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Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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King's Counsellor
--> Abdication and War: The Diaries of Sir Alan Lascelles
Alan "Tommy" Lascelles a travaillé pour quatre monarques, de George V à Elizabeth II, en tant qu'assistant secrétaire privé puis secrétaire privé, pendant des années marquées principalement par l'abdication d'Edward VIII et la Seconde Guerre Mondiale. Son journal permet d'en découvrir un peu plus sur les relations entre la Firme et le gouvernement durant cette période.

La version paperback, contrairement à la version hardback, a bizarrement mis seulement George VI sur la couverture plutôt que lui et Lascelles mais apparemment elle contient du matériel supplémentaire, donc c'est celle que j'ai.

Pour commencer, signalons que le titre est un peu mensonger: il laisse entendre que l'activité de diariste de Lascelles va couvrir la période de l'abdication, or n'ont été publiées que les années 1942 à 1946. Le reste est constitué d'extraits de sa correspondance, notamment lorsqu'il a accompagné le couple royal au Canada et aux États-Unis en 1939, puis lors du voyage en Afrique du Sud en 1947 et des dernières de sa vie. Il sera effectivement question à plusieurs reprises de ses années au service d'Edward VIII mais il ne s'agira pas de réactions à chaud aux événements.

En dépit de cela, ce livre édité par Duff Hart-Davis ne manque pas d'intérêt pour qui veut avoir une idée de ce qu'il se passait dans les coulisses du pouvoir en Grande-Bretagne durant la Seconde Guerre Mondiale, du fonctionnement des relations entre Buckingham Palace et le gouvernement et des informations qui filtraient sur les événements. On alterne entre des décisions liées à la guerre, l'organisation des déplacements des têtes couronnées pour visiter troupes et civils mais également de l'expédition des affaires courantes comme le débat pour savoir si la princesse Elizabeth doit être faite princesse de Galles ou non et plus globalement la vie à la Cour pendant cette période.

Lascelles apparait comme très cultivé (nettement plus que la famille qui l'emploie), efficace, mais, et cela n'est pas très surprenant pour un homme né en 1887 dans un milieu très privilégié, avec des réflexions qui peuvent charitablement être qualifiées comme d'un autre temps (oui, c'est carrément raciste à l'occasion). Au sujet de son milieu d'ailleurs, ce qui ressort est également à quel point il semble refermé sur lui-même: Lascelles est le cousin du mari de la sœur de George VI, sa femme est une cousine de Churchill, tout le monde s'est croisé un jour ou l'autre à l'école, à Oxford ou à l'armée, etc.

En ressort des portraits vivants de personnalités connues, en particulier Churchill, mais même dans un journal intime, on sent la retenue dont fait preuve l'auteur. Il explique dans une lettre quelques années plus tard qu'il avait toujours en tête que ses écrits pouvaient tomber dans de mauvaises mains, qu'il ne pouvait pas être objectif vis-à-vis de son employeur, mais on sent également une discrétion liée à ses fonctions (pour lui journaux et correspondances sont de précieux témoignages mais qu'il n'est pas toujours bons de publier, et en tout cas jamais du vivant des personnes impliquées, il fait part de sa piètre opinion de De Gaulle et du fait qu'elle est partagée par Churchill et Roosevelt mais ne mentionne jamais que le roi et la reine l'appréciaient plutôt) mais peut-être aussi à sa personnalité (il ne s'attarde pas à décrire la réaction de George VI à la mort de son frère en 1942, mais ne détaille pas davantage ses propres sentiments quand il apprend que son fils a été blessé en Normandie).

Il reste donc relativement laconique quand la famille royale est concernée bien que certaines impressions émergent, une grande estime pour la reine Mary, peu pour les frères du roi, et des critiques vis-à-vis de certaines idées de son souverain qui laissent supposer que du coup, les compliments ne sont pas de la simple flagornerie. Il ne se lâche vraiment que quand il est question du Duc de Windsor qu'il avait servi quand il était Prince de Galles avant de rendre son tablier, et il en émerge un portrait peu flatteur bien que Lascelles lui accorde quelques points positifs (apparemment, malgré son immaturité et son égocentrisme, il était doté d'une grande pénétration d'esprit à l'occasion et n'a jamais dit un mot désagréable à Lascelles lui-même, même quand celui-ci lui a expliqué sans détours les raisons de sa démission). Ce qu'il dit ne fait en tout cas que confirmer que, Wallis Simpson ou pas, la conduite d'Edward inquiétait bien avant son accession au trône et que lui-même n'avait jamais sérieusement envisagé d'être roi.

King's Counsellor est donc une lecture intéressante, parfois étonnamment cocasse, bien qu'elle ne soit pas celle par laquelle commencer pour en savoir plus sur cette période (de bonnes grosses biographies des acteurs principaux de l'époque constituent une base plus logique) mais évidemment à prendre avec des pincettes, car si je ne pense pas que Lascelles profère de mensonges, il donne son interprétation des événements et de son propre aveux dans sa correspondance postérieure à la tenue de son journal, n'estimait pas que tout était bon à dire.
potion préparée par Zakath Nath, le Mercredi 23 Août 2017, 17:57bouillonnant dans le chaudron "Littérature".