Daenerys a pris Port-Réal en y semant une terreur et une désolation sans précédent et y voit le début de l'instauration de son monde nouveau. Pas vraiment chaud à cette idée et désormais considéré comme un traitre, Tyrion tente de convaincre Jon de mettre fin à cette folie.
Pour cet ultime épisode, on admirera une dernière fois mes talents de devineresse, puisque j'aurais parié qu'il s'intitulerait
A Dream of Spring. On comprend néanmoins le choix des auteurs, puisque c'est la fin à la fois d'une série qui a tourné autour de qui l'occuperait, et de l'objet lui-même, symbole de la puissance des Targaryen et qui n'a plus lieu d'être. On assiste en effet à la fin de la dynastie, à plus ou moins long terme. J'ai toujours eu du mal avec Daenerys, dès son premier chapitre lu il y a bientôt vingt ans: l'avancée de son histoire était frustrante quand on n'attendait qu'une chose, qu'elle débarque à Westeros avec ses dragons, je n'aimais pas son caractère et malgré tout elle offrait quelques belles scènes comme sa manœuvre à Astapor (le genre de choses qui explique facilement qu'on puisse être séduit par elle comme une part des spectateurs et des personnages de la série l'ont été). S'il y a à redire sur la manière dont les dernières étapes de son parcours ont été dépeintes, elle ne m'aura pourtant jamais émue autant que dans cette saison, où son implication dans la défaite des Marcheurs Blancs n'aura pas suffit à la faire accepter du peuple de Westeros et où tout ce qu'elle a enduré et accompli perd de son sens au fur et à mesure, jusqu'à la pousser à un acte impardonnable. Elle aura été aussi bien iconisée, jusque dans son entrée en scène en début d'épisode. J'aurais souhaité un jeu d'acteurs un peu plus convaincant dans la dernière scène entre elle et Jon, surtout de la part de Kit Harington, mais finalement, elle se révèle efficace même si on soupire devant l'indécision du brave Jon. J'ai particulièrement apprécié le rôle de Drogon là-dedans, et son départ avec le corps de sa "mère" a de quoi alimenter des légendes à Westeros pour les siècles à venir.
Restait à gérer l'après, et c'est un peu une place pour tout le monde et tout le monde à sa place. J'ai trouvé ça très satisfaisant. Oui, satisfaisant pour une série qui aura suscité autant d'attentes, c'est peut-être plat, mais il n'était pas aisé de nouer tous les fils et si le chemin a par moment été chaotique, ça se goupille plutôt pas mal.
J'avais toujours supposé que Bran aurait un destin hors du commun mais j'avoue que je m'attendais à quelque chose de plus mystique, transformation en barral, que sais-je. Le voir décrocher la timbale sans efforts là où tant d'autres s'y sont cassés les dents peut ressembler à une pirouette uniquement là pour surprendre, mais la solution proposée par Tyrion permet de briser le cycle des querelles dynastiques que même la fin de la lignée des Targaryen n'aurait pas suffi à apaiser. On glisse donc vers une monarchie électorale avec une figure de proue autour de laquelle on brode une belle histoire, et la piste de la démocratie, trop bisounours dans le contexte, est au moins évoquée avant d'être balayée. Une remise en cause du système au lieu de repartir sur exactement les mêmes bases avec une autre famille ne m'aurait pas contentée. Tout cela est évidemment très rapidement mis en place, cela rappelle d'ailleurs un peu la fin de
Battlestar Galactica où un changement radical de mode de vie était annoncé en une réplique alors qu'on sait bien que dans la réalité, il y aurait de plus longs débats et des divisions, mais au moins on ne revient pas à la case départ, avec un nouveau modèle de succession qui n'est pas idéal (après Bran, les ambitions de chacun se manifesteront à nouveau, peut-être plus par des tractations et des pots de vin que par des guerres) mais qui évite au moins d'écoper d'un psychopathe comme Joffrey juste sous prétexte qu'il est né le premier. C'est aussi une bonne surprise de croiser le temps d'une scène Edmure (Tobias Menzies avait dit qu'il n'apparaîtrait pas cette saison) et Robin Arryn (Lino Facioli a bien changé).
Ce n'est pas sans plaisir que l'on suit le dénouement du parcours de tous ceux qui restent: Brienne, à la tête de la Garde Royale qui compte aussi Pod dans ses rangs (si le vœu de chasteté tient toujours, il fait bien des malheureuses) qui décide de la manière dont on se souviendra de Jaime, Tyrion à nouveau Main, Davos à la tête de la flotte et cette crapule de Bronn désormais grand argentier, place qu'occupait jadis Littlefinger:
Chaos is a ladder, indeed.
Et enfin, les Stark, la famille qui s'en est pris le plus dans la figure dans les premières saisons et qui malgré les pertes a le plus de représentants encore en vie. On a donc un joli montage parallèle entre Sansa, qui se rêvait reine consort en début de série et finit reine régnante, Arya partant à l'aventure et Jon au Mur, la seule destination qu'il ait jamais choisi lui-même, mais avec des Sauvageons amicaux plutôt qu'hostiles à accompagner au-delà du Mur alors que le printemps revient, en miroir à la scène d'ouverture. Et des retrouvailles avec Ghost en même temps qu'avec son côté Stark. Le tout sur une belle réorchestration du thème des Stark (beaucoup de superbes réinterprétations par Ramin Djawadi, d'ailleurs).
Est-ce que c'était le final parfait dont on pouvait rêver? Non, loin de là, la faute à de grosses maladresses à des moments qui exigeaient plus de subtilité, qui font passer des idées pourtant logiques et annoncées de longue date comme sorties d'un chapeau. Mais ce n'est pas sans émotion que l'on dit adieu à toute cette bande qu'on a vu souffrir pendant huit saisons et qui trouvent ici un accomplissement à leur destinée. Cela n'a pas été sans mal, mais on a tout de même résolu toutes les intrigues qu'il fallait et si la fin n'est pas aussi grandiose qu'on l'espérait pour une œuvre qui avait pris une telle ampleur, mener ce voyage à son terme n'était pas un mince exploit, et le suivre a permis de vivre de sacrés moments de télévision.
à 10:42