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Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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La Chevauchée fantastique
Une diligence part de Tonto en Arizona pour joindre Lordsburg, malgré la menace de guerriers apaches dirigés par Geronimo. À bord du véhicule, une troupe hétéroclite composée du cocher, d'une prostituée, d'un médecin alcoolique, d'un négociant en whisky, d'un joueur professionnel, d'une femme d'officier enceinte, d'un banquier malhonnête, d'un repris de justice avide de venger son frère et du shérif qui le traque. Tous vont devoir faire cause commune pour arriver à destination.

La Chevauchée fantastique n'est pas seulement la première grande collaboration entre John Ford et John Wayne, c'est également un des films qui a tellement contribué à définir le genre tel qu'on le connait que même les gens qui ne l'ont pas vu ou ne sont même pas forcément amateurs de westerns en ont intégré indirectement des images ou des archétypes. Prenez les Lucky Luke par exemple: même sans compter La Diligence dont le point de départ est très voisin, pensez à ces joueurs de poker minces et élégants, ces alcoolos sympathiques, la cavalerie qui arrive toujours à temps, ou même le gag du miroir de saloon que l'on enlève quand on sent qu'une bagarre pointe. Tout est là, et bien plus encore: première utilisation par Ford de Monument Valley, décor mythique, la grande rue que l'on remonte pour un duel déséquilibré, John Wayne, jusque-là abonné aux séries B, dans son premier grand rôle de héros, icônisé dès sa première apparition, Winchester à la main (et nous gratifiant deux minutes après d'un regard de poisson mort qui confine au grand art).

Si l'imagerie du film fut reprise, transposée, parodiée, John Ford lui-même était sous influence, puisqu'il s'agit en fait de l'adaptation d'une courte nouvelle d'Ernest Haycox Stage to Lordsburg et qu'on tire aussi inspiration de Boule de Suif de Guy de Maupassant. Si la menace des Apaches plane tout au long de l'histoire pour culminer dans une attaque épique offrant les cascades de Yakima Canutt (et où l'on se rassure du mieux que l'on peut en voyant la plupart des chevaux se relever de leur chute, ce qui n'était pas évident à une époque où on n'hésitait pas à les sacrifier sur l'autel du spectaculaire), La Chevauchée fantastique offre avant tout une belle galerie de personnages dans sa diligence tellement bondée qu'on se croirait presque dans la cabine des Marx Brothers.

Les réprouvés ont le plus grand cœur: Dallas et Doc Boone (savoureux Thomas Mitchell), jetés hors de Tonto par une ligue de vertu respectivement pour prostitution et alcoolisme sont immédiatement attachants et la sympathie affichée de Ringo Kid pour eux le pose bien plus en héros valeureux que ses capacités de tireur. Hatfield (John Carradine, qui a tout à fait la tête de l'emploi) est plus ambigu, puisque son statut de joueur professionnel en rupture avec sa respectable famille devrait le mettre dans le même bateau, mais ses manières de gentleman sudiste et sa façon de s'autoproclamer chevalier servant de l'épouse très convenable d'un officier de cavalerie établit dès le début qu'il ne veut surtout rien à voir à faire avec eux et qu'il se met d'autorité du côté des gens "respectables".

Parmi ces derniers, le seul vrai personnage totalement détestable du groupe, le banquier Gatewood, est le mari d'une des meneuses de la ligue s'en prenant à Dallas et Boone, et il gratifiera ses compagnons de voyage de ses opinions très sûres(parmi lesquelles que le gouvernement devrait moins se mêler des affaires des honnêtes gens comme lui - il a détourné de l'argent de la banque -, que l'Amérique est aux Américains - il ne pense probablement pas aux Apaches qui rôdent quand il dit ça - et que ce qu'il faudrait à la tête du pays, c'est un homme d'affaires - vu l'époque de la sortie du film, c'était certainement une pique envers Hoover mais ça raisonne toujours aussi bien aujourd'hui). Sans parler d'une démonstration de manspreading qui s'il ne s'agissait pas d'une préoccupation à l'époque est tout de même trop flagrante pour qu'elle ne soit pas également un élément de caractérisation quand bien même on n'y pensait pas en ces termes. Le voir confondu est donc particulièrement appréciable.

Il est impossible de réduire un genre à un film, et donc on ne peut pas dire que La Chevauchée fantastique est LE western à lui tout seul, mais c'est un des métrages qui aura le mieux contribué à le définir. De plus, contrairement à d'autres œuvres qui, malgré leur côté innovant à l'époque, ont été tellement imitées que quand on les revoit avec la distance on court le risque de prendre pour des clichés des éléments fondateurs, La Chevauchée fantastique procure toujours autant de plaisir grâce à son récit bien mené et ses personnages parfaitement définis et campés.
potion préparée par Zakath Nath, le Vendredi 1 Novembre 2019, 18:57bouillonnant dans le chaudron "Films".