le cadre permet un certain renouvèlement tandis que la forme se révèle bien plus soignée que de coutume. On s'attache tout d'abord à suivre Nim, chamane avec plusieurs décennies d'expérience au compteur qui a accepté son rôle après le désistement de sa sœur aînée Noi convertie au christianisme. La fille de celle-ci, Mink, multiplie les réactions étranges comme de l'agressivité ou une puérilité occasionnelle qui poussent les documentaristes interviewant Nim à s'intéresser davantage à elle, espérant capter le passage de la déesse Bayan d'un corps à l'autre.

Située dans une petite ville au nord de la Thaïlande, le film dépeint une communauté partagée entre des croyances ancestrales et les aspirations d'une société plus moderne. Nim a l'air honnête dans ses pratiques et de connaître les limites de ses capacités tandis que certains temples comme celui où exerce son ami Santi ont davantage l'air d'attirer les gogos, que Noi pratique le christianisme et que Mink est une jeune femme moderne davantage intéressée par faire la fête avec ses amies que par une quelconque spiritualité. Le glissement entre documentaire captant des moments insolites et inquiétants et le pur film d'épouvante se fait doucement. Les relations entre les différents membres de la famille sont introduits naturellement, de manière informative, l'aspect documentaire aidant les personnages à se confier, du moins en partie, et les rancœurs vont expliquer dans une certaine mesure l'origine du malheur qui va frapper la famille de Nim.

La première moitié du film, léchée et aussi posée que des caméra portées le permettent, laisse ensuite place à des scènes plus classiques de found-footage tandis que le rituel censé libérer Mink de son tourment approche: caméras posées pour filmer les mouvements de Mink pendant la nuit, secouées dans tous les sens et abandonnées ou éteintes au dernier moment, au-delà du raisonnable, car aussi habile le film soit-il il ne fait pas l'impasse sur certains poncifs. L'inquiétude sourde qui s'était installée laisse place à une véritable débauche de violence alors qu'une malédiction familiale de la branche paternelle, un manque de piété de la part de Noi et le caractère intrusif des documentaristes vont tous contribuer à leur manière à une conclusion dantesque et sans concessions.

La distribution est très réussie, le fait de ne pas du tout connaître les membres du casting est évidemment un avantage pour l'immersion dans ce type d'histoire. Sawanee Utoomma est vite attachante en chamane qui se démène pour sauver sa nièce alors que le passif de sa famille et ses doutes remontent peu à peu. Narilya Gulmongkolpech est également solide dans le rôle de la victime de l'esprit maléfique tandis que Sirani Yankittikan hérite du rôle ingrat au premier abord mais assez complexe finalement de cette mère de famille qui a refusé l'appel de la déesse pour devoir s'en remettre à elle ainsi qu'à toutes les solutions possibles pour le bien de sa fille. Elle est surtout agaçante au début mais sa détresse finit par émouvoir.

En s'aventurant dans la campagne thaïlandaise et en se penchant sur la culture de l'Isan, The Medium donne un coup de frais au film de possession et utilise intelligemment son concept de faux documentaire, malgré certaines limites inévitables.