Le White Lotus de Taormine accueille de nouveaux pensionnaires: Cameron et Ethan, anciens camarades d'université, sont venus chacun avec leur épouse. Trois générations d'hommes de la famille Di Grassio souhaitent renouer avec leurs racines siciliennes. Tanya vient rejoindre son mari, flanquée de son assistance Portia. Lucia, une escort locale, a déjà rendez-vous avec l'un des touristes et entraîne son amie Mia à sa suite. Chacun va vivre une semaine riche de péripéties et de terribles déconvenues. Tous n'en reviendront pas vivants.

Après le bel accueil réservé à White Lotus, il n'était pas surprenant que son créateur, Mike White, remette le couvert. En renouvelant en très grande partie le casting, et totalement le décor. Adieu Maui, bonjour Taormine. Le changement de région n'est pas qu'esthétique mais influe sur le scénario: là où en saison 1 les personnages, touristes comme personnel de l'hôtel, restaient dans le cadre de ce dernier, ici ils ont davantage tendance à s'aventurer hors de ses murs et de la plage privée. Ce qui correspond assez bien à l'expérience que j'ai eu de séjours selon qu'il y avait de nombreux vestiges à visiter dans les environs ou qu'on ne cherchait pas à faire autre chose que buller au bord de l'eau sans être incité à chercher au dehors des activités, l'établissement se chargeant de proposer les services adéquats. De plus, si la question des classes sociales, au cœur de la saison précédente, n'est pas évacuée, on se concentre bien plus sur les relations entre hommes et femmes, sexuelles ou de pur pouvoir.

Le scénariste n'a rien perdu de son acidité alors que les relations se font et se défont, que les personnalités se creusent. Harper, la femme d'Ethan intellectuelle et préoccupée de la marche du monde, méprise le couple superficiel formé par Cameron et Daphné mais cette dernière est plus observatrice qu'elle n'en a l'air tout en étant également plus manipulatrice. Le ressentiment d'Ethan envers Cameron se fait plus perceptible et les quatre se retrouvent plongés dans un maelstrom de jalousie et d'infidélités réelles ou ambiguës. Dominic Di Grassio, en froid avec sa femme et sa fille après une énième tromperie, perçoit son père octogénaire qui drague toute les jeunes femmes qui passent comme un boulet tout en fréquentant lui-même des prostitués tandis que son fils Albie, honteux de leur comportement et désireux de prouver qu'il n'approuve plus cette conduite d'un autre âge va mettre à mal ses nobles résolutions. Rescapée de la première saison, Tanya est toujours aussi paumée et entretient des doutes au sujet de Greg. La rencontre avec Quentin, un élégant homosexuel qui l'invite dans son cercle pourrait égayer son séjour... ou pas. Quant à son assistante Portia, elle traîne également son mal-être sans but fixe.

Tout cela est évidemment d'un glauque certain, surtout si l'on convie aux réjouissances un duo de jeunes siciliennes attirées par l'argent faussement facile que leur promet le sexe tarifé avec de riches clients. Lucia qui n'en est pas à son coup d'essai, Mia qui traîne des pieds avant de se laisser convaincre et guider par l'espoir d'un coup de pouce à sa carrière de chanteuse... Si certaines scènes font sourire comme la résolution de l'intrigue de Giuseppe ou la visite des Di Grassio à leurs cousines perdues de vue, que Tanya reste une création tragi-comique de haute volée, personne ne sort indemne d'un séjour au White Lotus: les plus corrompus n'y apprennent rien, les innocents ne le restent pas quand ils l'étaient vraiment. On sait d'avance, encore une fois, qu'il y aura des morts et le suspense reste présent, délayé parfois au milieu des très nombreuses scènes de sexe mais plus on avance, plus on emprunte la route du thriller laissée de côté en saison 1.

Le casting est une nouvelle fois pour beaucoup dans la réussite de la saison et l'envie de suivre des personnages aux nombreux aspects antipathiques: Theo James, Aubrey Plaza, Will Sharpe et Meghann Fahy forment un quatuor marquant dans leurs chassés-croisés malsains emplis de désir de revanche plus que de désir tout court qu'ils ne s'avouent pas. F. Murray Abraham, Michael Imperioli et Adam DiMarco sont tout aussi saisissants pour offrir trois générations d'hommes illustrant une forme de machisme différente et réprobatrice des autres mais qui se confondent et se valent. Jennifer Coolidge continue de voler la vedette en femme aussi riche que perdue dans ses problèmes personnels mais elle est cette fois bien accompagnée par Tom Hollander en dandy cultivé trop aimable pour être honnête.

Tout en creusant son sillon à base de gens riches se conduisant mal dans un cadre luxueux et séduisant, cette deuxième saison change de thématique et évite ainsi la simple redite avec de nouvelles têtes. Si l'on se lasse parfois des nombreuses scènes de sexe et des hormones en ébullitions de tout ce beau monde, le portrait de ce microcosme est d'une férocité encore plus débridée.