Dans le lointain royaume de Delain, le roi Roland, dont le seul exploit est d'avoir tué un dragon dont la tête orne depuis ses appartements, est empoisonné par son fourbe conseiller, le magicien Flagg. Ce dernier fait accuser l'héritier du trône, l'admirable Peter, pour faire couronner à sa place son cadet influençable, Thomas. Du haut de la tour où il est enfermé, Peter planifie son évasion pour sauver le royaume du chaos.

Il y a de cela fort longtemps, Stephen King, auteur connu et reconnu de romans d'horreur, s'est mis en tête d'écrire une histoire plus accessible à un jeune lectorat pour que sa fille Naomi puisse au moins lire une de ses œuvres sans avoir à attendre trop longtemps. Il y a un peu moins fort longtemps que cela mais un peu quand même car j'étais au collège, j'avais lu ce conte, Les Yeux du Dragon, dont j'avais aussi apprécié les illustrations de l'édition française signées Christian Heinrich (qui avait aussi illustré L'Aigle de Mexico d'Odile Weulersse avant cela, un bouquin qui avait marqué mon année de 6e). Je n'avais pourtant pas apprécié le livre plus que cela, il faut dire que j'avais déjà abordé King par des romans plus impressionnants comme Ça mais il m'en restait quelques images fortes.

À la relecture, c'est un peu le même sentiment qui domine: King se prête bien à l'exercice du conte de fées tout public (encore qu'un peu cru par moment, surtout au début), avec un méchant très méchant puisqu'on y croise la figure de Flagg que l'on reverra ailleurs, un prince parfait en la personne de Peter, une mère sage et douce mais vite enlevée et un père qui fait de son mieux. Pas étonnant dès lors que le personnage de Thomas, petit frère malheureux et peu doué dans à peu près tous les domaines, envieux mais pas fondamentalement mauvais, soit le plus intéressant et le plus mémorable. Le goût du détail qui tranche avec les contes traditionnels où le "ta gueule c'est magique" a souvent valeur de loi, paie quand cela permet d'amener des éléments cruciaux à l'avance, comme l'importance d'avoir de bonnes manières à table, mais se révèle parfois superflu comme le périple de Ben et Naomi dans le dernier tiers, qui parait interminable et dont les pages consacrées comparées à l'importance de leur présence est totalement déséquilibrée (de là à penser que Stephen King a étalé ces péripéties pour qu'un personnage nommé comme sa fille soit mis en avant, il n'y a qu'un pas).

Malgré ces longueurs superflues, Stephen King réussit avec Les Yeux du Dragon a offrir un récit adapté à de plus jeunes lecteurs qu'à son habitude, sans pour autant délaisser son penchant pour l'horreur, le personnage de Flagg ne se départissant pas de son aura effrayante.