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Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Le Temps de l'Innocence
Dans la haute société new-yorkaise de la fin du XIXe siècle, Newland Archer, avocat fiancé à la sage May Welland, rencontre la cousine de cette dernière, la comtesse Olenska, qui fuit un mariage malheureux. Leur rapide attirance mutuelle ne peut éclater au grand jour dans la société corsetée qui est la leur.

Malgré une filmographie éclectique et qui l'était déjà trente ans plus tôt quand il a réalisé le film dont il est question ici, Martin Scorsese sera probablement toujours, en premier lieu, associé aux histoires de gangsters. Il peut donc être un peu surprenant, au premier abord, avec cette adaptation d'un roman d'Edith Warthon, de le voir s'aventurer sur des terres où l'on aurait davantage imaginé un James Ivory. Pourtant, on y retrouve un thème récurrent chez lui, la description d'un milieu avec ses codes, ses rites et ses exigences où chaque écart amène sanction: contrairement au New York des bas-fonds dépeints quelques années plus tard par le réalisateur dans Gangs of New York qui se déroule moins d'une décennie plus tôt dans la même ville, les grands bourgeois du Temps de l'Innocence pratiquent une élimination sociale plutôt que physique mais elle n'en est pas moins cruelle et sans appel.

C'est dans cette ambiance que l'on pénètre d'emblée, en passant d'un opéra à un bal tandis que la caméra navigue dans des intérieurs plus cossus les uns que les autres, aux murs couverts d’œuvres d'art. Ce luxe ostentatoire, surchargé, devient vite étouffant, à l'image des conventions qu'entretiennent les personnages. La passion qui nait entre Newland et Ellen ne peut s'épanouir tandis que le premier, fiancé à une jeune femme charmante mais conformiste, doit à tout prix maintenir les apparences et que la seconde, dont la séparation avec son mari fait déjà jaser, ne peut se permettre la moindre excentricité supplémentaire alors que sa famille la réintroduit non sans mal dans le monde. L'hypocrisie est évidemment à son comble dans de telles circonstances, les plus coupables d'infidélité se précipitant pour condamner les autres et au fond personne n'est dupe mais l'innocent Newland va cependant s'imaginer un instant pouvoir échapper à ces règles pour être finalement maintenu bien à sa place.

Scorsese aurait facilement pu tomber dans l'académisme, la société rigide qu'il décrit se refléter dans sa mise en scène et le recours régulier à la voix-off pour présenter les personnages et leurs pensées peut passer pour une facilité mais il ne se prive pas pour expérimenter: on a droit à un audacieux fondu au jaune vif par exemple même si par ailleurs tout n'est pas très heureux comme des raccords très brusques dans la première scène lorsque Lefferts observe les autres spectateurs à travers ses jumelles. À cela s'oppose un rythme plus paisible, la romance tout en non-dits de Newland et Ellen ne pouvant se précipiter ni même se concrétiser, et on a droit à des plans posés et splendides comme celui du voilier qui passe devant le phare au soleil couchant (les soleils couchants en art sont apparemment une grosse tarte à la crème mais ici c'est superbe alors ne boudons pas).

Quant au casting, il est aussi luxueux que les décors. Malgré la retenue exigée par leurs rôles, Daniel Day-Lewis et Michelle Pfeiffer campent un couple impossible émouvant tandis que Winona Ryder se tire honorablement du rôle ingrat de l'ingénue fade en comparaison de la comtesse qui n'est finalement pas aussi dupe qu'elle en a l'air mais reste toujours une étrangère pour son fiancé. Le reste de la distribution aligne des comédiens britanniques réputés (une constante dans les films historiques américains même quand ils ne se passent pas en Grande-Bretagne, visiblement): Richard E. Grant en maître de l'étiquette infidèle et langue de vipère en chef, Stuart Wilson dans le rôle de Julius Beaufort, dont la conduite fait jaser mais est tolérée tant qu'il est à la tête d'une grosse fortune ou encore Miriam Margoyles en matriarche pittoresque mais impitoyable.

Le Temps de l'Innocence est un beau film lent dont la plastique soignée et la délicatesse apparente cachent un monde impitoyable pour tous ceux qui n'en maîtrisent pas les arcanes ou choisissent délibérément de ne pas les respecter. Souvent oublié quand il s'agit de parler de l’œuvre de Martin Scorsese, il est cependant remarquable en tout point.
potion préparée par Zakath Nath, le Dimanche 19 Juin 2022, 20:01bouillonnant dans le chaudron "Films".