Journaliste à Entertainment Weekly, James Hibberd a suivi la conception de Games of Thrones, de l'annonce du projet à l'accueil des derniers épisodes. Du casting de plus en plus étoffé aux techniciens pataugeant dans la gadoue pour offrir les plus épiques batailles jamais vues en passant par les décisions des scénaristes, on explore avec lui les coulisses d'un projet fou au départ et qui s'est pourtant concrétisé pour devenir le plus gros phénomène télévisuel de ces dernières années.

Il ne manque pas de making-of de Game of Thrones, d'interviews des acteurs, des scénaristes, des réalisateurs, d'analyses en tout genre de la saga et de ce qui a fait son succès. Qu'est-ce que le livre de James Hibberd, bien que témoin privilégié de la confection de la série, pouvait bien ajouter de plus? Une bonne synthèse, au moins, puisque cet ensemble de citations des différents intervenants, compilées au sein de chapitres abordant les différents aspects de la création de l'adaptation des livres de George R.R. Martin, n'est jamais indigeste.

Livre officiel, on pouvait craindre qu'une langue de bois totale soit alors de mise. Ce n'est pas le cas puisqu'on y trouve certaines réserves, des aveux d'échec (relatif à Dorne en saison 5, principalement), un retour sur les controverses provoquées par des rebondissements violents... "Tact" semble cependant rester le mot-clé. Si l'on espère du scandale, voir les acteurs baver sur Benioff et Weiss à cause des choix faits dans la dernière saison, ce n'est clairement pas la porte à laquelle sonner. De même que si les acteurs évoquent quelques comportements désarçonnants de fans, on n'est pas non plus là pour gloser sur la toxicité de certaines franges du fandom (le récit de la Comic-Con se termine sur une note positive après avoir entendu des huées du public avant l'entrée en scène des acteurs et du modérateur - Hibberd lui-même - mais les showrunners n'étaient pas présents.)

Néanmoins, pour qui s'intéresse aux coulisses d'un show ambitieux, Le Feu ne tue pas un dragon ne manque pas d'intérêt. On y voit comment les créateurs ont pu convaincre les décideurs d'HBO de leur donner leur chance, sans que ceux-ci se doutent encore des moyens qui leur seraient demandé, la phase de casting, le pilot loupé qui sert à voir quelles erreurs ne pas commettre, les difficultés de tournage liées au climat, la pression constante suite au succès à la fois espéré et dépassant les attentes... Il y a de l'humour dans les interventions mais qui ne cache pas non plus à quel point tout n'a pas été une partie de plaisir (les deux premières saisons ont notamment été particulièrement éprouvantes pour Emilia Clarke). On sent cependant toujours l'importance que le show, et le reste de la troupe a pu avoir pour chacun, comment malgré tous les talents impliqués et le travail titanesque abattu, la réussite et le succès tiennent à une combinaison de facteurs telle que cela tient presque du miracle d'avoir eu cette série menée à terme.

Le Feu ne tue pas un dragon n'apprendra pas forcément grand chose à un fan ayant épluché toutes les interviews pendant les quinze dernières années mais c'est un bon résumé qui donne la parole à différents intervenants, dont les techniciens pas toujours mis en avant, un peu triste parfois (quand on lit les remarques des actrices jouant les Aspics des Sables, on ne peut que regretter qu'on n'ait pas pu adhérer davantage à leur sous-intrigue et en même temps on ne peut pas faire semblant de croire que c'était au niveau du reste, même si l'on comprend les choix opérés à l'époque) mais instructif tout de même et avec quelques années de recul, cela donne aussi une vision d'ensemble plus apaisée sur une entreprise ambitieuse qui a déchainé les passions.