Jyn Erso grandit à l'écart du monde en compagnie de ses parents quand son père, brillant scientifique, est forcé par le directeur Krennic de participer à l'élaboration d'une arme surpuissante pour le compte de l'Empire. Élevée par un rebelle en rupture de ban puis livrée à elle-même, Jyn va néanmoins jouer un rôle crucial au sein de l'Alliance quand, accompagnée d'un groupe hétéroclite, elle va permettre de subtiliser les plans de la fameuse station spatiale.
L'annonce de plusieurs spin-off
Star Wars, dans la foulée de la nouvelle trilogie, était à double tranchant: d'un côté, le risque de lasser en transformant un événement en simple rendez-vous annuel déclinable tant que c'est rentable, de l'autre la possibilité d'explorer un vaste univers sans cahier des charges trop contraignant. Confié à Gareth Edward, ce premier essai (si l'on décide d'ignorer les aventures téléfilmesques des Ewoks dans les années 80) reste en terrain connu: l'histoire narre les exploits de la poignée de rebelles ayant transmis les plans de l'Étoile Noire à Leia, permettant d'exploiter le petit défaut structurel qui va bien. On retrouve donc les vaisseaux, l'esthétique et même certains personnages issus de l'épisode de 1977, et donc, plus encore même que
Le Réveil de la Force, on ne cherche pas à trop dépayser d'entrée le spectateur effarouché par la très contestée prélogie. Mais si de ce point de vue on joue la carte de la prudence, sur le ton, on annonçait un vrai film de guerre, beaucoup plus dur et sombre que ce à quoi l'on était habitué. Et sur ce point, ce n'est que très partiellement ce qu'on a.
Le film a effectivement l'intérêt de nous présenter des rebelles moins lisses que la trilogie d'origine, qui nous mettait la gentille Alliance d'un côté, le méchant Empire de l'autre, et quelques gangsters, contrebandiers et criminels en tout genre au milieu qui selon les personnages, aidaient un parti ou l'autre. Ici l'on découvre une Alliance rebelle parcourue de dissensions, des extrémistes ayant fait sécession, et des personnages qui doivent se salir les mains par pragmatisme. Sur le papier, c'est très bien, à l'écran, le résultat devient vite assez timide une fois posée la note d'intention et notre petit groupe reste finalement très fréquentable.
Côté Empire, on assiste aussi à quelques luttes d'influences qui auraient pu être jouissives mais le sont également moins que prévu, la première parce que Krennic, malgré un Ben Mendelsohn très classe dans sa cape blanche, ne peut rivaliser avec Vador et Tarkin qui prendront commande de l'Étoile Noire dans
Un Nouvel Espoir, la seconde pour une raison que je développerai un peu plus loin quand j'entamerai une partie un peu plus riche en spoiler.
On sait que des reshoots ont été effectués même s'il est pour l'instant difficile de juger de leur impact sur le résultat final. Quoiqu'il en soit, si certains personnages sont sympathiques (le droïde, l'aveugle et son compagnon...) leur introduction, la mise en place du groupe et le lancement de la mission est assez laborieux et il faut attendre le dernier acte pour vraiment décoller. De même, difficile de savoir ce qu'aurait donné le film avec la musique d'Alexandre Desplat, ou si dans un délai normal Michael Giacchino aurait livré autre chose qu'une partition qui par moment fleure bon le pastiche du Williams de 1977, mais le plus souvent échoue à proposer le moindre thème marquant et réorchestre maladroitement les plus emblématique sans raison.
Néanmoins, le film n'est pas dépourvu de qualités. Visuellement, on nous en met plein les yeux avec des plans superbes. La présence d'un personnage culte, si elle ne s'impose pas forcément, fait énormément plaisir, surtout dans sa dernière apparition qui use à merveille du potentiel iconique du bonhomme. Bon, tout le monde doit savoir de qui je parle, le fait qu'il soit dans le film n'est pas un secret, mais puisqu'on en arrive aux personnages connus qui apparaissent dans
Rogue One, j'en viens à deux d'entre eux en particulier, dont la présence m'a dérangée alors que pour l'un d'eux cela aurait dû me réjouir. Attention donc, dans le paragraphe qui suit l'image, je vais parler de petites choses qui pourraient encore être une surprise pour ceux qui n'ont pas encore vu le film.
Tarkin et Leia sont présents dans ce film. Le premier est un de mes méchants préférés de la saga avec Dark Vador. J'aime son aspect glacial et sarcastique, la gueule de Peter Cushing, son manque de scrupules, son assurance, son calme. C'est un méchant parfait. Le voir rivaliser avec Krennic pour hériter du joujou aurait donc dû être parfaitement délectable. Le hic, c'est que Peter Cushing est mort en 1994. Plutôt que d'engager un nouvel acteur ressemblant et bien maquillé mais qu'on n'aurait jamais confondu avec l'original et qui aurait donné sa propre version de Tarkin, ou de recourir à divers trucs comme de le filmer de dos, on a tout simplement recréé son visage numériquement. Il en est de même pour nous montrer trois secondes une jeune Leia. Or, si les progrès dans ce domaine sont notables et que la performance technique n'est pas mince, on n'atteint pas encore la perfection, et donc on se retrouve en pleine vallée dérangeante, ce principe selon lequel plus un robot ressemble à un humain, plus un véritable humain remarquera les détails qui ne vont pas et en sera perturbé. Tarkin illustre ici parfaitement ce problème car malgré le tour de force, j'étais sans arrêt sortie du film en le voyant, remarquant ce qui clochait, pas seulement dans son visage, mais dans sa façon de se tenir, sa taille, à me dire "oui c'est bien fait mais c'est fait parce que le vrai n'est plus disponible depuis longtemps"... Se pose également la question de savoir s'il est bien normal de faire ainsi "jouer" un mort. Certes, c'est un autre acteur qui l'interprète, et on pourra toujours se dire qu'un maquillage numérique n'est qu'une technique différente du maquillage traditionnel qui n'aurait pas aussi bien fait illusion mais n'aurait pas soulevé de questions morales. Mais on peut se demander ce qu'on fera des possibilités de plus en plus vaste que ce Peter Cushing revenu d'entre les morts nous fait entrapercevoir.
Pour conclure,
Rogue One n'est pas un mauvais spectacle, mais est très loin du potentiel qu'il laissait entrevoir, et malgré quelques séquences efficaces, m'a procuré bien moins d'émotions que les épisodes de la saga. Même ceux de la prélogie, malgré des passages affligeants et un revisionnage qui s'est chaque fois fait à leurs dépens, m'auront davantage fait vibrer que ce film-là, tout comme l'Épisode VII malgré les critiques qu'on en a faite sur son aspect recyclage mais qui m'a présenté des personnages que je trouvais attachants et que j'ai envie de retrouver, alors que le destin tragique des héros de
Rogue One n'a pas suscité grand chose chez moi. Ce qui ne me rend pas très optimiste concernant les aventures d'un jeune Han Solo.