Près de Prague, la vie d'aristocrates et de leur entourage est perturbée alors qu'approche le 30 avril et la Nuit de Walpurgis: les morts reviennent en possédant les vivants, passé et présent se confondent alors que la révolte gronde.

Gustav Meyrink est surtout connu pour avoir écrit Le Golem. Il y avait cependant un autre roman de l'auteur autrichien dont le titre m'hypnotisait quand j'étais gamine et que je le voyais dans la bibliothèque de mes parents: La Nuit de Walpurgis. Que je lisais trop vite malgré tout et pendant longtemps j'ai cru que cela s'appelait La Nuit des Walpurgis. Je crois que je m'imaginais que les Walpurgis étaient des genres de Nazguls. Il est probablement heureux que je n'ai pas vraiment essayé de le lire à l'époque, juste parcouru le premier chapitre, car j'aurais été déçue de ne pas voir débouler les Walpurgis pour terrifier tout le monde.

Le roman repose avant tout sur son ambiance: on suit quelques personnages alors que la nuit approche et avance, qu'ils soient aristocrates claquemurés dans leur demeure, médecin de cour, ancienne prostituée ou domestiques révolutionnaires. La frontière entre passé et présent se brouille: il n'y a pas vraiment d'apparition de fantômes, les vivants sont possédés par des esprits du passé, et peu à peu on ne sait plus s'ils revivent une guerre ancienne ou une révolution imminente. Ce qui semble au départ une simple histoire de revenants prend un tour bien plus déstabilisant et les personnages volontiers grotesques y contribuent comme la comtesse Zahradka ou le docteur Flugbeil, tandis que la romance des jeunes Polyxena et Ottokar (qui va se retrouver un sceptre en main, non, ce n'est pas une blague) est fort contrariée par les événements de cette folle nuit. L'intrigue est donc ardue à suivre et le devient de plus en plus à mesure que l'on avance mais Meyrink restitue à merveille une atmosphère de magie inquiétante, qui plane sur tout le roman et que l'on associe volontiers au décor praguois (bien que les personnages mettent un point d'honneur à éviter cette ville perçue comme dangereuse pour eux, ce qui ne les mettra pas à l'abri de ce qu'ils appellent le monde).

Voilà donc un roman qui risque de laisser sur le carreau pour qui cherche un déroulement bien cadré et savourer du gothique classique. La Nuit de Walpurgis emportera pourtant les autres dans sa folie avant de les laisser se demander ce qu'ils ont bien pu lire.