Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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The Artful Dodger
Jack Dawkins a échappé à la prison et à son existence de pickpocket pour devenir chirurgien en Australie. L'arrivée de son ancien chef de bande, Fagin, parmi des bagnards fraîchement débarqués menace sa nouvelle vie, d'autant que ce dernier nourrit de nouveaux plans qui impliquent sa participation. Il tombe également sous le charme de Belle, la fille du gouverneur qui porte un intérêt prononcé pour la chirurgie.

On ne va pas se mentir, le personnage principal d'Oliver Twist est loin d'être le plus mémorable du roman qui porte pourtant son nom, comme souvent chez Dickens d'ailleurs. De là à dire, comme c'est répété dans cette mini-série que "tout le monde déteste Oliver", il y a un pas que je ne franchirai certainement pas mais les lecteurs et spectateurs des multiples adaptations sont généralement davantage marqués par le méchant Fagin, le sinistre Sykes et bien sûr le Renard ou le Sacré Coquin selon les traductions, the Artful Dodger dans la langue de Shakespeare, Jack Dawkins pour tout le monde: le jeune pickpocket tout à fait acclimaté à son mode de vie et qui finit condamné à la déportation en Australie après avoir été pris la main dans le sac. Une popularité qui lui vaut souvent d'avoir un rôle plus flatteur dans les adaptations où il est fusionné avec le personnage de Charley. David Maher, James McNamara et David Taylor lui ont donc donné la vedette en imaginant sa vie quinze ans plus tard. Pour faire bonne mesure, Fagin a évité la potence et le duo se reforme malgré lui pour de nouvelles entreprises criminelles.

On découvre un Renard dont les doigts habiles lui ont permis de devenir chirurgien, à bord d'un navire après qu'on l'ait fait évadé, puis en Australie où il n'a pas eu à partager le quotidien des bagnards mais où il ne peut cacher totalement ses humbles origines, ce qui lui vaut mépris et jalousie de gens mieux nés mais moins doués. Décidé à mener une vie honnête, Jack est trop audacieux pour ne pas s'attirer d'ennuis mais suffisamment malin pour s'en sortir, de justesse. L'arrivée de Fagin va bouleverser le fragile équilibre de la colonie, d'autant que le maître voleur agit pour un mystérieux commanditaire. Sur le papier, l'idée est amusante, à l'écran, ça l'est aussi mais la satisfaction est tempérée par quelques écueils de scénario. Le rythme est soutenu, les péripéties s'enchaînent, c'est tout à fait divertissant. La volonté est clairement de dépoussiérer Dickens et d'égratigner les classes dirigeantes. Les épisodes s'ouvrent et se closent généralement sur du rock sans que le procédé ne parasite trop la reconstitution.

Malheureusement, les personnages qui entourent Dawkins et Fagin sont trop monolithiques, chacun dans leur genre: le vilain flic accroc à la pendaison, les élites corrompues et faciles à berner, le rival jaloux et prétentieux, le soupirant ridicule... On a vu cela cent fois et il y a très peu de marge d'évolution. Belle est de toute évidence destinée à capter un public féminin espérant voir une forte tête défier les conventions mais elle est caractérisée très grossièrement: elle a tout lu sur la chirurgie, une profession qui lui est interdite parce que femme alors qu'elle est plus compétente et savante que bien des hommes... Mais lorsqu'elle s'emporte contre sa condition cela sonne creux pour la bonne et simple raison qu'on lui laisse faire tout ce qu'elle veut: elle a accès à toute la documentation souhaitée, repousse sans conséquence les soupirants qu'on lui présente et quand elle met la théorie en pratique, essuie quelques remarques machistes vite éteintes par l'argument massue: "mon père vous paie". Les femmes sont d'ailleurs soit très raisonnables et compétentes dans leur branche pour mieux contrebalancer l'inconséquence des hommes, soit des écervelées qui ne pensent qu'au sexe. Quant à Oliver Twist, on craint le pire quand arrive le gag consistant à le montrer en surpoids car désormais, quand il en redemande, on le ressert (la mise est un peu sauvée quand il se révèle plus malin que prévu. Il y a un twist dans tous les sens du terme).

On ne sait finalement pas à qui la mini-série s'adresse vraiment: avec des opérations de chirurgie filmées en détail et quelques situations scabreuses, elle n'est pas destinée à un public familial mais les plus matures risquent de vite se fatiguer des personnalités simplistes de la plupart des personnages, qui manquent de profondeur. Le casting est par ailleurs des plus sympathiques. Thomas Brodie-Sangster, la trentaine passée et toujours aussi juvénile, campe un Dodger plus posé et aimable que celui du roman mais qui n'a rien perdu de son insolence et de son astuce. David Thewlis s'en donne à cœur joie en Fagin filou et traitre mais en même temps susceptible de rédemption. Leurs compères sont bons dans leur partition mais plus limités par les rôles trop basiques qu'on leur donne à jouer comme Damon Herriman, excellent quand il s'agit d'incarner un antagoniste comique tout autant que dangereux mais dont le personnage n'est pas très intéressant. Il en va de même pour Maia Mitchell très mignonne et vive mais dont la Belle devient vite crispante et sans surprise dans ses réactions ou encore Lucy-Rose Leonard dans le rôle ingrat de sa sœur Fanny. Certaines ellipses sont étranges à ce propos: elle met le cap sur le soupirant de sa sœur puis sur un autre personnage sans explication puisque son premier objectif n'a rien fait à ce que l'on sache pour la décourager et reste dans le voisinage.

The Artful Dodger propose en huit épisodes enlevés une relecture irrévérencieuse des personnages créés par Charles Dickens mais à trop charger la barque pour tourner en dérision ses antagonistes et la bonne société victorienne hypocrite, l'humour tombe trop souvent à plat et laisse un petit goût désagréable. Dommage donc car il se dégage par ailleurs une bonne humeur par moment communicative.
potion préparée par Zakath Nath, le Mercredi 13 Décembre 2023, 20:44bouillonnant dans le chaudron "Séries tv".