Philip Marlowe, privé à Los Angeles, est engagé par le général Sternwood, victime d'un maître-chanteur, Geiger, possédant des photos compromettantes de sa plus jeune fille, Carmen. Marlowe remonte rapidement la piste jusqu'à Geiger mais l'affaire se complique quand il retrouve ce dernier mort et les photos envolées.

Philip Marlowe est apparu pour la première fois dans une nouvelle datant de 1936 mais ce n'est vraiment qu'en 1939 qu'il fait ses grands débuts, dans le roman Le Grand Sommeil. Sept autres livres suivront en vingt ans et plusieurs adaptations verront le jour, Marlowe prenant tour à tour le visage, entre autres, d'Humphrey Bogart, Robert Mitchum ou encore Elliott Gould et bientôt Liam Neeson. Ce premier roman a été adapté à deux reprises et la première version est restée célèbre pour réunir à l'écran une nouvelle fois Bogart et Bacall après Le Port de l'Angoisse et pour son intrigue pour le moins alambiquée.

Le roman est un peu différent (notamment au niveau de Vivian Regan, le rôle ayant été développé pour permettre à Lauren Bacall de faire davantage d'étincelles avec son partenaire) mais là encore, ce qui ressemble au départ à une simple affaire de chantage rondement réglé par Marlowe se complique, alors que Rusty Regan, mari de Vivian, a brusquement disparu et que tout le monde pense que le détective le recherche, au point forcément de finir par susciter sa curiosité. Oh, et puis il y a le chauffeur de la famille Sternwood retrouvé mort, et on découvrira à la fin... la même chose que dans le film.

On suit néanmoins avec plaisir Philip Marlowe, archétype de privé de romans noirs avec son imper, son goût prononcé pour le whisky et son sens de la répartie. Il n'est pas sans rappeler les détectives de Dashiell Hammett en plus mélancolique peut-être et le monde qu'il traverse est plus glauque et poisseux, puisqu'il est question ici de pornographie mais surtout à cause du personnage de Carmen qui met mal à l'aise plus qu'elle n'agace à chacune de ses apparitions. La fin est aussi douce-amère puisque si on a quelques réponses, justice n'est pas totalement rendue dans un Los Angeles corrompu.

Le Grand Sommeil ouvre donc le bal des romans mettant en scène Philip Marlowe de manière percutante et si le personnage, qu'on semble connaître même sans l'avoir vraiment croisé tant il incarne le détective privé américain, peut paraître cliché, c'est tout simplement parce qu'on a ici un des modèles d'origine, et quel modèle.