Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Stand by Me
Gordie Lachance se souvient de l'été 1959: avec ses trois amis, Chris, Teddy et Vern, il est parti à la recherche du cadavre d'un garçon disparu quelques jours plus tôt. Une escapade qui fleurait bon la grande aventure mais qui n'a pas tourné comme prévue.

Quand on évoque les adaptations les plus réussies de l’œuvre de Stephen King, Stand by Me de Rob Reiner est régulièrement citée. Pourtant, on a par ailleurs l'impression que le film reste une présence discrète, loué mais moins susceptible de venir dans les conversations quand il est question du romancier et des adaptations qu'il a inspirées que d'autres. Est-ce parce que Stand by Me n'appartient pas au genre horrifique? Les Évadés de Frank Darabont, tiré de Différentes Saisons, le même recueil qui a livré le récit à l'origine du long-métrage qui nous occupe, The Body, ne contient pas de surnaturel non plus et malgré son échec public à sa sortie, semble depuis bénéficier d'une aura bien supérieure.

Stand by Me montre un quatuor de préadolescents se lancer dans une aventure aussi excitante que macabre: passer deux jours en randonnée à l'insu des parents pour retrouver le cadavre d'un enfant de leur âge. Une manière de confronter les expéditions enfantines façon Club des Cinq à la cruelle réalité et de dévoiler les failles des personnages tout en dépeignant des amitiés qu'on ne vit qu'à cet âge. Très vite, on sent que les quatre garçons ne sont pas logés à la même enseigne bien qu'ils aient pour point commun de ne pas avoir une enfance rose: si Vern n'a qu'à souffrir d'un frère aîné vaguement voyou, Gordie est ignoré par ses parents qui idolâtraient son frère aîné récemment décédé, Teddy a eu une oreille grillée par un père vétéran et souffrant manifestement d'un syndrome post-traumatique qu'il admire malgré tout et Chris doit faire face à l'alcoolisme de son père et la mauvaise réputation de sa famille qui le condamne d'avance à mal tourner. Pourtant, Gordie et Chris se comprennent mieux et sont nettement plus intelligents, capables de s'encourager et se réconforter tandis que Teddy et Vern n'ont pas les capacités pour s'extirper d'une existence médiocre dans un coin perdu (et encore, si l'adaptation est fidèle au texte, elle atténue la dureté de leur sort).

Narré par un Gordie adulte, le périple contient des passages amusants (la découverte du terrifiant chien du ferrailleur), effrayants pour les gamins qui les vivent (une traversée de pont alors qu'un train arrive, des sangsues, le gang de petites frappes locales) mais permet aux personnages de se révéler, renforçant les liens entre Gordie et Chris tandis que le casse-cou irresponsable Teddy se découvre lâche au dernier moment. Remémorée avec le recul, cette aventure d'enfance permet aussi de voir ce que cet âge a de si spécial et les liens qu'on forme à cet époque précieux si éphémères: Vern et Teddy vont s'éloigner des autres de la même manière que les copains d'enfance disparaissent souvent, par manque d'intérêt commun, parce qu'on n'aime pas forcément la route que suivent certains, qu'on s'engage dans une autre et l'on a beau ne pas forcément les regretter, il reste une nostalgie particulière pour l'époque où l'on pouvait délirer ensemble. Stand by Me n'est pas sans lien avec Ça. Plus modeste dans son ampleur en ne décrivant pas toute une ville sous l'emprise d'une créature maléfique millénaire mais les deux histoires traitent aussi bien d'un groupe d'enfants à la fin des années 50 dont la vie familiale n'est pas rose. Gordie, tout comme Bill Denbrough, est d'ailleurs un futur auteur à succès que ses parents négligent, trop bouleversés par la mort de leur autre fils.

Rythmé par des tubes de rock de l'époque, Stand by Me bénéficie des beaux paysages de l'Oregon (l'intrigue se déroule aux alentours de Castle Rock, ville emblématique de King normalement située dans le Maine) mais surtout d'une distribution particulièrement bien dirigée par Reiner qui en tire le meilleur. Wil Wheaton est surtout resté dans les mémoires comme l'un des personnages les plus méprisés de Star Trek que The Big Bang Theory a ravivé temporairement mais il se défend dans le rôle de Gordie, tout comme Jerry O'Connell dans ce qui reste le personnage le moins intéressant du groupe, Vern le faire-valoir comique. Corey Feldman a tendance à un peu trop mouliner des bras mais il est par ailleurs parfait en fort-en-gueule perturbé. C'est néanmoins River Phoenix qui émerge du lot, lumineux et bouleversant dans le rôle de Chris, le faux délinquant et vrai sensible du groupe. On croise aussi un jeune Kiefer Sutherland dans le rôle d'Ace Merrill, antagoniste récurrent à Castle Rock, John Cusack en grand frère disparu et Richard Dreyfuss en narrateur mélancolique.

Stand by Me est l'exemple-même du petit bijou pas vraiment caché mais jamais assez connu, dont la réussite tient en grande partie à avoir su fait revivre la magie unique d'une enfance qui se termine sans qu'on le sache encore, sans en cacher pour autant les épreuves et les blessures.
potion préparée par Zakath Nath, le Lundi 26 Février 2024, 17:36bouillonnant dans le chaudron "Films".