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Bienvenue sur ce blog consacré à un peu tout et n'importe quoi, mais où il sera principalement question de: Harry Potter et la fantasy en général, de romans d'aventures maritimes, de littérature, de séries télés (majoritairement des productions britanniques, mais pas que) et de cinéma!


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The Crown, saison 3 épisode 5: Coup
Assailli de critiques de toutes parts, Harold Wilson pense gagner du répit en déchargeant Lord Mountbatten de son poste de chef d'État-Major des Armées. Ce dernier est approché par un patron de presse aussi peu satisfait que lui de la politique du gouvernement.

Louis Mountbatten, oncle et père de substitution de Philip, est apparu régulièrement dans la série depuis ses débuts mais sans être au centre d'un épisode. C'est désormais le cas avec celui-ci.

On démarre dans les locaux du Daily Mirror, un quotidien de type tabloid mais qui contrairement à son notoire concurrent The Sun cible un lectorat travailliste. Cecil King, le PDG, inspecte la une du journal à sortir et la trouve trop tendre avec Harold Wilson. Il corrige donc le titre pour un lapidaire "Enough is enough".

Lors de la revue de presse suivante du Premier Ministre et de son gouvernement, le constat est cruel: leur politique est sévèrement critiquée de manière unanime, y compris par leurs soutiens habituels, bref, la situation est délicate. Suggestion est donc faite à Wilson de faire un geste: puisque réduire les dépenses inutiles dans le domaine de la Défense faisait partie de ses promesses de campagne et que Lord Mountbatten s'oppose à la moindre mesure en ce sens, il y a moyen de faire d'une pierre deux coups en l'évinçant: montrer au public que l'on souhaite se débarrasser d'un des plus grands représentants de l'ancien monde privilégié quelqu'un qui est de plus vaniteux, snob et assoiffé de pouvoir, et avoir les coudées franches pour faire les coupes nécessaires dans le budget.

Mountbatten, qui n'a pas les oreilles qui sifflent, est occupé à passer en revue des troupes, sans se douter que c'est peut-être son dernier engagement officiel. Greg Wise avait interprété une version du personnage ambitieuse mais qui n'allait finalement pas plus loin que vouloir une dynastie à son nom en mariant son neveu à l'héritière du trône, projet contrarié on s'en souvient, ici on passe au niveau supérieur de l'intrigue d'alcôve en engageant Charles Dance pour lui succéder. Le message est clair, ça va comploter sec.

Wilson annonce donc à Mountbatten qu'on se passera désormais de ses talents et qu'il peut goûter à une retraite bien méritée après de longues années de bons et loyaux services. Mettre les formes ne sert à rien, l'ancien vice-roi des Indes n'est pas dupe: il est viré. Et il n'apprécie pas, pas plus que le projet de donner moins d'argent à l'armée alors que toutes les autres grandes puissances font le contraire. Il ne sort pas un "vous n'en avez pas fini avec moi!" avant de vider les lieux mais son attitude est claire: si Wilson entend qu'on joue Les Pluies de Castamere sous ses fenêtres, il n'aura pas à se demander d'où ça vient.

Cecil King, en tout cas, n'est pas du tout amadoué par la manœuvre des Travaillistes, bien au contraire: comment Wilson peut-il oser congédier un homme qui a tant donné à l'Empire? Il ne compte pas accepter cela, et décide que le moment est venu de faire plus que publier des articles dézinguant le Premier Ministre.

Mountbatten, lui, fait ses adieux à son personnel en embarquant un grand portrait de sa personne et le gâteau qu'on lui a offert pour fêter son départ, tandis que la foule chante Auld Lang Syne. Dance ressemble plus que jamais à Ian Richardson dans House of Cards, je ne sais pas si cela a joué dans le casting mais c'est frappant dans cette scène.

Après quoi, il ne lui reste plus qu'à regagner sa gentilhommière et s'y morfondre avec rien d'autre à faire que regarder les poils de son chien pousser. Mais gare, il est un peu comme le roi Loth dans Kaamelott: quand on le confine chez lui, il s'ennuie et il se met à comploter.

La reine, elle, s'offre une petite récréation. Entre la signature de deux papelards, elle visite ses élevages de chevaux car on le sait, les courses, c'est sa grande passion. On compte sur le petit nouveau prometteur, Apprentice, pour remporter quelque chose à Ascot bien que cela fasse un petit moment que les poulains d'Elizabeth ne caracolent plus en tête.

De fait, après avoir donné quelques espoirs, Apprentice se fait coiffer au poteau par plusieurs concurrents et Porchey suggère à sa vieille amie que le système mis en place par George VI est peut-être obsolète et qu'il faudrait penser à aller voir dans les pays voisins quelles techniques plus modernes ils utilisent. Elizabeth rechigne à prendre des vacances mais Porchey insiste, on ira juste en France, l'affaire d'une semaine. Quant à Mountbatten, il ne manque pas de faire le parallèle entre la désuétude dans laquelle on considère les méthodes traditionnelles d'élevage de chevaux de course et la façon dont il a lui-même été jugé hors du coup. Voilà quelqu'un qui ne vit pas bien sa retraite.

Wilson est toujours bien soucieux et il s'en explique à la Reine: il va devoir se résoudre à annoncer la dévaluation de la livre. Elizabeth comprend bien que c'est grave mais une fois n'est pas coutume, elle n'est pas très concentrée sur son devoir. Bonne chance pour votre dévaluation, de mon côté je vais faire un saut en France. L'affaire d'une semaine, pas d'inquiétude, si vous avez besoin de moi vous n'avez qu'à m'appeler.

Ainsi Wilson fait son annonce en essayant de se montrer le plus rassurant possible: ça veut seulement dire que les biens importés coûteront plus chers, c'est juste l'occasion d'acheter davantage local, il faudra bien se serrer un peu la ceinture mais ça ira mieux ensuite. Mountbatten et King n'en perdent pas une miette et ne sont pas impressionnés.

Mountbatten a tout de même droit à quelques sorties de temps en temps pour s'occuper et il doit justement prononcer un discours devant des vétérans de la Seconde Guerre Mondiale qui ont fait campagne en Birmanie. Un speech dans lequel il déplore que les jeunes n'ont plus une bonne guerre pour forger des liens mais doivent se contenter d'un morne quotidien fait de dévaluation monétaire. Et comme il assume d'être un gros passéiste, il entonne The Road to Mandalay de Kipling en enjoignant le parterre à reprendre en chœur le poème avec lui. Dans la foule, Cecil King, satisfait: il tient l'homme idéal pour son petit plan.

Durant le cocktail qui suit, King approche donc Mountbatten pour le féliciter de sa vibrante prise de parole et l'invite à lui rendre visite à la Banque d'Angleterre, avec quelques amis il serait ravi de s'entretenir avec lui du climat actuel. Mountbatten est immédiatement appâté.

Pendant ce temps dans l'Hexagone, la reine visite des écuries et vit sa meilleure vie, dit quelques mots en français (Colman s'en sort bien même s'il n'y a qu'une réplique) et doit reconnaître que Porchey, qui l'accompagne fidèlement, avait raison, ils ont accumulé un retard considérable en terme d'élevage de chevaux de course. Porchey lui dit qu'il ne faut pas s'arrêter là et que puisqu'on y est, pourquoi ne pas poursuivre leur tournée un peu plus loin?

À la Banque d'Angleterre, King et ses confrères mettent Mountbatten au parfum: ils projettent ni plus ni moins que de déposer Wilson pour le remplacer et ils sont convaincus que le Lord ferait un très bon Premier Ministre. L'oncle de Philip est flatté mais tout de même, cela s'appelle un coup d'État et ce serait à la rigueur acceptable en situation de guerre mais on n'y est pas. Pas encore, lui rétorque-t-on mais Wilson ne compte pas s'arrêter à une dévaluation de la livre: lui et ses collègues ont un plan, coquettement nommé Brutus, qui consiste à déposséder la Banque d'Angleterre de ses pouvoirs, faire encore des coupes dans le budgets de la Défense, geler les avoirs des gouvernements étrangers, déclarer la guerre à la liberté et au capitalisme, laisser les Russes s'infiltrer dans les affaires du Royaume-Uni et décréter que le plat national serait désormais la fricassé de chatons.

Là, tout de même, Mountbatten se dit que ça va trop loin mais demande 48 heures pour réfléchir. Mais il a l’œil qui brille, le bougre. Enfin un peu d'action!

Avant l'action, la réflexion, et il s'en retourne dans son manoir faire quelques révisions sur le sujet des coups d'état, comment les réussir, et comment les rater, et suit avec attention l'actualité internationale, notamment l'agitation de l'autre côté de la Manche, parce que c'est vrai qu'en 1968, on a tout de même eu droit à plus palpitant qu'une visite d'Elizabeth II chez nos amis les équidés.

Elizabeth, elle, a tout simplement quitté la France pour le Kentucky toujours dans l'espoir de se mettre à jour question entraînement de bourrins et comme je m'y connais en chevaux aussi bien qu'en économie, c'est à dire que je sais ce que c'est, en gros, je fais confiance pour l'exactitude des détails techniques mais si ça se trouve c'est du grand nawak (mais Morgan fait plutôt bien ses recherches quitte à prendre des libertés, d'ailleurs j'en reparlerai parce que cet épisode en est un bon exemple). Bref, elle envisage de nommer Porchey directeur des courses pour qu'il chapeaute un peu tout et mette à profit ce que ce désormais long voyage leur a enseigné.

À Londres, les conjurés se réunissent de nouveau et Mountbatten est partant mais il a retiré quelque chose de son potassage: les coups d'état récents, au Ghana par exemple, ont été l'affaire d'une poignée d'hommes avec un petit régiment. Chez eux, ce n'est pas pareil, pour renverser le Premier Ministre, il faut l'appui de toutes les institutions, y compris la Couronne mais pas de panique, Elizabeth II, c'est la famille, il n'aura aucun mal à la convaincre.

Toujours dans le Kentucky, Elizabeth a un peu le spleen. Ce voyage a été bien agréable mais il lui a aussi offert l'occasion d'apercevoir la vie qu'elle aurait pu mener si elle n'avait pas hérité du trône: celle d'une femme de la haute pouvant se consacrer pleinement à ce qui l'intéresse le plus au monde, les chevaux. Et peut-être mariée à un autre aristo britannique quelconque et pas un prince descendant comme elle de Victoria, mais elle ne le formule pas. Sa dégustation de steak-frites est interrompue car on lui annonce un appel et la scène précédente donne lieu de croire qu'il s'agit de Mountbatten mais...

C'est Harold Wilson, qui n'est pas content du tout. Il a eu vent du complot contre lui, de l'implication de l'oncle de la Reine et si ça se sait, ça va barder: jusque-là, il a toujours essayé de prendre le parti de la Famille royale, mais si on sait que l'un de ses membres les plus éminents essaie de mettre à mal le processus démocratique, la mince réserve de patience des citoyens à l'égard des Windsor risque de s'évaporer totalement. Il est intéressant de voir que depuis les débuts de la série, la popularité de ces derniers qui était présentée comme à son zénith s'est étiolée en une petite vingtaine d'années.

Vous faites pas de bile, je m'en occupe, répond la Reine qui n'a pas l'air de rigoler. Elle va devoir écourter son séjour pour revenir aux affaires, ce n'est pas drôle pour elle mais de mon côté, ça m'avait manqué: Elizabeth remontant les bretelles de vieux bonshommes qui s'imaginent qu'ils peuvent n'en faire qu'à leur tête.

Loulou Mountbatten tente bien de lui présenter les choses sous le meilleur angle possible: il n'a fait ça que parce qu'il veut protéger son pays que Wilson précipite vers sa perte. Cela ne suffit pas pour émouvoir Elizabeth et on se demande franchement comment il a pu s'imaginer qu'elle roulerait avec lui.

Elle est bien placée pour savoir qu'il est difficile de ne pas intervenir dans les affaires du gouvernement, mais c'est ce qu'elle doit faire, que ce qu'elle voit lui plaise ou non. Si Wilson est si mauvais que cela, les gens ne revoteront pas pour lui aux prochaines élections, on est en démocratie, tout de même! Elle comprend que Mountbatten n'a pas l'habitude de rester passif mais il devra se trouver d'autres occupations que la conspiration, rendre visite à sa sœur, par exemple, qu'il a honteusement négligée depuis son retour à Londres (entre Philip et son film et Louis et ses intrigues, tous les prétextes sont bons pour ne pas voir la pauvre Alice).

Il s'exécute donc et Alice est morte de rire à l'idée que le frangin se soit pris une leçon de la part d'Elizabeth, parce qu'évidemment, elle a beau être malentendante et alitée, tout se sait tellement dans cette baraque que même elle est au courant. Mountbatten a du mal à voir l'humour dans sa situation et encore moins dans la philosophie d'Alice: ils sont vieux et un des avantages de la vieilleisse est de pouvoir se dire que plus rien n'est leur problème. Surtout pas les affaires d'un pays qui n'est même pas le leur. Pour Mountbatten, c'est son pays justement, et il est peut-être temps de faire un point nom de famille, entre une sœur qui s'appelle Battenberg et un frère nommé Mountbatten donc. Comme les Windsor, il s'agit à la base d'une famille allemande dont une branche s'est installée en Angleterre et lors de la Grande Guerre, pour bien montrer leur rupture avec l'ennemi, ils ont anglicisé leur nom: les Saxe-Coburg et Gotha sont donc devenus Windsor, les Battenberg ont traduit simplement le Berg en Mount et le tour a été joué. Enfin bref, que ça lui plaise ou non, Mountbatten doit se résoudre à ne plus s'en mêler et finir ses jours dans la discrétion (spoiler: il ne partira pas sur la pointe des pieds).

Philip de son coté vient voir sa femme et lui reproche sa longue absence qui a duré un mois plutôt qu'une semaine, tout cela en compagnie de Porchey dont il a appris qu'il était désormais le directeur des courses d'Elizabeth et qu'il serait donc beaucoup plus présent et pour ma part je pensais qu'on en avait fini avec ces histoires...

Heureusement, Elizabeth n'en a clairement rien à cirer et Philip le sent donc il rétropédale et s'excuse pour la conduite de son oncle encombrant avant de lui rouler une pelle histoire qu'elle ne soit pas trop triste d'avoir dû abréger son voyage. Ou pour marquer son territoire, on ne sait pas trop avec lui.

Bilan de l'épisode: c'est loin d'être mon préféré bien qu'il permette d'aborder un point important de la relation entre la Couronne et le Gouvernement et les limites de la première. De plus, puisque la mort de Mountbatten va probablement arriver la saison prochaine et qu'elle aura des conséquences sur la politique de Thatcher, il était nécessaire de passer un peu de temps avec lui.

Pour ce qui est de cette affaire de coup d'état, comme je l'ai dit plus haut, Peter Morgan se renseigne mais n'hésite pas à prendre des libertés: aussi invraisemblable que cela puisse sembler, Cecil King a en effet envisagé de renverser Wilson pour le remplacer par Mountbatten et a approché ce dernier mais ce n'est pas allé plus loin, l'intéressé estimant qu'il était trop vieux pour ces conneries. L'épisode aurait tourné court si on était resté fidèle à la réalité donc on comprend qu'on ait brodé. Toute l'intrigue parallèle avec Elizabeth n'était pas bien passionnante malgré la volonté de donner une cohérence thématique avec la nécessité de ne pas trop s'accrocher aux valeurs du passé et de savoir envisager le changement.

Le Point corgis: c'était un épisode consacré aux chevaux, à la niche, donc!
potion préparée par Zakath Nath, le Samedi 10 Octobre 2020, 16:32bouillonnant dans le chaudron "Séries tv".