Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Le Samouraï
Jef Costello est un tueur à gages solitaire. Après avoir exécuté un contrat, malgré un alibi soigné, il attire l'attention d'un commissaire de police qui ne croit guère à son innocence. Les commanditaires du meurtre qu'il a commis décident de le faire disparaitre.

Au cours de mes participations au Noirvember Challenge ces dernières années, je me suis exclusivement concentrée sur des films américains. Ce n'est absolument pas une obligation mais j'avais quasiment tout à découvrir d'un genre tellement lié au cinéma d'outre-atlantique qu'il me semblait prioritaire de commencer par écluser ses grands classiques et ses petites séries B malignes avant d'aller voir ailleurs, ou plutôt ici. Alors que novembre arrive à grands pas (si! si!) je ne suis absolument pas motivée pour rempiler une nouvelle fois. Le hasard de l'actualité m'a donné l'occasion de découvrir enfin un des fleurons du film noir hexagonal, Le Samouraï, sans me donner du coup l'impression que j'entamais sur un programme à venir.

Avec son tueur à gages mutique dont seuls des oiseaux en cage partagent son minuscule appartement et qui se retrouve pris entre deux feux, police et anciens employeurs, Le Samouraï semble archétypal en diable. Justement, d'où viennent les archétypes? Le film de Jean-Pierre Melville a influencé des cinéastes aussi connus que John Woo et Quentin Tarantino, on a donc affaire à une des pierres fondatrices des œuvres qui s'attachent aux pas d'un tueur plutôt que d'un détective, flic, petit truand ou gangster bien installé. Avec sa fausse situation du bushido pondue par Melville en ouverture, Le Samouraï fait preuve d'un dépouillement certain: dans les dialogues, il faut attendre dix bonnes minutes pour en avoir un, dans ses personnages, réduits souvent à une fonction (le commissaire, la pianiste... peu importe comment ils s'appellent), dans son intrigue linéaire... On est quasiment dans l'exercice de style.

Du style, il y en a, et pas seulement dans l'allure du personnage principal. La réalisation de Melville est froide, à l'image de ces éclairages souvent grisâtres de matinées après des nuits blanches. Le personnage principal est une page blanche, sans passé (on ne cherche pas à expliquer ce qui l'a amené à faire ce job), avec une maîtresse, certes, mais envers qui il n'y a pas vraiment de contact en dehors de ce que son boulot du moment exige, sans amis bien qu'il ne dédaigne pas une partie de poker. Sans passé, sans avenir non plus car tout méticuleux et prévoyant soit-il, il ne peut jouer éternellement avec le feu, entre une police qui le remarque enfin et des malfrats qui voient d'un mauvais œil la nuit de garde à vue qu'il a passé, quand bien même il en ressorti libre. La trajectoire est donc prévisible mais fonctionne par son inexorabilité même, qui n'échappe du reste pas au premier concerné. Ce dernier a beau faire ce qu'il faut pour se sortir des embuches à mesure qu'elles se présentent, il parait surtout résigné à ce que l'inévitable arrive incessamment.

Un tel ascétisme dans l'écriture et la mise en scène se répercute sans surprise dans l'interprétation. François Périer campe un commissaire acharné mais aussi pondéré, Nathalie Delon une maîtresse qui accepte tout sans faire de scènes, Cathy Rosier une pianiste qui en a trop vu mais qui n'est ni le témoin n°1 à abattre, ni la femme fatale... Bien sûr, il y a Alain Delon. Joue-t-il bien? Joue-t-il mal? Joue-t-il? Le film ne donne pas d'indication sur l'étendue de son registre mais il est exactement ce qu'il faut ici: froid, impassible, une beauté lisse mais inquiétante, un personnage pour lequel on ne peut ressentir de la sympathie mais qui est suffisamment magnétique pour qu'on le regarde et personne d'autres pendant quasiment deux heures.

Parce qu'il aura marqué et inspiré des réalisateurs divers, Le Samouraï pourrait donner la fausse impression de manquer d'originalité alors qu'il fait parti de ces œuvres matricielles. Son côté clinique et sans affectation, son anti-héros robotique et élégant mais au fond sans glamour dans son mode de vie en font un modèle du genre.
potion préparée par Zakath Nath, le Lundi 19 Août 2024, 22:09bouillonnant dans le chaudron "Films".