Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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El Mercenario
Humble péon, Paco Ramon se révolte contre son maître, le puissant Alfonso Garcia. Avec quelques hommes, il s'improvise révolutionnaire et croise la route de Sergei "le Polack" Kowalski, chargé par Garcia de transporter son or. Kowalski accepte contre salaire de faire de Paco un révolutionnaire efficace tandis que son ennemi personnel, le Bouclé, se joint à Garcia pour les traquer.

El Mercenario est un projet qui est passé de mains en mains, a changé de distributions, de réalisateurs et même de lieu d'action puisque celle-ci devait un temps être transposée en Afrique avec Sidney Poitier dans l'un des rôles principaux. C'est finalement Sergio Corbucci qui se retrouve aux commandes en amenant son acteur fétiche Franco Nero dans sa musette. Le film reprend les ingrédients traditionnels du western Zapata: un pauvre mexicain devenu un mélange de bandit et de révolutionnaire associé de plus ou moins bon gré à un gringo/européen venu au Mexique avec des intentions troubles. On ajoute une passionaria, un vilain exploitant et un antagoniste sadique pour faire bonne mesure et nous voilà parti pour une série de péripéties échevelées. Ici, si le fond politique reste perceptible, notamment par un fin parallèle entre les classes sociales et une chute de reins, il laisse largement la place à un récit d'aventures picaresques qui joue sur la méfiance et la complicité qui se noue entre Kowalski et Paco. Le premier est comme le titre l'indique un mercenaire capable de vendre ses associés au plus offrant, le second, après une révolte, tient plus du chef de bande que du guérillero mais au contact de Colomba et paradoxalement du Polonais, verra grandir en lui une conscience sociale qui ne se limite pas à sa personne.

Kowalski et Paco sont tous les deux capables de fourberies et de violence avec un certain goût pour l'humiliation de leurs adversaires, aussi faut-il leur mettre dans les pattes de beaux exemples de vilénie pour faire pire: Alfonso Garcia incarne le riche propriétaire exploitant sans scrupule les damnés de la terre mais c'est surtout le Bouclé qui attire l'attention, ennemi juré de Kowalski qui va aussi devenir celui de Paco. Les hauts et les bas des personnages les conduiront à un duel mémorable. Les westerns italiens ont toujours eu le goût de placer les règlements de comptes dans des lieux circulaires plutôt qu'une grande rue rectiligne chère à leurs homologues américains, ici Corbucci pousse la logique jusqu'au bout en le situant dans une véritable arène (et le thème d'Ennio Morricone L'Arena sera sans surprise repris par Quentin Tarantino). Ce duel a beau évoquer ceux d'... Et pour quelques dollars de plus et Le Bon, la Brute et le Truand, il est remarquablement mis en scène au point de faire regretter qu'il faille encore une dizaine de minutes pour conclure le film, quand bien même la dernière réplique résume à merveille le propos de l'histoire.

Si nombreux sont les personnages connaissant un mauvais sort, El Mercenario est moins violent graphiquement que d'autres westerns du même réalisateur: on a une castration hors-champs, un sbire qui se prend une fourche dans le ventre, mais rien de comparable à l'oreille coupée et avalée de Django. Le caractère mal dégrossi de celui-ci s'efface d'ailleurs devant ce que l'on devine être des moyens bien plus confortables: Corbucci varie les décors, de villes, de paysages filmés de manière ample sans crainte de caser une ligne à haute-tension dans le cadre (le récemment visionné Django arrive, préparez vos cercueils ne peut pas en dire autant) et se paie même un biplan pour une scène de bataille dont l'utilité dans l'intrigue ne se justifie guère mais qui illustre bien cette opulence toute nouvelle. Sa réalisation est également plus policée, avec des zooms toujours présents mais beaucoup moins brutaux que dans Django.

Les personnages sont archétypaux mais savoureux. Nero campe un mercenaire nonchalant qui gratte ses allumettes sur tout ce qui passe à sa portée, y compris le décolleté d'une prostituée. Tony Musante hérite d'un rôle qu'on aurait imaginé réservé à Tomas Milian et s'y montre moins grimaçant que ce dernier. Jack Palance, avec sa tête de méchant, joue effectivement un méchant cruel et impavide mais qui ne manque pas de se signer pieusement tandis qu'Eduardo Fajardo est plus en retrait dans un rôle qui reprend peu ou prou celui qu'il tenait dans Django mais l'écharpe de Christophe Barbier laisse place à une occasionnelle seyante cape et un casque colonial. Dans cet univers très masculin Giovanna Ralli arrive tout de même à se tailler une place en révolutionnaire provocante, capable de sortir impeccablement maquillée des geôles gouvernementales.

Parfois décousu, notamment dans sa première partie, et égrillard dans son humour, El Mercenario fait néanmoins partie des belles réussites de Sergio Corbucci et du western italien avec un duel qui s'inscrit dans les annales du genre.
potion préparée par Zakath Nath, le Lundi 29 Mai 2023, 20:33bouillonnant dans le chaudron "Films".