La guerre contre les Marcheurs Blancs est terminée, achevée par une coûteuse victoire à Winterfell. Une autre menace demeure au sud, en la personne de Cersei, mais le Nord, épuisé, peine à se mobiliser.
The Long Night avait offert une bataille homérique, et le fait de n'avoir finalement pas perdu tant de visages familiers constituait une agréable surprise. On devrait le savoir, depuis le temps. Les agréables surprises dans
Game of Thrones sont suivies de cruelles désillusions et cet épisode le démontre implacablement: alors qu'on s'attendait à une respiration avant l'affrontement final avec Cersei, il se révèle un des plus désagréables à regarder, non parce qu'il est mauvais (malgré quelques éléments amenés trop rapidement au vu de leur importance) mais parce qu'il laisse un goût amer dans la bouche: l'humanité est sauvée mais est-ce que cela en valait la peine? On s'ingénie tellement à retirer une par une toutes les petites touches d'espoir qu'on était venu à entrevoir que ça en devient rageant (et ce n'est pas un défaut de susciter des réactions face à tant d'injustice, surtout après huit saisons ou on en avait eu une bonne dose mais à ce stade, c'est douloureux).
Le pire, évidemment, c'est tout ce qui entoure Daenerys. Ce n'est pas un personnage que je porte particulièrement dans mon cœur, et on a suffisamment montré quels pouvaient être ses défauts en tant que dirigeante pour que sa chute potentielle ne vienne pas de nulle part, mais à trop concentrer les coups durs, son sort devient tellement tragique qu'on finit par concevoir de l'antipathie pour les personnages qui lui tournent le dos, ou s'apprêtent à le faire, alors que ce n'était pas forcément le but. Privée d'une bonne partie de son armée sacrifiée pour sauver le monde, on ne peut pas dire qu'elle en gagne beaucoup de reconnaissance. Dès qu'un nouveau candidat plus malléable apparait, Varys est prêt à la déposer sans qu'elle ait fait pire que la moyenne des monarques (les intentions de Varys sont louables mais il ne peut pas miser sur un nouveau cheval chaque fois qu'un candidat le déçoit: s'il n'a pas compris, à ce niveau, que ça ne sert à rien de changer de monarque, c'est le système de gouvernement qui doit être changé...), la loyauté de Tyrion est mise à mal, et la perte successive de Rhaegal et Missandei (dont les dernières paroles évitent la niaiserie que l'on pouvait craindre)... Tout cela conspire à pousser Daenerys à commettre le massacre qu'elle voulait éviter la saison précédente, et cela sonnera probablement sa fin, mais on essaie trop de charger la barque de la Targaryen forcément instable trop vite pour ne pas trouver cela dur à encaisser.
Elle n'est pas la seule à trinquer, cela dit. L'ascension sociale de Gendry, loin de le rapprocher d'Arya, ne fait qu'éloigner celle-ci. Le Limier ne peut même pas trouver matière à réjouissance à avoir survécu à la Longue Nuit, et seule la mort de son frère (et la sienne?) semble pouvoir l'apaiser. Sansa, à bonne école avec Cersei (pas la Cersei prête à tout cramer pour rester sur le trône, mais celle des premières saisons qui disait à Joffrey que tous ceux qui n'étaient pas eux étaient ennemis) ne pense désormais qu'aux intérêts des Stark sans considération pour le reste, sans qu'on sache encore comment elle considère Jon maintenant qu'elle connait ses origines: le fait qu'elle ne perde pas de temps à livrer l'information à Tyrion montre qu'elle le veut sur le trône plutôt que Daenerys, mais le fait qu'il laisse Fantôme en arrière quand il s'en va suggère qu'il abandonne derrière lui son côté Stark... Et si Arya a l'air d'être partie pour liquider Cersei, on n'a aucune assurance que c'est sa cible, mais elle ne s'attend pas à revenir. Pour celle qui a battu le Roi de la Nuit, cette réflexion fait un peu peur. Sansa pourrait bien survivre à tout le monde, mais elle sera un peu seule.
Parlons ensuite de Brienne et Jaime, qui ne goûteront pas longtemps au bonheur avant que le jumeau de Cersei reparte une dernière fois vers elle, ou de Bronn, qui n'exécute pas encore son contrat parce qu'il entrevoit un moyen de gagner davantage, mais qui arrive au bout de sa patience face aux nobles de ce monde qu'il n'estime pas meilleurs que lui.
Pendant ce temps, Cersei et Euron profitent toujours de leurs triomphes, même si de ce côté-là on peut souhaiter que ça ne soit pas plus longtemps (même si la perte des méchants n'a pas toujours bénéficié à leurs ennemis). Quant à a flotte ninja d'Euron, elle aurait presque pu passer si l'interprétation de l'acteur n'avait pas été aussi éloigné du personnage du livre: avec l'aura de mystère et de terrifiance (oui c'est un mot) qui entoure ce dernier, voir arriver ses navires sans avertissement n'aurait pas déparé avec le bonhomme. Dans la série télé ses succès sont inversement proportionnels à sa crédibilité.
Loin d'être un petit épisode pour souffler avant une ultime bataille pour virer Cersei et se partager les restes,
The Last of the Starks fait comprendre plus qu'aucun autre avant qu'espérer une fin heureuse est illusoire. Oh, oui, il y a encore de l'espoir pour quelques personnages secondaires comme Sam et Gilly pour peu qu'ils s'établissent loin des tumultes du monde, ou pour Tormund une fois remis de sa déception amoureuse, mais à présent tout semble clair: on va boire le calice jusqu'à la lie, et les quelques survivants, quels qu'ils soient, auront bien trop perdus moralement pour que leur victoire puisse vraiment réjouir.
à 11:15