Les voyages nautiques peuvent être plein de surprises, certaines merveilleuses, d'autres terrifiantes: vaisseaux fantômes, créatures monstrueuses... Les marins qui s'aventurent ici en mer vont en faire les frais et bien peu en ressortiront indemnes.

William Hope Hodgson, auteur de nombreuses nouvelles et courts romans, précurseur d'auteurs comme H.P. Lovecraft, n'avait pas son pareil pour instaurer des ambiances angoissantes, avec ses personnages piégés dans des lieux isolés d'où n'importe quel danger pouvait surgir. Il était friand d'aventures maritimes, baladant ses voyageurs dans des mers dont ils ne revenaient pas toujours. Si j'ai évoqué plus tôt l'inévitable Lovecraft, nul doute que les séquences les plus horrifiques des films Pirates des Caraïbes lui doivent aussi beaucoup bien que ce ne soit peut-être même pas conscient, Hodgson étant un peu oublié de nos jours.

Ce ne sera pas la faute des éditions Terres de Brume qui s'emploient à rééditer son œuvre et ce recueil de quatorze nouvelles explore d'un récit à l'autre des thèmes très voisins, au risque de se montrer répétitives. La première, Les chevaux marins, se distingue des autres avec une histoire triste et poétique d'un grand-père scaphandrier qui sculpte un cheval marin pour son petit-fils à l'imagination débordante. L'épave ouvre le bal des nombreuses intrigues à base de vaisseaux abandonnés qu'un équipage va explorer à ses risques et périls. Les marins vont y rencontrer non pas des spectres pirates ou des poulpes géants mais une créature qui annonce le Blob: en serait-ce une des premières itérations? La chose dans les algues, qui donne son titre au recueil semble être un brouillon moins élaboré de ce qui va suivre: le diptyque terrifiant De la mer immobile et Le cinquième message où un jeune couple est coincé en pleine Mer des Sargasses dans un herbier peuplé de monstres. Le monstre de l'île aux algues qui clôt le volume peut être vu comme un épilogue plutôt qu'une simple réécriture de la même histoire.

La Voix dans la Nuit fait bien frissonner et évoque la métamorphose monstrueuse d'un autre jeune couple perdu en mer. On change un peu de registre avec L'île de Ud et L'Aventure du Promontoire: il y a des passages terrifiants mais ces deux nouvelles mettant en scène le colérique et avide capitaine Jat et son mousse Pibby sont plus humoristiques bien qu'on puisse remarquer que quand on a lu la première, on a quasiment lu la seconde.

Il vaut donc peut-être mieux picorer ces nouvelles que toutes les lire d'une traite tant on a parfois l'impression de lire de simples variations sur des thèmes très limités. Cela ne diminue pas le talent de l'auteur à faire frissonner à partir de sujets qui peuvent sembler rebattus, que ce soit par lui ou par d'autres.