Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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L'Étrange Incident
Deux cowboys, Gil et Art, font halte dans une petite ville perturbée par des vols de bétail. Quand un éleveur, Kincaid, est assassiné, l'adjoint du shérif et quelques habitants forment une milice pour trouver les meurtriers. Trois hommes en possession des bêtes de Kincaid sont arrêtés. Ils plaident leur innocence et une poignée d'hommes, dont Gil, sont d'avis d'enquêter mais le reste du groupe insiste pour une pendaison expéditive.

L'Étrange Incident, réalisé par William A. Wellman et sorti en 1943, est l'adaptation d'un roman de Walter Van Tilburg Clark publié trois ans auparavant. Le sujet, le lynchage de trois individus suspectés de meurtres, n'a rien de réjouissant et n'avait guère de quoi remonter le moral d'un public alors en pleine Seconde Guerre Mondiale, comme le rappelle un panneau post-générique encourageant les spectateurs à acheter des obligations de guerre une fois sortis de la salle. Cela n'a pourtant pas empêché ce western d'être nommé pour l'Oscar du Meilleur Film qui revint cette édition-là à Casablanca. Il faut dire que ce ne sont pas les qualités qui lui manquent.

Le scénario de Lamar Trotti divise l'intrigue en trois actes: l'inaugural en ville où Gil et Art venus chercher la femme qu'aime le premier pour la découvrir absente comprennent rapidement dans quelle ambiance explosive ils ont débarqué et voient une milice se former, un deuxième où celle-ci part en chasse et enfin le dénouement où chacun prend une décision quant au sort des prisonniers et doit peser ensuite les conséquences de ses actes. On voit admirablement se dessiner les caractères, les figures importantes de la ville qui, alors que le shérif n'est pas là, se montrent prompts à vouloir rendre justice avant son retour, ceux avides de violence comme le poivrot local aussi assoiffé de sang que d'alcool, ou un major sudiste nanti mais louche qui entraîne son fils à sa suite. Face à eux, quelques voix raisonnables comme celles de Davies mais on évite un trop grand manichéisme: Gil vote contre le lynchage mais ne fait rien pour l'empêcher quand la majorité l'emporte, son ami Art le suit dans sa décision mais on sent que sans lui, il aurait pu suivre le groupe adverse, un des accusés est prompt à balancer son collègue mexicain en pensant s'en sortir ainsi, et Gil et Art se sont joints au groupe non pour faire appliquer la loi ou empêcher un massacre mais pour ne pas attirer les soupçons sur eux-mêmes.

Le film pourrait souffrir du principal défaut qui accompagne les œuvres à thèse qui abordent des sujets importants et peuvent les amener avec de gros sabots et se montrer trop moralisatrices. Heureusement, on évite ce problème. Tout d'abord, le script va droit au but (si l'on excepte un petit aparté quand le groupe croise la dame des pensées de Gil qui vient de se marier) et en 1h15, n'a pas le temps de s'appesantir plus que de raison. Ensuite, William A. Wellman derrière la caméra se montre toujours inventif dans la composition de ses plans, notamment avec des personnage au visage souvent en partie masqué ou lors de la scène de la pendaison où la caméra reste sur les bourreaux et laisse deviner le sort des victimes, un jeu avec le hors-champ que l'on retrouvera aussi dans La Ville abandonnée dans son duel dont on ne découvrait que le résultat après avoir entendu les détonations.

Pas de héros dans ce western finalement, même Henry Fonda, habitué aux personnages droits, vote certes pour épargner les suspects mais n'est pas immédiatement sympathique et se montre très passif, plus un témoin du drame qu'un acteur pour empêcher ce dernier. Parmi les seconds rôles, on reconnait surtout Anthony Quinn en Mexicain forcément coupable idéal aux côtés de Dana Andrews, tandis que Mary Elizabeth Hughes, dont la carrière n'a jamais vraiment décollé, fait une apparition remarquée au point où l'on voudrait en savoir plus sur son personnage tout en sachant que cela aurait fait dérailler l'intrigue principale.

Sans grande scène spectaculaire, règlements de compte, poursuite, et traitant d'un sujet sinistre, L'Étrange Incident pourrait faire craindre un pensum moral pour le spectateur venu chercher son content de fusillades. Si le message est clair, le film est habile à éviter les lourdeurs possibles et l'impact de son dénouement prévisible n'en est que plus fort.
potion préparée par Zakath Nath, le Mercredi 14 Septembre 2022, 22:50bouillonnant dans le chaudron "Films".