Gereon Rath a intégré les SA et s'est rapproché de Walther Stennes. Charlotte doit se rendre sur une scène de crime après une effraction dans un grand magasin et comprend que sa petite sœur était présente au moment des faits. Alfred Nyssen organise une grande réception pour annoncer le lancement d'un ambitieux projet mais un bijou qu'il a confié à Helga attire l'attention d'un invité.

Il y a dix ans, attendre plus d'un an, voire plus de deux ans entre deux saisons d'une série était difficilement concevable, une excentricité que seuls Steven Moffat et Mark Gatiss semblaient se permettre avec Sherlock. La pandémie est depuis passée par là, bousculant les calendriers, et certaines séries particulièrement soignées visuellement demandent également plus de temps pour être mises en boite. Cependant, voilà presque trois ans que l'on attendait le retour de Gereon, Charlotte et tout le beau et moins beau monde du Berlin de la République de Weimar et si l'on n'a pas fait quelques révisions avant de se lancer dans cette saison 4 (je n'ai pas fait de révisions), il faut un petit temps pour replacer tous les personnages (celui-ci est-il nouveau? Était-il déjà dans la saison précédente et suis-je censée le connaître?) et où ils se situent les uns par rapport aux autres.

C'est néanmoins un plaisir de replonger dans ce marigot, pour une saison de douze épisodes encore une fois très denses: nous sommes en 1931 et Stennes, qui commande les SA de Berlin, décide de renverser Hitler pour prendre le contrôle du parti nazi; une guerre des gangs se déclenche au sein de la pègre après une vacance de pouvoir; une mystérieuse société secrète se substitue à une justice estimée trop laxiste; les communistes ont leurs propres plans; Alfred Nyssen se lance dans une nouvelle entreprise audacieuse mais est distrait par une sombre histoire de diamant que ses propriétaires légitimes aimeraient récupérer, peu importe les moyens; Charlotte essaie d'aider sa petite sœur et s'attire les pires ennuis tout en commençant à douter de Gereon qu'elle a surpris en uniforme de SA... Et il y a le docteur Schmidt, toujours le mystérieux docteur Schmidt qui fabrique on ne sait trop quoi.

Cela fait beaucoup et l'on se demande plus d'une fois si tout sera bouclé à la fin de la saison. C'est pourtant le cas, ou presque. Petit à petit, tout se met en place, tout se règle et peu reste ouvert pour la saison prochaine (quelque chose me dit qu'Anne Marie Nyssen n'a pas dit son dernier mot et la dernière scène extrêmement étrange pourrait faire partir la série dans les chapeaux de paille...). L'ambiance est toujours réussie et particulière, avec notamment toute une séquence de marathon de danse mémorable (ce qui permet d'imposer le nouveau tube de la série Ein Tag wie Gold) . On est ancré dans une réalité historique sordide et, connaissant les grandes lignes de la politique allemande des années 30 et 40, on sait que cela n'évoluera pas en bien mais à ceci se greffent des intrigues plus romanesques et tout ce qui tourne autour de Schmidt est de plus en plus à la lisière du fantastique. Les nombreux personnages ne sont pas oubliés en chemin par ailleurs dans cette surabondance d'arcs narratifs.

On peut ainsi craindre pendant les premiers épisodes que la relation entre Gereon et Charlotte recule de trois grands pas après avoir enfin avancé d'un petit la saison précédente. Les malentendus ne sont heureusement pas entretenus plus longtemps que de raison. Toni et Moritz sont par moment pénibles à déranger les efforts de leurs aînés ou à ne pas savoir où ils habitent mais cela s'arrange au fur et à mesure. Quant à Alfred Nyssen, il est de plus en plus bizarroïde et il y a un certain amusement à le voir sans arrêt mis à mal d'une façon ou d'une autre en se demandant comment il va bien pouvoir réagir. Les Nyssen trouvent d'ailleurs un adversaire de poids en la personne d'Abe Gold incarné par Mark Ivanir, gangster new-yorkais venu donner un coup de main à la branche berlinoise et respectable de sa famille, peut-être le nouveau personnage de la saison le plus intéressant et accrocheur. Les facilités sont néanmoins présentes, en multipliant les intrigues tout en faisant en sorte de les croiser, les coïncidences bien pratiques ne sont pas rares et l'on se dit plus d'une fois que Gereon et Charlotte se tirent à bon compte de leurs erreurs ou de leurs libertés prises avec les règles.

Attendue, cette saison 4 ne démérite pas et Babylon Berlin demeure l'une des séries les plus excitantes du moment, tout en restant suspendue sur un fil: ne deviendra-t-elle pas trop déprimante pour qu'on ose continuer, parviendra-t-elle à garder cet équilibre délicat entre reconstitution historique soignée et partis-pris plus fous sans basculer dans le n'importe quoi? Vivement qu'une cinquième saison apporte des éléments de réponse.