La position de Thomas Cromwell sort renforcée de la chute d'Anne Boleyn et de ses proches. Le roi a une nouvelle épouse et bientôt l'héritier mâle tant espéré. Après la mort de la nouvelle reine, Henry VIII souhaite néanmoins se remarier. Cromwell est une fois de plus l'homme de la situation et pourtant elle lui échappe.

Les deux premiers tomes de la trilogie d'Hilary Mantel consacrés à Thomas Cromwell, conseiller d'Henry VIII jusqu'à ce qu'il perde la tête lors d'une exécution particulièrement laborieuse, avaient rencontré un vif succès, des prix littéraires prestigieux, et avaient aussi eu les honneurs d'une adaptation de prestige sur la BBC, Wolf Hall. Adaptation dans laquelle on croisait la moitié des acteurs de Game of Thrones, même directrice de casting oblige, et où feu Bernard Hill en duc de Norfolk donnait la réplique à un Mark Rylance plus impavide que jamais dans le rôle principal.

Le dernier tome a mis plus de temps à venir et Mantel est hélas décédée peu de temps après sa publication. On retrouve en tout cas ce qui a fait la force des précédents romans. Un style faussement simple avec un récit entièrement au présent de narration, le point de vue en apparence détaché de Cromwell mais qui n'est pas sans sentiment, ni ressentiment, cet enchaînement d'événements en apparence innocents mais qui, accumulés, conduisent certains membres de l'entourage du roi à leur perte. Cette fois-ci c'est le tour de Cromwell, mais pas avant d'avoir suivi le bref mais fructueux, temporairement du moins, mariage d'Henry avec Jane Seymour, puis celui vite esquivé avec Annes de Clèves.

La chute est fulgurante, on ne s'attarde pas sur l'emprisonnement de Cromwell, on voit défiler les traitres, les alliés loyaux sont rares et impuissants, les ennemis de toujours ont attendu leur heure et s'en donnent à cœur joie. Finalement ce n'est pas tant la position privilégiée de Cromwell, sa religion, ses décisions qui excitent ses adversaires que ses humbles origines. Quant à Henry, qui a accepté les familiarités de Cromwell, il ne perd pas de temps à lui tourner le dos. Tout habile soit-il, Cromwell a oublié que les rois n'acceptent pas qu'un serviteur soit témoin de leurs faiblesses et malgré ou à cause de tout ce que son conseiller a fait pour lui complaire, ce dernier est devenu trop encombrant.

La conclusion de la trilogie est magistrale, toujours passionante malgré un nombre conséquent de pages, et on laisse Cromwell à son désolant destin avec un petit pincement au cœur.