Le Docteur reçoit des appels de détresse qui amènent le TARDIS sur Ranskoor Av Kolos, où un peuple, les Ux, vouent un culte à une mystérieuse entité.
Déjà le final. Et si l'on se dit déjà, ce n'est pas tant parce que la saison a été raccourcie par rapport aux précédentes, ni parce qu'on s'amusait à un point qui nous a fait oublier que le temps filait vite. Tout simplement, il n'y a pas grand chose au cours de la saison pour introduire un dernier épisode qui se promettait épique et susciter l'impatience. Aussi n'a-t-on pas tout de suite l'impression de se retrouver devant un final. Chris Chibnall avait certes averti qu'il n'y aurait que des épisodes indépendants, sans fil rouge. Ce n'était pas tout à fait exact, puisque les Stanzas étaient mentionnés dans le deuxième épisode, et que
The Battle of Ranskoor Av Kolos, on s'en rend vite compte, va revenir sur des éléments laissés en plan au terme de
The Woman Who Fell To Earth. On ne va pas reprocher à Chibnall d'avoir menti, après tous ses prédécesseurs étaient coutumiers du fait, et c'est bien normal que le showrunner balade les spectateurs plutôt que de tout raconter d'avance.
Malgré cela, il manquait effectivement un vrai fil rouge dans cette saison. Sans parler davantage des Stanzas, peut-être auraient-il fallu en rappeler l'existence en mi-saison plutôt que dans le deuxième épisode. Car cela a contribué à donner l'impression d'une saison qui se déroulait sans se diriger vers un but précis. Le fil rouge n'a même pas besoin d'être particulièrement ébouriffant: après tout, la nature de l'hybride en saison 9, ce n'était pas le summum du suspense et la réponse fort symbolique n'était pas vraiment ce qui faisait l'intérêt de l'histoire. Mais mine de rien, cela fournissait tout de même un semblant de cap qui aura manqué ici.
On retrouve donc Tim Shaw pour clore la saison, un Tim Shaw fort remonté mais hélas guère plus impressionnant que dix épisodes plus tôt. Sur le papier, il y a tout pour un final qui n'aurait pas démérité à l'époque de Russell T. Davies: des planètes menacées, l'heure de vérité pour un compagnon... Mais encore une fois, cela est illustré de façon molle et étriquée, avec un manque d'ampleur déconcertant. Chibnall veut-il rendre hommage à la série classique en situant l'action dans une carrière, en limitant les décors en dur à trois couloirs? Mais la série classique aurait probablement espéré proposer mieux que des révolutions impliquant cinq personnes dans un corridor si elle avait eu le budget pour, et il est difficile de croire que cette saison 11 a moins de moyens que la première chapeauté par Davies qui pourtant mettait en scène pour son bouquet final une galerie de personnages, une flotte dalek... Je n'ai rien contre les épisodes intimistes qui pour certains sont parmi les meilleurs de la série mais là, ça faisait petit bras plutôt que sobre.
Mark Addy, Percelle Ascott et Phyllis Logan sont sous-employés, quant aux personnages principaux, on ne pourra pas reprocher à cet épisode d'être incohérent par rapport à ce qui a précédé: le Docteur est d'un grand pacifisme, d'un certain point de vue: évidemment, elle n'allait pas approuver le meurtre de Tim Shaw par vengeance, mais elle ne tique pas quand Graham et Ryan décident de lui faire goûter à sa propre médecine en le plaçant en stase histoire qu'il réfléchisse à ses crimes, ce qui n'est pas sans rappeler le sort réservé à la Famille de Sang en saison 3... ce qui à ce moment-là mettait surtout en relief l'implacabilité du Seigneur du Temps, pas son refus de la violence. Mais, au moins, Jodie Whittaker semble avoir vraiment trouvé ses marques au cours de la saison, laissant peu à peu disparaître les mimiques à la Tennant. On lui souhaite juste plus d'aspérités et de défauts qui soient volontaires pour lui donner du relief.
Concernant les Compagnons, là encore on est dans le prolongement du reste de la saison: Yaz est là pour éviter que les autres personnages monologuent, on montre qu'elle est intelligente en la faisant atteindre une conclusion en même temps que Thirteen... Et c'est tout. Son seul vrai parcours émotionnel cette saison se sera cantonné à un épisode où elle ne fait finalement rien à part apprendre quelque chose sur un membre de sa famille, et elle se borne à n'être qu'une assistante, sympathique mais sans personnalité affirmée. Ryan est plus posé qu'en début de saison, mais uniquement pour faire contrepoids à Graham, qui est celui qui, enfin, offrira un semblant de conflit avec le Docteur et aura eu un vrai dilemme à affronter. Il est tout de même un peu ironique d'avoir fait autant d'efforts au niveau de la diversité du casting principal pour qu'en fin de compte, le personnage le plus développé se révèle être le vieil homme blanc hétéro.
Il est normal, pour la première saison d'un showrunner, de tâtonner un moment: il a fallu arriver à
Dalek pour que Russell T. Davies trouve un juste équilibre entre drame et comédie sans tomber dans la pure gaudriole, Steven Moffat en saison 5 avait décidé de garder la construction des saisons précédentes pour ne pas trop dépayser le spectateur tout en essayant d'être plus feuilletonnant au niveau du fil rouge et cela ne se mariait pas harmonieusement, mais en contrepartie, on proposait davantage de nouveautés, on prenait davantage de risques. Là, on a la fâcheuse impression que d'un côté Chris Chibnall ne brille pas par son inventivité, mais qu'en plus à ne pas vouloir prendre le spectateur à rebrousse-poil (avoir une actrice dans le rôle principal étant visiblement le pinacle de l'audace, ou peut-être a-t-il été impressionné par le tombereau d'insultes que se prenaient systématiquement Davies et Moffat et craignait-il d'être trop radical), on se retrouve avec une saison tellement fade qu'on a presque le sentiment de n'avoir pas assisté à grand chose. Avec des personnages aussi lisses et des histoires aussi sages et mollement racontées (malgré une amélioration progressive dans la deuxième partie), il n'y a rien à fondamentalement détester, mais il n'y a pas grand chose à aimer non plus. Les précédentes saisons divisaient, pouvaient provoquer des réactions totalement excessives, mais au moins on y effectuait des choix susceptibles de provoquer un minimum de passion.
Espérons au moins que pour la saison suivante (c'est désormais officiel, le showrunner et l'actrice principale rempilent), à défaut de proposer des histoires brillantes, on prenne un peu plus de risques avec la mythologie de la série. Au moins la bande-annonce du New Year Special (oui, pas de Noël cette année) a l'air d'annoncer un spectacle un peu plus épique... Et des retrouvailles.
à 12:29