À Port-Real, Aegon et sa famille sont sous le choc suite au meurtre de l'héritier du trône mais Otto Hightower entend se servir de l'opportunité pour gagner l'opinion publique à leur cause. À Dragonstone, Rhaenyra est consciente du rôle qu'on lui fait jouer dans la tragédie et reproche à Daemon son initiative.

Le plan final sur le visage de Rhaenyra dans l'épisode The Black Queen qui concluait la première saison laissait deviner une souveraine devenue impitoyable après la mort de son fils, enterrant l'idée de négociations pour devenir la "reine noire" qui ne devait pas son surnom sur la seule base de ses armoiries. A son for a son ne partait pourtant pas dans cette direction, la montrant encore en deuil et son seul ordre vengeur était allègrement détourné par des exécutants peu scrupuleux. On comprend l'idée: le showrunner part du principe que Fire and Blood, écrit plus d'un siècle après les faits, sert une propagande anti-Rhaenyra. Il est vrai que si son auteur n'est pas tendre avec les Verts et Aegon II en particulier, sa peinture de la monarque comme aigrie et enlaidie, devenue avide de vengeance et sanguinaire, peut être lue comme un point de vue acceptif acceptant volontiers les rumeurs les plus misogynes.

Il n'empêche que par moment, on s'impatiente à voir encore Rhaenyra transiger, se montrer mesurée, choquée par les actions que Daemon commet dans son dos même pour servir à sa manière ses intérêts. Bref, si elle pouvait être la Rhaenyra la Cruelle que veulent en faire ses ennemis pour gagner la sympathie du peuple et l'appui des autres maisons, qu'elle se défoule un peu et nous avec! Heureusement, si Ryan Condal ne désire pas, ou n'ose pas encore la noircir trop, il a l'intelligence de ne pas montrer le parti adverse comme trop monolithique. Les conséquences du meurtre du jeune prince Jaehaerys montre ainsi sa famille réellement endeuillée et gérant la tragédie de diverses manières. Aegon II n'est pas un simple précurseur de Joffrey: sa douleur est palpable et compréhensible, il n'a pas l'intelligence pour gouverner et on le devinait manipulable, il gâche déjà les points politiques marqués par son grand-père Otto mais il est humain dans sa détresse et sa rage.

Dans le rôle d'Otto Hightower, Rhys Ifans a particulièrement l'occasion de briller cette semaine. Son ambitieux personnage prêt à vendre sa fille pour s'assurer une descendance royale n'avait rien de sympathique mais son pragmatisme et ses compétences sont mises à mal par Aegon et ses décisions impulsives. Les scènes où il voit le pouvoir lui échapper et comprend que sa famille va à la catastrophe sans être capable de s'y opposer sont particulièrement savoureuses, presque tragi-comiques. L'épisode met également l'accent sur la place du peuple alors que la guerre ouverte n'est plus évitable: des serviteurs sommairement exécutés dont les familles découvrent les cadavres à la prostituée confidente d'Aemond, on rappelle opportunément que la populace n'est pas qu'une foule anonyme tenant les rôles de figurants dans les aventures des personnages bien nés: ils forment le plus gros des victimes en cas de conflits et ignorer leurs sentiments pourraient être fatal pour les têtes couronnées.

Le grand moment de l'épisode, après le convoi funéraire du petit prince, est l'affrontement fratricide entre Erryk et Arryk, aussi intense qu'attendu et qui mélange les deux approches citées dans Fire and Blood sans les rendre contradictoires. L'épisode comporte aussi sa part de mise en place, notamment dans les scènes entre Alyn et Addam de Hull (vu leur âge et les interactions avec Corlys, j'imagine qu'on n'essaiera pas de les faire passer pour les fils de Laenor).

Après un épisode d'ouverture en demi-teinte car chargé de replacer les enjeux et curieusement timoré lors de sa scène-choc, Rhaenyra the Cruel ne fait pas sentir sa durée conséquente d'1h08 grâce à une écriture qui laisse la part belle à la psychologie des personnages.