Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Eric
Marionnettiste créateur d'une émission pour enfants à succès, Vincent est poursuivi par un sentiment de culpabilité quand son fils Edgar disparait sur le chemin de l'école. Éric, un projet de marionnette dessiné par Edgar, lui apparait alors pour l'aider à retrouver son enfant. L'inspecteur Ledroit, en charge de l'enquête, pense qu'il y a un lien avec une autre disparition moins médiatisée ayant eu lieu dans le quartier quelques mois plus tôt.

Abi Morgan, scénariste britannique derrière notamment la série hélas interrompue trop tôt The Hour, a voyagé de l'autre côté de l'Atlantique et chez Netflix pour signer une ambitieuse mini-série policière. Pourtant, le point de départ, la disparition d'un enfant, a été particulièrement rebattu ses quinze dernières années dans diverses séries télévisées. Adjoindre au père meurtri un gros muppet imaginaire allait-il être un nouvel élément suffisant pour maintenir sortir du lot? Il faudra être patient pour trouver un véritable intérêt de ce côté-là car pendant un moment, les scènes entre eux semblent parfaitement convenues: Vincent s'énerve contre les interventions d'Eric que lui seul peut voir, passants, proches et policiers s'inquiètent pour sa santé mentale déjà fragile. Le personnage, sarcastique, alcoolique, cassant, n'a rien de sympathique et même sa culpabilité suite à la disparition de son fils ne suffira pas à atténuer cette mauvaises impression bien que dans la dernière ligne droite, enfin, l'aspect de l'intrigue lié à Eric et l'importance que lui accorde Vincent pour ramener son fils aura un impact.

Heureusement, les six épisodes ne tournent pas uniquement autour du père. L'inspecteur Ledroit, le bien nommé tant il semble être un îlot d'intégrité au sein d'une police corrompue, travaille d'arrache-pied pour retrouver Edgar. Cependant, il a aussi ses propres difficultés, son intérêt pour le cas dépasse le seul enfant et tourne autour d'une boite de nuit fréquentée par le gratin et tenue par un ancien taulard qui a trempé dans le trafic sexuel de mineurs et n'est peut-être pas aussi repenti qu'il le prétend. C'est glauque? Ce n'est pas tout. Morgan a planté son histoire dans le New York des années 80 où la municipalité fait la chasse aux sans-abris pour mieux embourgeoiser Manhattan, où la privatisation du ramassage des ordures laisse des parties de la ville avec des déchets accumulés... Il se dégage de ce monde une ambiance poisseuse et l'on n'est pas sans penser par moment à Taxi Driver même si l'errance psychologique de Vincent n'est pas aussi paroxystique que celle de Travis, loin s'en faut.

Inutile donc de préciser qu'Eric dégage une ambiance pesante. Tous les personnages ont des secrets honteux, prennent les mauvaises décisions et s'embourbent tandis que les institutions sont tournées vers le profit et gangrenées par le racisme. Ainsi, si la douleur des parents d'Edgar est tout aussi légitime que celle de la mère de Marlon disparu un an plus tôt, cette dernière ne peut que souligner la différence de traitement dans les médias et par la police entre l'enfant blanc, fils du créateur d'une émission populaire, petit-fils d'un magnat de l'immobilier, et l'adolescent noir issu d'un quartier défavorisé et élevé par une mère célibataire. Ledroit cumule de son côté les difficultés liées à sa couleur de peau et à l'orientation sexuelle qu'il cache tant bien que mal à ses collègues et ce n'est pas en enquêtant sur ceux-ci et en tournant autour du tenancier du Lux, boite de nuit louche où tout le monde converge tôt ou tard qu'il se facilite la vie mais il en a trop vu et on lui en a trop dit pour qu'il ferme les yeux.

Pour faire passer la pilule d'un scénario aussi sombre malgré une fin plus douce-amère que nihiliste, on peut compter sur le casting. Benedict Cumberbatch hérite une fois de plus d'un personnage talentueux mais imbuvable, en proie à une addiction mais ici la variation est particulièrement ingrate. Si on repère quelques automatismes dans son jeu, il y met tout son cœur et parvient même, avec difficulté, à émouvoir, ce qui n'était pas gagné. McKinley Belcher III s'impose en limier impliqué mais tourmenté et fait preuve d'un joli charisme discret. Les seconds couteaux sont tout aussi solides, notamment Bamar Kane en SDF inquiétant mais bienveillant, Gaby Hoffman en épouse à bout avant même la disparition de son enfant ou encore Dan Fogler, loin de ses prestations comiques en collègue que l'on croit être le membre le plus solide et fiable du duo formé avec Vincent mais qui abrite des zones d'ombres.

Eric possède une atmosphère trop sombre pour être une mini-série agréable à regarder et l'idée de la marionnette comparse, fruit de l'imagination coupable du père (ou pas?) parait longtemps trop superflue pour qu'on n'y voit pas un simple gadget malin. Néanmoins, les intrigues se goupillent avec habileté jusqu'à une fin poignante et le résultat se révèle savamment maîtrisé.
potion préparée par Zakath Nath, le Lundi 3 Juin 2024, 21:36bouillonnant dans le chaudron "Séries tv".