Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Jeux dangereux - To Be or not to Be
À la veille de la Seconde Guerre Mondiale, à Varsovie, le célèbre acteur Joseph Tura est perturbé de voir un jeune pilote quitter systématiquent la salle lorsqu'il interprète son soliloque d'Hamlet. Il ignore que l'aviateur, Sobinski, va rejoindre sa femme, Maria Tura, dans sa loge. Lorsque la Pologne est envahie par les nazis, Sobinski, qui participe à la bataille d'Angleterre, découvre qu'un espion se rend à Varsovie pour remettre des documents à la Gestapo. Il est dépêché sur place pour l'intercepter. Les Tura et leur troupe vont mettre à profit leurs talents pour l'aider dans sa mission.

To be or not to Be fait partie de ces films que j'ai découvert enfant chez ma grand-mère avide de me faire découvrir des classiques et dont il ne me restait que quelques souvenirs, des images, de simples répliques et l'intrigue générale. Je devais avoir aimé mais sans plus car contrairement à d'autres films vus à la même période et dans les mêmes conditions, je n'avais jamais demandé à ce que ma grand-mère me repasse la VHS lors d'une visite suivante. Sans doute étais-je trop jeune pour comprendre au-delà de l'histoire et des gags les plus simples. La ressortie en salle d'une des comédies les plus connues d'Ernst Lubitsch était donc l'occasion d'une piqûre de rappel salvatrice.

On ne peut ignorer la date de sortie du film, 1942. Charlie Chaplin avait déjà moqué Hitler et le nazisme dans Le Dictateur qui avait eu du mal à se faire, deux ans plus tôt. Les noms de personnes et de lieux avaient été changés bien que les parallèles étaient transparents. Lubitsch franchit un cap en implantant son intrigue explicitement en Pologne et en nommant Hitler, tout en casant des mentions de Goering et Hess. Entretemps, les États-Unis étaient certes entrés en guerre et avaient fait une croix sur le marché allemand mais planter une comédie dans un tel contexte, à une époque où l'on était dans l'incertitude quant à la fin de la guerre, était osé.

Lubitsch mélange ici satire et vaudeville. Satire dans son portrait de nazis ridicules et dépassés comme le colonel Ehrhardt ou même l'espion Siletsky qui se laisse bien vite tourner la tête par Maria Tura. Satire aussi du monde du théâtre et des acteurs: Joseph Tura est égocentrique, cabotin et vaniteux, plus préoccupé de voir un spectateur s'absenter durant sa grande scène que de l'annonce de l'invasion nazie tandis que sa femme cherche à imposer une robe du soir qui la met en valeur pour jouer une scène se déroulant dans un camp de concentration. Il y a plus de sympathie pour les acteurs de seconds plans que sont Bronsky et Greenberg, cantonnés à de petits rôles fonctionnels et qui rêvent d'une occasion de briller, qui leur sera offerte à leurs risques et périls. Côté vaudeville, on a un triangle amoureux qui s'amorce tout en rassurant vite les tenants de la morale: Maria n'envisage pas de tromper le mari qu'elle aime, elle est simplement flattée par les attentions de Sobinski. Ce dernier n'est d'ailleurs pas tant amoureux de Maria que de l'image qu'il s'est faite d'elle à travers des interviews totalement fabriquées, aussi ne le plaint-on pas à l'idée que sa romance ne débouchera sur rien.

L'utilisation de la troupe de théâtre permet dans la deuxième partie d'enchaîner déguisements et quiproquos d'une manière qui peut sembler classique de nos jours mais avec un sens du gag et de la préparation d'une parfaite maîtrise comme lorsque Joseph Tura, se faisant passer pour Ehrhardt, incapable d'improviser davantage, en revient toujours à ressortir la même réplique... pour qu'une fois devant le même Ehrhardt, celui-ci n'ait pas de conversation plus inspirée. Le casting n'est pas en reste pour porter les dialogues savoureux, en particulier Jack Benny dans le rôle de Tura et Carole Lombard, dont c'est le dernier rôle dans celui de Maria tandis qu'un jeune Robert Stack incarne le jeune aviateur et que Felix Bressart apporte une touche de pathos en figurant rêvant de jouer Shylock.

Avec le recul, les mentions de camps de concentration paraissent bien légères comparées à la réalité, tout comme le décalage entre la destruction de Varsovie par les nazis et l'aspect très bouffon de ceux qu'affrontent les héros (on n'est parfois pas loin d'annoncer Papa Schultz) laisse un sentiment étrange. Néanmoins To be or not to Be n'en reste pas moins un délice pétillant servi par des acteurs au sommet de leur forme.
potion préparée par Zakath Nath, le Samedi 29 Avril 2023, 14:16bouillonnant dans le chaudron "Films".