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Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Robinson & Raft
--> A Play in Two Acts
Edward G. Robinson et George Raft, deux des "durs" du cinéma hollywoodien de l'âge d'or. Au début des années 50, leur carrière périclite: Robinson a été soupçonné de sympathie communiste en pleine Chasse aux Sorcières, les liens affichés de Raft avec des membres de la pègre comme Benny "Bugsy" Siegel l'ont rendu indésirable. Un producteur, Samuel Bischoff, leur propose de retrouver la tête d'affiche dans un film de gangsters mais cette opportunité se heurte à un léger problème: Robinson et Raft ont déjà tourné ensemble quelques années plus tôt et la cohabitation avait tourné à la bagarre. Alors que les deux acteurs se remémorent leur passé, Bischoff tente de trouver un terrain d'entente en ménageant leur égo.

Michael B. Druxman est un scénariste et auteur de plusieurs livres sur le cinéma qui a également écrit The Hollywood Legends une série de petites pièces en deux actes, au nombre de personnages très limités, simples à mettre en scène, dont le principe est d'évoquer les vies d'acteurs et d'actrices qui ont d'une manière ou d'une autre marqué l'histoire de Hollywood. Edward G. Robinson et George Raft, tous deux devenus célèbres au début des années 30 dans des rôles de gangsters se confrontent ici alors qu'ils traversent une mauvaise passe. S'ils sont associés par les rôles qui les ont catégorisés, ils n'ont par ailleurs rien en commun: Robinson, émigré roumain, est un homme cultivé, collectionneur d'art, marié et père de famille, passionné par son métier d'acteur mais dont la brève association avec un groupe communiste l'a mis dans le collimateur du Comité contre les Activités anti-américaines. Raft vient tout droit de Hell's Kitchen où il a fréquenté des gangsters notoires, s'est sorti de la misère grâce à ses talents de danseur mais n'a jamais su gérer sa carrière d'acteur, a un registre qui se limite à jouer George Raft et encore n'ose-t-il même pas se regarder le faire, reste loyal envers ses fréquentations de jeunesse malgré les ennuis qu'elles lui apportent, a le coup de poing facile, une réputation de grand séducteur mais sa conversation se limite généralement à la boxe, au baseball et aux courses de chevaux.

Plutôt que de réunir les deux personnages autour du tournage mouvementé de L'Entraineuse fatale, qui a débouché sur une fameuse bagarre immortalisée par un photographe de Life

(L'air furibard de Robinson n'en donne pas l'impression mais c'est Raft qui a commencé)

... plutôt donc, que de se concentrer là-dessus, Druxman choisit de situer sa pièce quelques années plus tard, quand les deux acteurs sont au creux de la vague, ce qui leur permet de faire le point sur leur vie respective. C'est parfois drôle, surtout du côté de Raft dont le manque de flair est entré dans la légende du cinéma autant que sa façon de lancer une pièce en l'air dans Scarface, souvent émouvant tandis qu'on apprend à mieux connaître ceux qui ont l'air de se cacher derrière des caprices de diva (on ne peut pas vraiment approuver le choix de fréquentations de Raft mais on peut comprendre pourquoi il ressent plus d'amitié de la part d'affreux gangsters que de membres du gratin hollywoodien. L'existence en apparence paisible de Robinson cache une vie de famille loin d'être rose) et l'auteur s'arrange pour caser pas mal d'informations biographiques sur les deux compères en peu de temps. Samuel Bischoff permet de faire le lien entre les deux et apporte également une bonne touche d'humour mais si l'on a vu le film qu'il tente de monter (A Bullet fot Joey, sorti en France sous le doux titre d'Un pruneau pour Joe) ou si, ce qui est plus probable, on n'en a jamais entendu parler, on peut s'interroger sur la pertinence d'en faire le grand enjeu susceptible de ressusciter les carrières moribondes des deux acteurs.

Heureusement, Druxman ne tente pas de donner à ce film plus d'importance qu'il n'en a dans les filmographies de Raft et Robinson: le deuxième acte remet les pendules à l'heure, il s'agira finalement plus d'un bouche-trou pour respirer financièrement avant de repartir vers de nouvelles aventures: Robinson se voit offrir un rôle dans Les Dix Commandements par un Cecil B. DeMille tellement à droite et anti-communiste qu'on peut prendre cela comme un signe public qu'il est blanchi de tout soupçon de communisme, tandis que Raft, avec la vista qui le caractérise, décide de prendre ses distances avec Hollywood pour tenir un casino à La Havane pour le compte d'un "ami" qui l'a assuré qu'il n'y avait pas à s'inquiéter de cet agitateur de Fidel Castro... Reste tout de même à Bischoff à leur faire signer leur contrat et la pièce se termine par une petite pirouette.

Il n'y a pas là de quoi remplir une grande soirée théâtrale et on peut davantage imaginer cette pièce intégrée au sein d'un spectacle plus large ou réservée à un petit comité. Néanmoins, la pièce est à la fois légère et habile pour évoquer les parcours croisés de deux acteurs au style et à la personnalité bien différents mais souvent associés par le type de rôles qui ont fait leur succès.
potion préparée par Zakath Nath, le Jeudi 12 Août 2021, 12:02bouillonnant dans le chaudron "Littérature".