À la mort du dernier Khalife, assassiné par le poète asharite Ammar ibn Khairan, l'Al-Rassan a éclaté en plusieurs petits royaumes, dont les plus puissants sont Cartada et Ragosa. Exilé à Cartada, Ammar y fait la connaissance de son jumeau spirituel, le capitaine jaddite Rodrigo Belmonte, lui-même exilé par le roi Ramiro du Vallédo, un des trois royaumes d'Espéragne. Les deux mercenaires, accompagnés par la médecin kindath Jehanne, accomplissent bien des exploits. Mais quand les royaumes d'Espéragne s'unissent pour reprendre la péninsule aux Asharites, cette alliance se retrouve évidemment compromise...

Difficile de ne pas reconnaître dans ce roman de Guy Gavriel Kay la période de la Reconquista déplacée dans un contexte de fantasy, les Asharites étant les Maures, les Jadites espéragnais les catholiques espagnols, et les Kindaths les hébreux. Peu de magie, mis à part le don de Diego Belmonte, voilà qui change du médiéval fantastique à la sauce nains et elfes, sans qu'on tombe pour autant dans le roman historique!

Les personnages sont particulièrement réussis, pleins de répondants, certains se révélant plein de surprises: Inès de Valledo n'est pas une simple grenouille de bénitier et est une reine bien plus habile qu'elle n'en laisse paraître, Alvar pourrait être un énième "petit-jeune-qui-découvre-la-vie" mais se révèle bien moins naïf que le modèle habituel.

Le fait qu'on parle de reconquête ne doit pas non plus faire penser qu'il n'y a qu'une suite de batailles: celles-ci n'arrivent que dans la dernière partie, notemment avec le duel inévitable des deux héros. Kay décrit plutôt les dernières heures d'un monde, dans un climat crépusculaires (qui n'oublie pas les scènes d'actions, rassurez-vous).

Le style est superbe, on est souvent surpris (même si Kay donne parfois l'impression d'abuser du genre "je vous ai fait croire que Truc était mort quand en fait c'était Machin", mais ça marche!

Vraiment un incontournable de la fantasy, qui plaira même à ceux qui n'accrochent pas forcément au genre...