Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Filles du Feu
En 1609, le juge Pierre de Lancre arrive au Pays Basque afin d'y traquer une sorcière dont on lui a signalé la présence. Choqué par la liberté des femmes locales, il condamne bientôt au bûcher l'une d'entre elle, Gratianne, mais il est convaincu qu'elle n'est pas seule.

Ah, les mini-séries historico-romanesques de France TV! Je ne tente pas l'expérience systématiquement mais la curiosité me prend à l'occasion avec des résultats mitigés: La Commanderie, intéressante mais sans grand moyens et très théâtrale, Inquisitio qui brassait un peu trop d'influences mais se révélait sympathique et surtout Rani, qui recyclait tous les gros câbles des romans-feuilletons pour sombrer occasionnellement dans le nanar avec un panache méritoire. Si seulement Filles du Feu, l'événement de la rentrée sur le service public, avait pu embrasser cette direction! Pourtant, les premiers épisodes sont très divertissants à défaut d'être de grande qualité et laissent entrevoir un potentiel pour partir dans le nawak, ce qui aurait excusé bien d'autres faiblesses par ailleurs. Hélas, on restera avec un sentiment d'inaboutissement sur tous les plans, qu'on prenne cette fiction au sérieux ou non.

On ne perd pas de temps à nous annoncer la couleur: basée sur une histoire vraie, la chasse aux sorcières opérée par Pierre de Lancre en 1609 au Pays Basque, juge qui rentra vite chez lui suite aux émeutes provoquées par les marins revenus de Terre-Neuve mais continua une prestigieuse carrière, la mini-série, dès ces premières images, laisse comprendre que oui, certaines femmes ont des pouvoirs magiques et communient avec la nature, les abeilles notamment. On n'est certes pas dans Salem où leurs pratiques étaient tellement répugnantes et néfastes que l'on prenait parti pour les puritains, ce qui n'était pas le but, mais on sait d'entrée qu'on repassera pour la rigueur historique. Soit. Nos héroïnes sont des femmes libres, elles se reconnaissent à leur crinière en pétard et vont faire face à la violence et l'étroitesse d'esprit des hommes, qui ici d'ailleurs agitent fort peu la religion malgré les accusations d'adorer le Diable mais se targuent d'être des esprits modernes et scientifiques. Tout ce beau monde est caricatural mais on s'amuse bien devant ce spectacle rythmé et aléatoirement joué, jusqu'à ce qu'il marque le pas dans sa deuxième moitié.

En effet, les malheurs de Jeannette qui refuse son destin de guérisseuse en phase avec la Déesse, de Catherine mariée de force à un noble crétin ou de Morguy l'innocente manipulée par le juge, finissent par tourner en rond. Les personnages susceptibles d'évolution ne changent pas, ou trop rapidement, ou dans une direction sans grand intérêt. Pendant un temps, on semble partir sur une adaptation du Loup-Garou de Thiercelieux pour ne faire connaissance que de deux personnages symptomatiques du problème: ils n'ajoutent rien à ceux déjà présents, n'accomplissent rien, pour n'aller finalement nulle part. Peut-être aurait-il mieux valu passer plus de temps sur Tristan d'Urtubie et sa maîtresse, amusants au début mais dont on ne sait trop que faire: un couple d'associés dans le crime entrant en conflit tels Valmont et Merteuil, des méchants rigolos, des personnages nuancés capables de changer? Madame de Leoz est ainsi parfaitement au courant des manigances de son amant sans en être choquée puis naïve quelques épisodes plus loin quant aux actes de Tristan vis-à-vis de Catherine. Un esprit cultivé et scientifique attaché on ne sait pourquoi à un paltoquet incompétent. Catherine, tiens, armatrice et cheffe d'entreprise depuis la mort opportune de son mari, elle gère son affaire depuis son bureau couvert de cartes et de livres de comptes mais on apprend plus tard qu'elle ne sait pas lire (répété deux fois, donc pas juste un faux-témoignage occasionnel lorsque le juge l'interroge). La dirigeante indépendante qui fait fructifier une affaire qui sans elle va à vau-l'eau est donc totalement dépendante d'un intendant. Bien joué. De plus, à vouloir rester fidèle à la réalité historique concernant Pierre de Lancre, on se retrouve avec une fin bien fade en regard de ce qui a précédé. Le propos féministe louable est assené avec la délicatesse d'un panzer et force coup de coudes à notre époque (le vilain juge n'aime pas le mot "autrice"! Ça dénonce!)

De manière fort prévisible pour une série historique française, le jeu ou la direction d'acteurs est hétérogène. Certains, qui s'en sortent le mieux, jouent en ayant conscience qu'ils sont dans une série historique, tels Guillaume de Tonquédec, Michèle Laroque ou Bruno Debrandt, la plupart restitue les dialogues comme si le cadre était un collège du XXIe siècle (mention spéciale au chef des gardes et à son discours "poignant" dans le dernier épisode.) Source de rigolade involontaire pour ma pomme, la ressemblance notable entre Debrandt et Reece Shearsmith, qui avait déjà abordé dans un épisode d'Inside n°9 le thème de la chasse aux sorcières au XVIIe siècle. Il ne manquait qu'un sosie de Steve Pemberton avec une diction bizarre et une perruque idoine pour parachever le tableau.

Pas assez rigoureuse dans le traitement de son sujet pour être une minisérie historique intéressante, pas assez délirante et constante dans ses écarts pour être une relecture libre et nanarde d'une page de l'Histoire de France, pas assez solide dans l'évolution de ses personnages, de leur psychologie et de son intrigue pour être simplement une bonne fiction, Filles du Feu n'arrive pas à maintenir l'intérêt sur sa longueur et est une déception, quoi que l'on vienne y chercher.
potion préparée par Zakath Nath, le Dimanche 3 Septembre 2023, 18:45bouillonnant dans le chaudron "Séries tv".