Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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La Piste de Santa Fe
Jeb Stuart et son ami George Custer, fraichement émoulus de West Point, sont envoyés dans le Kansas qui n'est encore qu'un territoire. Territoire sur lequel sévit John Brown, fervent abolitionniste qui ne recule devant rien pour faire avancer sa cause. Stuart reçoit bientôt l'ordre de mettre fin à ses activités.

Dans les listes de classiques du western incontournables, il existe deux titres que je croise régulièrement mais qui ont longtemps suscité une certaine appréhension, La Charge fantastique de Raoul Walsh et La Piste de Santa Fe de Michael Curtiz. Le fait qu'on trouve dans les deux films le couple cinématographique mythique formé par Errol Flynn et Olivia de Havilland n'est qu'une coïncidence et ils n'ont rien à voir avec mes réserves. Pas plus que les réalisateurs dont les compétences ne sont plus à prouver. Mon appréhension tient principalement au fait que le premier western traite de George Custer, pas la figure de l'Ouest qui suscite le plus de sympathie, dans un portrait que je crains d'être trop hagiographique. Quant au second, le héros, futur officier confédéré flanqué de son pote Custer (encore lui, sous les traits de Ronald Reagan, on cumule les bons points), doit mettre en déroute l'authentique abolitionniste illuminé John Brown. Rien de tel cependant que se faire son propre avis et découvrir peut-être un scénario plus nuancé que le synopsis ne le laisse supposer, histoire de revoir ses préjugés.

Les vingt premières minutes laissent pourtant craindre le pire: Jeb et ses joyeux compagnons sont adoubés par les bienveillants Robert E. Lee et Jefferson Davis tandis que le camarade de promotion Rader qui lit les pamphlets abolitionnistes de John Brown et fustige l'arrogance du Sud est parfaitement antipathique. Si l'Histoire est écrite pas les vainqueurs, ce film nous vient d'une uchronie, peut-on se dire alors. Comme par ailleurs sur la forme il n'y a rien à redire mais pas de quoi se pâmer non plus, le temps promet d'être long. Heureusement, en progressant un peu dans le métrage, on arrive à injecter un peu d'ambivalence. Le personnage de Kit Carson joué par Olivia de Havilland exprime enfin ce qui manquait jusque-là, que la cause de John Brown est noble et juste mais que ce sont ses méthodes qui sont répréhensibles. De plus, la guerre que la jeune femme sent arriver et qui est prophétisée par une voyante au héros et à ses camarades hilares qui ne s'imaginent pas s'affronter un jour offre un contrepoids sinistre mais salvateur à la neutralité agaçante de Stuart qui avance que le Sud va abolir l'esclavage de lui-même sans qu'on lui force la main, un peu de patience les enfants, en attendant on obéit aux ordres. Et si l'on excepte le double mariage final, la conclusion revient finalement à John Brown, qui a peut-être perdu son propre combat mais a mis en branle un mouvement qui ne va pas s'arrêter.

Cela reste léger et un peu tardif. On se retrouve donc devant un film où on ne peut s'empêcher de prendre parti pour les antagonistes aux dépends des héros. Non parce qu'ils sont plus charismatiques ou aimables mais parce qu'on est bien trop conscient que ce sont eux qui ont raison dans le fond, si ce n'est dans les actes. Pourtant le scénario s'efforce de les rendre antipathiques, en décidant par exemple que Rader ne serait mu que par sa cupidité même si ça ne colle pas trop avec sa conduite à West Point et que du coup sa sortie est ratée (suffisamment courageux pour retourner auprès de Brown donner le change avant de se faire minablement trucider, là où il aurait été plus intéressant d'avoir un personnage sincèrement gagné à la cause mais trahissant par désillusion face à l'extrémisme de Brown. Peut-être justement ne fallait-il pas faire trop d'ombre au personnage principal).

Dans le rôle principal justement, Errol Flynn est fringant mais il n'y a guère que dans les scènes de drague en binôme qu'il montre un peu de l'animation et de l'esprit qui ont fait sa gloire, car il est nettement moins bondissant ici que dans ses films de cape et d'épée. Van Heflin hérite lui du rôle le plus ingrat de Rader tandis que Reagan fait le taf en meilleur ami et rival sentimental loyal. On croise aussi les seconds couteaux habituels comme Alan Hale et Ward Bond mais les deux qui se détachent du lot sont Raymond Massey en John Brown halluciné et Olivia de Havilland qui aurait pu se cantonner à jouer la dulcinée du héros mais bénéficie de bonnes répliques et du fait d'hériter du personnage qui finalement se montre le plus lucide sur la situation présente et à venir. Quant à la réalisation de Curtiz, il est à son affaire avec quelques bonnes fusillades et chevauchées.

Malgré quelques répliques qui sauvent le film d'être trop entièrement et franchement pro-sudiste, La Piste de Santa Fe aborde son sujet de manière trop casse-gueule et maladroite pour être agréable à regarder de nos jours, en dépit du spectacle assuré par ailleurs par tout le monde devant et derrière la caméra.
potion préparée par Zakath Nath, le Mardi 8 Août 2023, 23:07bouillonnant dans le chaudron "Films".