Lorsqu'il perd sa première dent de lait, Sam la place sous son oreiller en espérant recevoir la visite de la Fée des Dents. Il ne s'attend pas à la prendre sur le fait et la créature se trouve liée à lui et se révèle bien plus inquiétante que les légendes à son sujet ne le suggéraient.

Si vous avez lu La Fée des dents de Graham Joyce paru il y a quelques années chez Bragelonne, il s'agit de ce roman. Pour une raison étrange, à l'époque de sa publication chez Pocket Terreur, on avait opté pour un autre titre qui contrairement au suivant n'était pas une traduction littérale de l’original Certes, il y a un objet appelé l'intercepteur de cauchemars qui revient sur le tapis au long du récit mais le cœur de ce dernier est la relation malsaine qui s'établit entre le jeune Sam et une fée des dents qui n'a rien de mignon. Celle-ci obéit à des règles que l'on ne comprend pas et bien que furieuse d'avoir été découverte par Sam, ne cesse ensuite de lui rendre visite, de l'influencer, d'évoluer à mesure qu'il grandit. Parfois protectrice, parfois ennemie mais toujours dangereuse pour l'entourage de Sam.

On côtoie ce dernier alors qu'il grandit dans un village de la campagne anglaise dans les années 60: il y a Clive, son copain surdoué, Terry, le sportif malchanceux, Linda, la jolie cousine de celui-ci ou encore Alice qui fascine les garçons et dont la fée des dents affirme à Sam qu'elle ne lui apportera que des ennuis. Les gamins font de grosses bêtises, vivent les expériences propres à la jeunesse et certaines épreuves anticipées et toujours la présence de Quenotte plane sur le groupe, seul Sam en étant conscient. Au point de se demander si la fée n'est pas sa propre invention (tout ce qui arrive pourrait arriver sans elle) mais plusieurs éléments confirment qu'il ne s'agit pas de l'ami imaginaire qui s'attarde plus que de raison ou d'hallucinations. Le roman est parfois dérangeant, notamment lors du bref passage chez les scouts ou à travers le personnage de Quenotte mais on s'attache à la petite bande qui n'en loupe pourtant pas une, que ce soit l'insupportable Clive ou la provocante Alice et leurs parcours s'avère finalement touchant.

Les romans de Graham Joyce que j'ai lus précédemment m'ont toujours laissé un sentiment de frustration car jamais mauvais mais n'allant pas toujours dans la direction qui me paraissait la plus intéressante. L'Intercepteur de Cauchemars/La Fée des dents est de loin le plus abouti, parfois effrayant mais surtout le plus émouvant.