Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Mademoiselle Mozart
Découvrant que sa fille cadette, Eliza, a un don pour improviser à partir des partitions de sa sœur aînée, Leopold Mozart décide de la faire passer pour un garçon afin de lui assurer une carrière de compositeur de premier plan. Quelques années plus tard, "Wolfgang" a tenu ses promesses. Ses affaires se compliquent quand elle s'installe à Vienne et attire, pour des raisons différentes (ou pas) l'attention de Constance Weber et Antonio Salieri.

Dans les dernières saisons des Soprano, une intrigue secondaire mais lourde de conséquences montrait Christopher se lancer dans la production d'un film avec un fin raisonnement: puisque Le Parrain avait été un succès et les films d'horreur très gores du type Hostel aussi, mélanger les deux en un seul long-métrage garantirait un carton. À la fin des années 80, le mangaka Yoji Fukuyama semble avoir suivi la même logique. À ma gauche, La Rose de Versailles, shojo adapté en anime sous le titre de Lady Oscar (et aussi en un film live sous la houlette de Jacques Demy qui a les honneurs d'une chronique sur Nanarland): l'histoire d'une aristocrate que son père a élevé comme un garçon et chargé de la protection de Marie-Antoinette; à ma droite, Amadeus, une des grosses sorties multi-récompensées de l'année 1984, adaptée de la pièce du même nom, contant l'affrontement fantaisiste entre un Mozart béni de Dieu et un Salieri acharné à sa perte tout en se repaissant de sa musique, à la cour de Joseph II, le frère de Marie-Antoinette, le monde est petit (chez les aristos). Mademoiselle Mozart, c'est donc bien simple et ça ne méritait pas un si long paragraphe d'introduction, c'est Mozart à la sauce Lady Oscar.

L'existence de Mozart est ainsi passée à la moulinette de ce postulat et l'on assiste aux efforts d'Eliza/Wolfgang pour faire connaître sa musique sous une identité d'emprunt à laquelle elle s'est habituée. Cependant le subterfuge constant lui pèse et la mort de Leopold sera l'occasion pour elle d'apparaître en tant qu'Eliza, temporairement du moins. Son mariage avec Constance Weber qui se retrouve brutalement devant le fait accompli ne lui facilite pas les choses, tout comme les soupçons immédiats du populaire compositeur de la cour, Antonio Salieri. Il n'est pas ici en proie à l'envie, mais attiré par quelqu'un qui est officiellement un homme, ce qu'il a du mal à accepter (il est encore une fois présenté comme célibataire endurci, entretenant une chaude liaison avec la Cavalieri mais au moins l'écart d'âge entre lui et Mozart est respecté. Un jour, peut-être, on le mettra en scène avec sa femme et sa marmaille).

Malgré ce point de départ improbable, on sent que le mangaka a fait quelques recherches, il respecte dans les grandes lignes la chronologie de la dernière décennie de la vie de Mozart et livre quelques informations exactes. Son Joseph II n'est pas un bienveillant guignol et malgré une pique peu crédible envers Gluck, il est bien respecté pour son peu de temps d'apparition. Le dessin, le découpage, tout est dynamique et ce gros volume se lit d'une traite. Malheureusement l'utilisation du concept se révèle limitée et tourne un peu en rond. Les tourments de Constance qui aime Eliza/Wolfgang mais voudrait un vrai mari et doit chercher ailleurs pour faire des enfants (on joue ici sur les rumeurs de liaison avec Sussmayer); le trouble de Salieri en mode "no homo" qui soit veut démasquer l'imposture de Mozart, soit éloigner la tentation, soit lui déclarer sa flamme, on ne sait plus très bien et lui non plus; l'égoïsme de Mozart qui entend profiter de la vie et ne se soucie guère de l'impact de ses décisions sur les autres... Pas de série à rallonge, c'est un bon point mais l'on sent parfois qu'on passe à côté de quelque chose d'intéressant: Nannerl est présente mais sacrifiée alors qu'il y avait matière pour ce personnage qui voit sa sœur se faire offrir une opportunité par son père à laquelle elle n'a pas eu droit, puis le prix que cela peut coûter pour sa cadette. Catarina soulève un point intéressant quand elle demande à Salieri s'il est capable d'aimer une personne qui lui est supérieure et quand Mozart obtient un poste à la cour, son amoureux transi remarque que c'est un problème... qui n'est finalement pas creusé, tout le monde passe à autre chose. La fin, où l'on joue là encore sur les rumeurs d'empoisonnement, se perd à vouloir multiplier les pistes (mais on fiche la paix aux suspects habituels). La conclusion est facile mais amusante et semble justifier deux gros anachronismes qui se glissent dans la conversation de Mozart, comme si tout ce à quoi on venait d'assister n'est qu'un spectacle dans le spectacle (et pour en rajouter une couche, le manga a d'ailleurs été adapté en comédie musicale). Rien de cela n'est à prendre au sérieux, parait nous dire Fukuyama. L'humour est volontiers grivois, un peu scato au début (Mozart est bon client pour cela même si le dernier aspect reste heureusement cantonné à son enfance).

Mademoiselle Mozart porte un regard amusé sur le compositeur, son entourage et sa légende à travers cette intrigue à base de travestissement et le pavé se parcourt sans le moindre ennui. Dommage que le scénario ne tire pas toujours profit des situations lancées et les réactions de girouette des différents personnages sont parfois déconcertantes.
potion préparée par Zakath Nath, le Vendredi 9 Août 2024, 20:39bouillonnant dans le chaudron "Manga/Bandes dessinées".