Alors que sa mère et elle ont bien du mal à joindre les deux bouts, Philomela Drax reçoit une lettre de son riche grand-père qu'elle n'a jamais connu. Ce dernier est tombé entre les mains de la famille Slape, un trio infernal qui en a après sa fortune. Philo tente de le sauver, en vain, et jure de retrouver son héritage. La plus redoutable de ses ennemis sera la jeune Katie Slape, douée d'un pouvoir de voyance et meurtrière adepte du marteau.

Les éditions Monsieur Toussaint Louverture continuent leur intégrale de l’œuvre de Michael McDowell. Ce semestre, voici Katie, dans la continuité du précédent roman publié, Les Aiguilles d'Or: encore une histoire sanglante dans le Nord-Est des États-Unis de la fin du XIXe siècle, avec des méchants détestables que l'on veut voire chuter de manière spectaculaire. On suit ainsi les turpitudes des Slape, John, sa deuxième épouse Hannah et sa fille Katie. Après avoir mis la main sur la fortune d'un vieil homme grabataire mais incapables de la faire fructifier, ils poursuivent leurs meurtres pour quelques centaines de dollars à chaque fois, usant des dons de voyance de Katie pour attirer leurs victimes.

Leur route ne va cesser de croiser celle de Philo Drax, méritante jeune femme qu'ils ont privé de son héritage en assassinant son grand-père. Philo ne va pas particulièrement partir à leur poursuite, faute d'éléments si ce n'est de détermination à se venger, mais le destin ne va cesser de brièvement les réunir. On est ici en plein hommage aux romans-feuilletons d'antan: aucune coïncidence n'est trop grande. Les chapitres sont courts et il ne s'en passe guère un sans de nouveaux rebondissements pour relancer l'intrigue. Dès qu'il arrive quelque chose de bien à Philo, un malheur suit et quand elle est au plus bas, une aide inespérée se manifeste. Les meurtres commis sont sanglants à souhait et si Katie a une prédilection pour le marteau, elle ne manque pas d'imagination quand elle n'en a pas un à portée de main. Les caractères sont très tranchés, avec les gentils, les méchants et les boulets, principalement. Philo pourrait alors être pénible dans le rôle de l'héroïne admirable mais elle n'est jamais niaise: elle est honnête et courageuse mais les circonstances l'obligent à se montrer dure pour ne pas se laisser abattre et elle n'a pas que des pensées vertueuses: elle vole certes au secours de son grand-père quand il est en danger mais on ne nous fait pas croire qu'à aucun moment elle ne pense à son héritage. Son désir de retrouver les Slape n'est pas seulement de la justice mais une envie de vengeance. En face, les Slape ont tous les défauts mais en deviennent presque pathétiques tant ils n'ont pas l'intelligence pour utiliser ce qu'ils gagnent par de mauvais moyens et enchaînent les meurtres sordides plus par habitude que par nécessité. Ce qui n'empêche pas Katie d'être terrifiante.

L'humour n'est jamais loin, notamment à travers l'antipathique mais fort peu efficace famille Varley. Comme souvent chez McDowell, les personnages féminins ont la vedette, qu'ils soient positifs ou négatifs. Les hommes peuvent avoir le beau rôle mais ils sont en retrait, parfois plein de bonne volonté mais d'une efficacité douteuse comme Henry Maitland dont l'aide est parfois redondante ou qui est opportunément absent quand Philo est en danger.

Katie marque le goût prononcé de Michael McDowell pour le roman populaire dans lequel on tremble sans arrêt pour les protagonistes même quand on sait qu'ils vont triompher, ou l'on a envie de huer les méchants et d'applaudir à leur déconvenue, où l'on ne laisse guère un moment pour souffler tandis que les péripéties s'enchaînent sur plus de 400 pages.