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Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Le Nom de la Rose
Sur ses vieux jours, Adso de Mel se souvient: au début du XIVe siècle, jeune novice franciscain, il accompagne son mentor Guillaume de Baskerville dans une abbaye isolée du nord de l'Italie. Celle-ci est frappée par une série de meurtres, excitant l'imagination des moines craignant l'Apocalypse mais Guillaume quant à lui devine une origine bien humaine à ces décès violents.

Lorsque le roman Le Nom de la Rose parait en 1980, frère Cadfael, le moine enquêteur créé par Ellis Peters, avait trois ans. Umberto Eco n'a donc pas inventé le concept du whodunit médiéval dans lequel un membre du clergé va user de ses petites cellules grises pour démasquer des assassins. Néanmoins, l'auteur italien s'y est employé avec son érudition habituelle pour un résultat qui a été aussi bien un succès de librairie que le lauréat de prix prestigieux. Peu étonnant donc qu'une adaptation ait été lancée, coproduction franco-italo-allemande réalisée par Jean-Jacques Annaud avec un casting international. Une adaptation ou plutôt comme l'indique le début, "un palimpseste" du roman d'Eco, plaisanterie médiévaliste qui annonce le ton du film.

En effet, en dépit de se dérouler dans un cadre sinistre, une abbaye bénédictine isolée qui exploite les miséreux du coin, avec une vision du Moyen Âge bien boueux en proie à la répression religieuse, il est difficile de ne pas voir l'humour avec lequel tout ceci est dépeint par Annaud. Hormis Adso et Guillaume, tous les personnages ont des trognes pas possibles, au point où le difforme Salvatore n'est pas forcément tellement plus mal loti que ses compagnons. Les débats théologiques entre les Franciscains et la délégation papale tournent à la farce. Guillaume lui-même ne manque pas d'humour dans ses échanges avec Adso ou sa vision de ses semblables. Pour autant, le danger n'est jamais désamorcé: les morts s'accumulent, le vilain inquisiteur Bernardo Gui arrive et il n'est pas bon d'être accusé d'hérésie en ces temps. Compte-tenu de l'enjeu de l'enquête de Guillaume et du propos du livre et du film, Jean-Jacques Annaud a parfaitement compris l'équilibre à atteindre et pourquoi. Le rire est puissant, important, le fanatisme en est l'antithèse et peut recourir aux moyens les plus terribles pour le faire taire.

Bien que suivant la même trame, on n'adapte pas un pavé aussi recherché que celui d'Eco sans quelques aménagements pour le grand public et l'on pourra reprocher à la fin d'être un peu trop sentimentale: la jeune ribaude est sauvée du bûcher et l'affreux inquisiteur mis hors d'état de nuire alors que le roman n'offrait pas une telle satisfaction aux lecteurs et pour cause, Bernard Gui étant un personnage historique. Le film bénéficie en revanche des décors impressionnants créés par Dante Ferretti: si les intérieurs ont comme souvent été tournés dans de vrais monastères, l'extérieur de l'abbaye a été construit de toutes pièces, ce dont on ne se douterait pas en la voyant, de même que la labyrinthique bibliothèque, en fait réduite à trois pièces qu'Annaud a réaménagé en fonction des besoins.

Sean Connery n'était pas le choix le plus évident à l'époque ni même bien accueilli par Eco car sa carrière était dans un creux et il restait associé à James Bond en dépit d'avoir déjà largement su prouver qu'on ne pouvait le cantonner à 007. Difficile désormais de ne pas associer Guillaume de Baskerville, proto-Sherlock Holmes comme son patronyme l'indique, à l'acteur qui se glisse avec malice dans sa robe de bure. Plus limité se montre Christian Slater alors débutant, avec une nette tendance à rester bouche ouverte et écarquiller les yeux mais il n'est pas non plus mauvais en novice encore naïf. Les bénédictins offrent un beau casting de gueule dont Ron Perlman n'est pas la moindre: Michael Lonsdale en abbé dépassé par les événements, Feodor Chaliapin Jr. et Volker Prechtel en bibliothécaires louches... Auréolé d'un oscar, F. Murray Abraham a apparemment été une tannée pour le reste de l'équipe sur le tournage mais bien que son personnage ne se caractérise pas par sa nuance, il en impose en inquisiteur venu pour brûler de l'hérétique.

Bien que le film simplifie le texte d'origine et se livre à des raccourcis liés au besoin de faire tenir le récit en un récit digeste de deux heures, Le Nom de la Rose est une belle réussite, une démonstration de production à la fois grand public et intelligente dont la forme soignée n'occulte pas le message.
potion préparée par Zakath Nath, le Dimanche 24 Mars 2024, 11:48bouillonnant dans le chaudron "Films".