Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Le Démon des Armes
--> It's Noirvember!
Depuis son plus jeune âge, Bart est fasciné par les armes à feu. Excellent tireur, il rejoint dans un numéro de foire Laurie, une jeune femme toute aussi habile au pistolet. Désargentée et rêvant d'une vie pleine d'action, Laurie convainc Bart de se lancer dans une série de braquages.

La découverte d'Association criminelle (The Big Combo) de Joseph H. Lewis avait été il y a quelques années une sacrée claque, un petit bijou de film noir dont le budget de série B était contrebalancé par un scénario audacieux, une photographie superbe et une réalisation au cordeau. Aussi étais-je curieuse de découvrir ce Gun Crazy, sorti en France sous le titre Le Démon des Armes et qui bénéficie d'une réputation encore supérieure (pour ne pas dire "statut culte" tant le terme a été galvaudé mais il s'impose parfois). Wild Side en a sorti une superbe édition blu-ray/dvd/livre illustré il y a quelques temps pour rendre hommage à un film à l'histoire compliquée qui se sera discrètement imposé avec le temps.

Le scénario se base sur une nouvelle de Mackinlay Kantor et a la particularité d'avoir été écrit officiellement par Millard Kaufman qui dévoila bien des années après que la version définitive était en fait l’œuvre de Dalton Trumbo, alors blacklisté et employé anonymement par les frères King. Le couple principal entraîné dans une spirale infernale de plus en plus violente n'est pas sans évoquer le couple formé par Bonnie et Clyde et le sujet de la fascination pour les armes à feu, dans un pays qui encore aujourd'hui souffre régulièrement de ce problème, est ici abordé sous l'angle de l'obsession individuelle plutôt qu'un problème de fond comme cela pourra l'être plus tard. Bart n'est pas montré comme malfaisant, il n'aime pas tirer sur des créatures vivantes mais se sent important pistolet à la main et a un talent qu'il ne demande qu'à utiliser. Il se montre très passif face à Laurie, celle qui l'entraîne dans la criminalité et qui n'a en revanche aucun scrupule à abattre ses semblables. Néanmoins, derrière ses allures sanguinaires, elle avoue être mue par la peur avant tout et les personnages finissent par provoquer plus de pitié que de dégout.

Le film se distingue par son couple maudit qui va sûrement vers sa propre destruction mais également par sa mise en scène. Budget restreint oblige, Lewis et son équipe ont cherché des parades en faisant preuve d'inventivité: les braquages sont montrés par un rapide montage ou de manière elliptique. L'un d'eux par exemple est entièrement évoqué à travers le personnage de Laurie qui attend son compagnon à l'extérieur près de la voiture servant à leur fuite, alors qu'elle cherche à détourner l'attention d'un policier de passage. Autant d'économisé sur un décor, une simple rue suffit. La tentative d'évasion désespérée des protagonistes dans les marais embrumés donne une atmosphère inquiétante et onirique, comme si Bart et Laurie erraient déjà dans les limbes.

Les interprètes ne sont pas non plus pour rien dans la réussite du film. Avec sa grande carrure, John Dall n'est pas sans avoir des faux airs de Lee Marvin mais hérite d'un personnage qui malgré son obsession n'est pas violent et se montre souvent passif et malléable. Un personnage que l'on pourrait alors facilement mépriser mais Dall s'en tire avec les honneurs pour peindre quelqu'un qui n'est pas fondamentalement mauvais mais qui se laisse totalement contrôler dès son plus jeune âge, par son obsession puis par Laurie. Peggy Cummins est excellente dans le rôle de cette dernière, dont le visage d'ange cache des pulsions violentes, ce qui n'est pas un contraste neuf mais elle injecte une touche d'humanité dans ce qui pourrait n'être qu'un rôle de mauvaise fille menant les hommes à leur perte. On remarque un jeune Russ Tamblyn (alors appelé Rusty) dans le rôle de Bart adolescent.

Un film bénéficiant de tant d'éloges avec les années et d'un tel traitement par un éditeur court le risque d'être décevant, de se révéler au mieux être une série B bien ficelée mais surestimée. Il ne déçoit heureusement pas. Il s'agit d'une petite pépite qui par son thème et sa forme est annonciatrice d'autres métrages marquants à venir.
potion préparée par Zakath Nath, le Mercredi 9 Novembre 2022, 17:46bouillonnant dans le chaudron "Films".