Marquée par la mort récente de sa mère, Sadie Harper s'apprête à retourner au lycée. Son père, psychiatre, reçoit un nouveau patient désespéré qui lui confie que ses enfants sont morts, tués par une mystérieuse créature. Sadie et sa petite sœur Sawyer commencent à craindre que le monstre ait depuis élu domicile chez elles.

Issue du recueil Danse macabre, Le Croque-mitaine est l'une des nouvelles les plus réussies de Stephen King, titillant l'imagination avec un monstre effrayant pour n'importe quel enfant ou parent d'un enfant en bas âge mais dotée d'une chute humoristique au dépend d'un personnage principal qui au fur et à mesure de son récit, devient de plus en plus antipathique et ridicule. Il n'y avait cependant pas là matière à tourner un long-métrage et cette adaptation signée Rob Savage n'en reprend donc que quelques éléments pour broder une histoire plus étoffée et dramatique. Hélas, on y perd ce mélange des tons particulierspour un propos bien plus classique sur la difficulté à supporter un deuil dans une famille rendue de par ce dernier vulnérable à l'intrusion d'une créature maléfique.

Le père, malgré sa profession, est trop renfermé sur sa douleur pour être à l'écoute de ses propres filles, l'aînée est en butte à des pestes dans son lycée, la plus petite a déjà la phobie de l'obscurité et ses cris d'alarme sont évidemment dans un premier temps mis sur le compte de celle-ci... Rien de neuf dans la psychologie des personnages et les obstacles que l'on pose sur leur chemin avant même l'intrusion de la créature. Les règles entourant celle-ci sont d'ailleurs obscures: elle s'introduit dans les demeures de familles affaiblies par une crise mais le croque-mitaine que l'on montre, tout en investissant la maison des Harper, semble toujours avoir comme point de chute la baraque de ses précédentes victimes, qui n'est pourtant pas la porte à côté. Elle est capable d'imiter les voix mais ne le fait finalement que rarement même quand il serait opportun de tendre un piège. Les jeunes enfants ont l'air d'être ses victimes privilégiées pourtant elle a l'air de davantage tourmenter la fille aînée que la cadette à qui elle offre quelques frayeurs sans pousser plus avant.

La réalisation de Savage, pourtant, arrive à ne pas rendre le film parfaitement insipide grâce à une utilisation habile de l'obscurité et des quelques sources de lumière qui laissent deviner le croque-mitaine. De plus, malgré des apparitions à l'arrière-plan, des escamotages dès que les protagonistes essaient d'y voir de plus près, on évite l'aspect jumpscare à gogo qui finissait par transformer les derniers Insidious et autres dérivés du Conjuringverse en trains-fantômes aussi décevants et peu effrayants que les vrais. On reste tout de même sur quelque chose de très sage car à l'exception de la courte scène d'introduction qui annonce la nature de la menace, le monstre ne commettra pas de carnage chez les bambins.

L'interprétation est correcte, sans plus. Chris Messina en père physiquement là mais mentalement absent n'a pas grand chose à faire, la petite Vivien Lyra Blair n'est pas mauvaise mais souffre du syndrome du très jeune enfant qui a des intonations ou des réflexions trop adultes et une bonne partie du film repose sur les épaules de Sophie Thatcher qui a garé son vespa du Livre de Boba Fett pour faire honorablement le job dans un rôle convenu d'adolescente tristounette mais dont l'affrontement avec le croque-mitaine aura le mérite d'être cathartique.

Joliment réalisé mais trop bancal et balisé pour être vraiment intéressant, Le Croque-mitaine s'inscrit dans la lignée de films d'horreur grand public (l'interdiction aux moins de 12 ans est presque trop sévère) qui sont simplement moyens, avec quelques qualités à relever mais bien trop fades pour être mémorables.