Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Il était une fois en Amérique
Trente ans après avoir été contraint de fuir New York, David "Noodles" Aaronson, un gangster, revient sur les lieux qui l'ont vu grandir. Il se souvient de son enfance de petit délinquant en compagnie de ses amis, en particulier Max, puis de leur ascension dans la pègre durant la Prohibition jusqu'à la trahison qui détruisit leur bande.

En l'espace de cinq ans, entre 1966 et 1968, Sergio Leone aura enchaîné quatre films, dont deux à gros budgets, des films qui auront lancé un genre et marqué l'Histoire du cinéma malgré un accueil critique plus que mitigé à l'époque. Ensuite, les choses se sont un peu compliquées: de productions à laquelle il mettait la main à la pâte au poste de réalisateur bien qu'on ne sache pas dans quelles proportions (la paternité de certaines scènes de Mon Nom est Personne reste sujette à débats) en réalisation qu'il aurait dû se contenter de produire comme Il était une fois... la Révolution, les années 70 ont été moins prolifiques, plus chaotiques. Pendant tout ce temps, Leone portait en lui un projet ambitieux, l'adaptation libre du roman The Hoods de Harry Grey: la vie d'un gangster juif new-yorkais s'étalant sur trois époques, prétexte à une nouvelle grande fresque sur l'Amérique. C'est finalement en 1984 que le film est sorti, dépassant allègrement les 3h, ce qui lui valut des coupes et aux États-Unis, un remontage linéaire sans aucun sens qui lui porta gravement préjudice. J'ai vu le film dans sa version la plus connue de 3h49 bien qu'il existe depuis 2012 une version de 4h11.

Il était une fois en Amérique est un film-somme qu'il a été difficile de concevoir et dont il n'est pas aisé de parler. En fait, alors que le film se déroulait tranquillement devant mes yeux, je me suis régulièrement fait la réflexion que je ne l'aimais pas. Leone est connu pour ses plans longs, pour étirer ses scènes au maximum mais ici, la lenteur avait souvent raison de moi, malgré un début qui plonge pourtant tout de suite au cœur des événements. De film en film, le réalisateur a toujours eu a cœur de dépeindre des amitiés viriles fortes bien que parfois contrariées: la complicité presque immédiate entre Joe et Silvanito dans Pour une Poignée de Dollars, la rivalité faisant place à une association fructueuse entre le Manchot et le Colonel dans ... Et pour quelques dollars de plus, les rapports compliqués entre Blondin et Tuco dans Le Bon, la Brute et le Truand... Il était une fois en Amérique ne déroge pas à la règle avec cette bande de copains d'enfance qui va exploser suite à la trahison de l'un de ses membres et l'on peut donc saluer la constance de Leone dans l'exploration de ce thème. Cela n'est pas sans se faire aux dépends des personnages féminins, ce qui n'était pas gênant dans La Trilogie du Dollar où on ne cherchait pas à les introduire au chausse-pied mais il n'y a guère que dans Il était une fois dans l'Ouest qu'une femme remarquable émerge sous les traits de Claudia Cardinale. Ici, on a le choix entre des prostituées ravies de l'être et Déborah, amour d'enfance de Noodles qui souffle le chaud et le froid et qu'il finira par violer, une scène forcément dérangeante ce qui ce conçoit compte tenu de la nature du personnage principal mais qui serait mieux passée à mes yeux si Leone ne l'avait pas défendue si maladroitement dans ses entretiens avec Noël Simsolo.

Pourtant, j'ai fini par être happée par le film qui laisse une fois terminé des émotions persistantes. Comme Noodles est hanté par son passé, les images restent en tête: la scène magistrale qui met fin à la séquence de flashback sur l'enfance du personnage principal, et à son enfance elle-même avec l'exécution de son plus jeune camarade; la dernière partie, quand Noodles retrouve une dernière fois Deborah et comprend exactement ce qui s'est joué des années plus tôt. À ce titre, on pourra reprocher au scénario de se montrer très prévisible (dès qu'on voit le cadavre défiguré dans les premières minutes) et peu crédible (comment ignorer à quoi ressemble Bailey quand on parle de lui au journal télévisé?) mais la vraisemblance importe peu. La toute dernière scène qui nous ramène à la fumerie d'opium et s'achève sur le sourire de Noodles remet en cause tout ce que l'on a vu: cela se passe-t-il vraiment ou Noodles n'a-t-il en fait jamais quitté New York? Ce genre de procédé peut paraître surexploité de nos jours mais il y a près de 40 ans, c'était nettement plus audacieux.

Carlo Simi à la direction artistique, vieux complice de Leone, fait des merveilles pour reconstituer un vieux quartier populaire de New York à trois époques différentes. Le casting est impeccable, que ce soit les jeunes acteurs (dont Jennifer Connelly, et le gamin qui joue Patsy a des yeux incroyables) ou les plus âgés, notamment Robert De Niro et James Woods dans les rôles de Noodles et Max. La musique de Morricone se fait attendre (le générique de début est d'une grande sobriété, à des lieux de celui du Bon, La Brute et le Truand aussi bien graphiquement que musicalement) mais le thème principal est entêtant.

Comme beaucoup de grands projets longtemps portés, longtemps repoussés, Il était une fois en Amérique souffre parfois de vouloir dire beaucoup au risque de s'éparpiller, notamment à travers tout ce qui touche au syndicaliste joué par Treat Williams, et malgré sa longueur, d'avoir tout de même subi des coupes. Malgré ses imperfections et des maladresses qui n'en font pas un film "aimable", on tient là un long-métrage fascinant.
potion préparée par Zakath Nath, le Dimanche 15 Mai 2022, 20:57bouillonnant dans le chaudron "Films".