En 1822, Lord Cochrane quitte le Chili, guidé par un fol espoir: trouver la preuve que son affrontement avec Cthulhu a vraiment eu lieu, sept ans auparavant, au large des côtes françaises. Il est mis sur la piste d'un trésor que le corsaire Alexander Selkirk aurait ramené des Montagnes Hallucinées et qui pourrait être une relique enterrée sur l'île où il a été abandonné plusieurs années. Son voyage va le confronter à un vieil ennemi devenu pirate.

Résumer le premier tome des aventures lovecraftiennes de Lord Cochrane exposait à se faire réponde "kamoulox": "alors c'est un officier de la Royal Navy, qui a vraiment existé du reste, qui affronte Cthulhu avec l'aide de Champollion. À Fort Boyard." Le mélange entre roman d'aventures historiques et Grands Anciens fonctionnait pourtant et c'est avec plaisir que l'on retrouvait les survivants dans le volume suivant, dernier dans l'ordre chronologique mais non dans celui d'écriture. On nous y laissait entendre que le héros avait exploré les Montagnes Hallucinées, ce qui forcément stimulait l'imagination et l'espoir que l'auteur allait y venir. C'est le cas mais pas tout de suite.

En effet, dans ce troisième roman, Lord Cochrane doit tout d'abord savoir où chercher ces fameuses montagnes à partir d'indices minces. Son enquête le conduit à l'île Robinson Crusoé où Selkirk a passé quatre ans et a inspiré Daniel Defoe pour créer le personnage que nous connaissons. Si l'on attend encore des combats contre des créatures fantastiques, autant prévenir tout de suite: cela n'arrive pas dans ce tome. Les précédents étaient ponctués d'informations historiques et faisaient intervenir des personnalités réelles, ici cela prend beaucoup plus d'importance. On est presque dans un pur roman historique avec quelques promesses surnaturelles pour la suite. Ce n'est pas inintéressant pour autant car cela permet à Gilberto Villarroel de se pencher sur une page de l'Histoire du Chili que l'on connait peu pour ne pas dire pas du tout en France. On a également de l'action, avec un vilain pirate, Corrochano, qui fait des siennes et qui sert de Némésis à Cochrane. Les chapitres courts tiennent en haleine bien que les défauts demeurent: on ne compte plus le nombre de fois où Cochrane est appelé "le marin audacieux", par exemple, et on nous répète des informations, non pas des tomes précédents mais des chapitres précédents. Peut-être pour donner un côté feuilletonnesque au livre mais cela alourdit passablement le texte. Qui laisse entrevoir d'autres aventures vécues par Cochrane qui donnent envie (un vaisseau fantôme, une grande baleine blanche...).

Lord Cochrane et le Trésor de Selkirk souffre d'être un tome de transition, destiné à faire converger les personnages vers les Montagnes Hallucinées sans y parvenir encore et sans véritables menaces de créatures lovecraftiennes dans ses pages. On continue de s'amuser (et de s'instruire un peu en passant, notamment sur les vertus des fromages bleus) en espérant tout de même que la suite délivre ses promesses.