Une femme se remettant d'une difficile opération est fascinée par une église sur le point d'être démolie près de laquelle elle rencontre un homme étrange. Des mercenaires s'approprient des terres dans la jungle amazonienne et subissent une malédiction. Un agent secret anglais rencontre un homologue du KGB à Berlin et découvre qu'il s'agit d'un loup-garou. Un illusionniste est assassiné et un détective doit le veiller avant sa crémation car le cadavre suscite des convoitises. Cinq histoires avant de refermer définitivement les Livres de Sang.

En six volumes et une vingtaine de nouvelles, Clive Barker aura eu de quoi livrer un aperçu de ses thèmes de prédilection et de son talent. On termine sur cinq récits, quatre ouvrant sur des univers inédits et le dernier revenant à Jerusalem Street où tout a débuté.

On commence avec The Life of Death dans laquelle une femme, Elaine, se remet d'une hystérectomie. Elle rencontre un homme sur le site d'une église sur le point d'être démolie et commence à partager son intérêt pour la crypte qui s'y trouve. Alors que les décès se multiplient autour d'Elaine, celle-ci se demande si elle n'a pas tissé un lien particulier avec la Mort. Barker se lancerait-il dans le romantisme, très morbide certes mais tout de même? Il faut prendre garde à ne pas sauter trop vite aux conclusions sous peine de souffrir de quelque désillusion mais cette première nouvelle fait preuve d'une belle poésie macabre.

On enchaine sur How Spoilers Bleed qui revisite un thème des plus classiques: la malédiction que s'attirent des Occidentaux avides de la part d'un sorcier local (ici d'Amazonie). Les personnages sont détestables comme il faut ce qui fait qu'on ne les plaint pas, rien de nouveau sous le soleil bien que Clive Barker emballe ça avec efficacité.

Twilight at the Towers aussi utilise une idée qui a fait ses preuves, quoique sans doute pas encore trop à l'époque de sa rédaction: l'utilisation de lycanthropes dans le cadre de guerres entre grandes puissances. Ici avec des espions durant la Guerre Froide. Pas d'affrontement idéologique entre blocs, on découvre vite que le protagoniste et son homologue russe ont davantage en commun qu'avec leur chefs de service et compatriotes.

On garde le gros morceau pour la (presque) fin: The Last Illusion raconte l'histoire d'un illusionniste transpercé par une de ses lames et qui requiert une attention particulière après sa mort. On découvre qu'il cherche à se protéger des conséquences d'un pacte avec le Diable. La nouvelle a servi de base au film Le Maître des Illusions que Clive Barker a lui-même réalisé et marque surtout la première apparition d'Harry D'Amour, détective de l'occulte encore peu expérimenté et qui galère. Il y a de l'humour notamment avec le personnage du taxi, on retrouve quelques métamorphoses craspecs et des idées barrées (le tigre!). Une arrivée en fanfare pour ce qui ressemble le plus à un héros chez Barker, de quoi conclure en beauté.

Pas tout à fait en réalité car On Jerusalem Street (a postscript) nous ramène là où tout a commencé, où l'on retrouve le jeune faux médium dont la peau est devenue le réceptacle des terribles récits que l'on a lu. Une peau qui suscite bien des convoitises. Une petite coda pour refermer une bonne fois ces recueils de nouvelles.

On se dit qu'au fil du temps, Clive Barker aurait pu écrire ponctuellement de nouveaux volumes de ses Livres de Sang mais la dernière nouvelle indique une envie claire de clore le projet. Il s'est en effet par la suite lancé dans des romans conséquents pour la plupart. En terme de courtes histoires, on a en tout cas là un sacré échantillon de ce que le genre horrifique peut offrir de plus inventif et tordu.