Mona découvre qu'elle a hérité de sa mère, morte quand elle était enfant, d'une maison dans la petite ville de Wink, au Nouveau-Mexique. Une ville difficile d'accès car elle ne figure sur aucune carte. Quand Mona y parvient malgré tout, elle découvre une localité pimpante mais dont les habitants sont secrets et ont établis de nombreuses règles, en particulier de ne jamais s'aventurer dans la nature alentour en pleine nuit. La jeune femme va malgré le danger percer à jour les secrets de Wink, dont les notables meurent les uns après les autres.

Avant de se lancer dans sa trilogie des Maitres Enlumineurs, Robert Jackson Bennett a écrit quelques romans indépendants, dont cet American Elsewhere qui ne nous emmène pas dans un monde inventé de toute pièce mais dans une petite ville ordinaire du fin fond de l'Ouest américain comme il y en a tant. Oui, enfin, il faut le dire vite. Comme va vite le découvrir Mona Bright, ancienne flic à la dérive à la recherche d'un nouveau départ, Wink n'a rien d'une ville ordinaire et ce qui s'y passe est déjà terrifiant mais pas autant que ce qui se trame.

Comme dans L'Antre de la Folie "la réalité n'est plus ce qu'elle était": Mona revoit des scènes qui se sont passées des années auparavant, entre dans des lieux qui semblent en contenir plusieurs et certains habitants de Wink, d'apparence toute aussi humaine qu'elle, ont un comportement étrange qui indique qu'ils ne sont pas tout à fait ce qu'ils paraissent. Les réponses se trouvent peut-être dans le laboratoire qui surplombe la ville dans lequel a travaillé la mère de Mona avant sa naissance.

Robert Jackson Bennett revisite avec bonheur le thème du bled paumé des US qui cache un mystère destructeur: Wink est-elle hantée? Assiste-t-on à une invasion de body-snatchers? Quant à Mona, qui n'a jamais vraiment trouvé sa place, dont la vie est un échec, la voilà qui va devoir se plonger dans un passé aussi insaisissable que douloureux.

Certes, les révélations abondent mais les indices sont suffisamment amenés en amont ou les fables suffisamment transparentes pour comprendre assez vite à quoi l'on a affaire. Cela n'empêche pas l'auteur d'instaurer un climat véritablement inquiétant avec une dangereuse entité inconnue mais redoutable, d'autres créatures qu'il vaut mieux éviter de croiser et des alliés potentiels qui n'en restent pas moins ambigus: de ce fait, comme Mona, on ne sait trop sur quel pied danser, à qui faire confiance et l'adversaire le plus redoutable n'est pas forcément celui que l'on imagine.

Comme dans Les Maîtres Enlumineurs, Robert Jackson Bennett a tendance à compliquer une idée de base simple. Ce n'est pourtant pas gênant ici car on est vite happé par l'ambiance de Wink, on frissonne à l'évocation de ce qui rôde et qui est encore contenu, et le suspense se maintient jusqu'aux derniers chapitres explosifs.