Où suis-je?

Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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Scarface
Tony Guarino, jeune voyou de Chicago aux ambitions démesurées, tue un caïd de la pègre qui lui reprochait de fréquenter sa maîtresse. Après s'être enrôlé dans l'armée pour se faire oublier quelques temps, il revient dans sa ville natale avec une grosse balafre gagnée à la guerre qui lui vaut le surnom de Scarface, et entreprend une fulgurante et violente ascension alors que les gangs s'affrontent pour tirer les plus grands profits de la Prohibition.

Lorsque fut proclamée l'annonce d'une nouvelle version de Scarface, d'abord avec David Ayer aux commandes, aux dernières nouvelles entre les mains de Luca Guadagnino sur un script des frères Coen, les cris d'indignation sur les réseaux sociaux n'ont pas manqué de s'élever: au-delà d'un effet de saturation vis-à-vis des remakes, reboots et autre suites, préquelles et spin-off, la grande question outragée était "comment peut-on oser prétendre refaire le film-culte de De Palma et comment un autre qu'Al Pacino pourrait-il être Scarface?". À cette indignation a succédé une autre vague de récriminations: "mais enfin, cinéphiles du dimanche, ne savez-vous donc point que le film de De Palma n'est rien de plus qu'un remake d'un film de 1932 qui n'était pas passé inaperçu en son temps? Un film réalisé par le grand Howard Hawks? Paul Muni ça vous dit quelque chose les bouseux?". Pourtant si l'on doit vraiment remonter aux origines, le film de Hawks était lui-même une adaptation d'un livre d'Armitage Trail, de son vrai nom Maurice Coons, prolifique auteur de nombreuses nouvelles policières et de deux romans avant son décès à l'âge de 28 ans.

Le scénario de Ben Hecht prend pas mal de libertés par rapport au roman, notamment en intégrant davantage d'épisodes de la vie d'Al Capone, alors au sommet de sa gloire, comme le massacre de la Saint-Valentin, en ajoutant des tendances incestueuses chez Tony vis-à-vis de sa sœur, en remaniant notablement les personnages féminins... On reconnait cependant des passages, transformés, des personnages développés différemment(Lovo ou Rinaldo) ou dont le rôle a été singulièrement modifié (la tragédie familiale est toujours présente mais sous une autre forme, Ben Guarino n'ayant évidemment pas les mêmes rapports avec Tony dans le livre et dans le film).

Mais le roman, du coup, dans tout cela? On y a déjà l'essentiel, l'ascension d'un gangster violent et qui ne s'embarrasse pas de scrupules, qui se saisit de tout ce qui lui parait attirant: opportunités, argent ou femmes, mais dont l'audace, après l'avoir servi, va le conduire à sa perte. Tony n'a rien de sympathique mais on le suit pour voir jusqu'où il est capable d'aller et ce qui va entraîner sa chute. On croise des policiers et des notables corrompus, des gangsters rivaux fourbes, et surtout Jane, la fascinante porte-flingue dont va s'enticher le personnage principal. Le style est nerveux et entraîne le lecteur dans sa course pendant 200 pages sans lui laisser le temps de souffler. On devine cependant un peu la plume de quelqu'un habitué à un style feuilletonnant: ainsi, certaines informations nous sont rappelées régulièrement alors qu'il y avait peu de risque qu'on les oublie.

Matrice de films entrés dans l'Histoire du cinéma, le Scarface d'Armitage Trail est un roman au rythme haletant qui mérite amplement d'être redécouvert, pas seulement par curiosité pour voir comment on a pu passer de Tony Guarino/Camonte dans les années 20 à Tony Montana star des cités depuis près de 40 ans, mais aussi parce que c'est avant tout un récit excellent et percutant.
potion préparée par Zakath Nath, le Lundi 23 Août 2021, 11:20bouillonnant dans le chaudron "Littérature".