Lori espérait fêter son diplôme de fin d'études avec ses parents mais elle ne rentre chez elle que pour découvrir qu'ils ont péri dans un incendie criminel. La jeune femme est assaillie de rêves de plus en plus perturbants et commence à craindre que quelqu'un conspire contre elle. Cependant, la menace est-elle bien humaine ou appartient-elle au domaine du surnaturel?

Entre rééditions d'auteurs vénérables comme Shirley Jackson et promotion de petits jeunes présentés comme de nouvelles sensations de l'épouvante (une bonne partie du catalogue), Lori offre un entre-deux: alors que Robert Bloch appartenait déjà à la première catégorie, Pocket Terreur pouvait se targuer de tenir là du neuf, un inédit, le premier roman de l'auteur depuis cinq ans et de fait, l'un de ses derniers. Pour un romancier qui a débuté dans les années 30, il est donc un peu étrange de le voir mentionner Bush, père mais quand même, tellement il semble appartenir à une autre époque, celle des héritiers directs de Lovecraft et des collaborateurs d'Alfred Hitchcock plutôt que celle de ceux dont un Stephen King déjà consacré vante en phrase d'accroche à coup de "allez-y c'est de la bonne, j'ai eu très peur!".

Ici, Bloch s'emploie à la fois à écrire un thriller psychologique comme ceux qui l'on rendu célèbre, avec une héroïne qui s'interroge sur son équilibre mental mais qui a quelques éléments lui permettant d'estimer sans trop se tromper qu'on lui en veut, et le fantastique car la pauvre Lori est contactée par une médium qui a des arguments consistants et qui disparait vite dans de trop étranges circonstances pour les rationaliser. Lorsque l'auteur vend très vite la mèche sur un meurtre, ce n'est pas tant pour lancer une fausse piste que pour faire comprendre que la menace est multiple. Le personnage principal est donc fort mal loti, peut-elle faire confiance à son fiancé journaliste qui pose des questions dans son dos "pour la protéger", peut-elle se confier à ce psychiatre qu'on lui a recommandé sans qu'il ne la croie gravement perturbée tant ce qui lui arrive devient de plus en plus obscur et délirant? L'espoir peut-il venir de ce flic rincé qui compare sans arrêt sa propre carrière à celle idéalisée des enquêteurs de fiction, chagriné de ne pas avoir le même rendement et la même efficacité qu'Angela Lansbury? Si l'on voit venir quelques réponses à l'avance, Robert Bloch a toujours le sens du suspense et il faut vraiment attendre les dernières pages pour souffler un peu... Encore que l'état de Lori, faute d'avoir sa version des événements à la toute fin, ne sera jamais totalement rassurant aux yeux du lecteur.

Au seuil des années 90, Robert Bloch en avait donc encore sous le capot pour livrer un roman qui ne sera sans doute pas ce qu'il a écrit de plus mémorable mais qui n'en demeure pas moins fort efficace.